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MUSIQUE BAROQUE  |  OEUVRE

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Antonio VIVALDI - Les Quatre Saisons (il Giardino Armonico) (1725)
Par CHIPSTOUILLE le 25 Juin 2005          Consultée 45799 fois

Contrairement à d’autres compositeurs, VIVALDI livrait avec les 4 premiers concertos de son opus 8 « Il cimento dell'armonia e dell'inventione », les clés (peut-être futiles) de leur compréhension. En effet, en plus des mesures et des notes, le prêtre italien annotait les partitions des quatre saisons d'autant de sonnets descriptifs. Des oiseaux revenant de leur migration aux siestes estivales en passant par quelques épisodes de chasse ou de tonnerre, ces poèmes ne laissent planer aucun doute sur les intentions du compositeur. Cette musique qui raconte une histoire, une évidence aujourd’hui, était un fait particulier dans le haut-baroque. Certes quelques livrets d’opéra et d’autres psaumes donnaient bien 1000 raisons pour des figures de style musicales, mais rarement des œuvres instrumentales s’étaient voulues aussi descriptives jusqu’alors. Un siècle plus tard, on qualifiera ce style de "pastoral".

Oubliées après la mort du compositeur (1), les quatre saisons de VIVALDI furent redécouvertes par Felix MENDELSSOHN–BARTHOLDY lors de ses recherches sur la musique ancienne, alors qu’il découvrait que BACH retranscrivit certains concertos du vénitien. Ce n’est véritablement qu’au XXe siècle qu’ils furent en réalité redécouverts dans l’Italie sombre de l’avant guerre. Joués dans les années 20, enregistrés à la veille de la seconde guerre mondiale, le succès international ne viendra qu’en 1948. Il s’agit aujourd’hui de l’œuvre classique comptant le plus d’enregistrements, de nombreux interprètes en ayant réalisé plusieurs. Tout le monde connait au moins les premières mesures du printemps, sur lesquelles Omar Sy, comme tout le monde du reste, ne sait refréner par-dessus un « Vous êtes bien aux ASSEDICS » (2) ou les foudres de l’été. Chef d’œuvre, 5 étoiles, 12 mouvements qui rivalisent d’excellence. Voilà pour les lieux communs.

C’est au jour d’interprétations plus récentes que les quatre saisons font disparaitre toute trace d’aristocratie incrustée. Nous évoquerons 3 d’entre elles dans cette chronique, un peu plus longue pour l’occasion. Nous commencerons avec celle de Fabio Biondi et la formation Europa Galante enregistrée en 2001, suivra celle de Giuliano Carmignola et le Venice Baroque Orchestra dirigé par Andrea Marcon (2000), et enfin la dernière qui, préférence oblige, justifie la pochette choisie, est celle d’ Il Giardino Armonico (1994).

Europa Galante et Fabio Biondi peuvent se vanter d’avoir enfanté une référence. Cette version qui, si elle ne se placera peut-être pas en première position chez tout le monde, devrait pour le moins se hisser dans le peloton de tête. Interprétées sur instruments d’époque, les quatre saisons y sont aussi équilibrées qu’audacieuses, et jouissent d’un son exceptionnel pour qui apprécie le côté moins lisse des instruments d’époque. Europa Galante n’oublie en effet pas de mettre en valeur sa basse continue, que ce soit de par la tenue longue des notes d’accompagnement, de par des appuis rythmiques marqués ou de l’effet de masse rococo des clavecins, théorbes et autres archiluths. Dans l’esprit relativement proche de la version d’Il Giardino Armonico, notamment de par son expressivité appuyée, elle n’en oublie pas les mélodies de la partition, respectant le matériau d’origine, contrasté. Sans oser prétendre que cette façon de jouer aurait pu avoir cours en ce début de XVIIIe siècle, on tient une version baroque de référence, colorée, qui fait plus entendre VIVALDI que ses interprètes. Les effets sont multiples et variés : les envolées d’oiseaux du printemps sont surprenantes, le tonnerre de l’été s’accompagne d’une pluie battante de tout l’attirail baroque requis, l’hiver est froid sans y être statique. Fabio Biondi sait mettre sa technique au service de la musique sans en faire des tonnes. Sous le signe de l’équilibre et de la variété, aussi entrainante que technique, si elle ne trouve pas grâce à vos yeux, il ne vous reste plus qu’à aller faire un tour dans le grenier (Isaac Stern peut-être ?)

En comparaison, Giuliano Carmignola pourrait s’avérer plus polémique. Très loin d’être anecdotique, il s’agit de la version la plus romantique des trois. Si l’on peut encore discerner quelques pincements de cordes en arrière plan, les concertos semblent pour instruments seuls et accompagnement, de l’époque plus tardive où les virtuoses affrontaient tout le reste tel que chez PAGANINI, BEETHOVEN, MENDHELSSOHN ou encore TCHAIKOVSKI. A peine a-t-on le temps de reconnaître le répondeur de pôle emploi que la formation s’efface au profit du soliste, qui offre ici une prouesse de technicité. Souple, véloce, virevoltant, mais plus surprenant, toujours subtil, le violoniste s’impose en bretteur, tel un mousquetaire. Les largos et adagios se métamorphosent en allegros, pas le temps de s’ennuyer. Outre cette métamorphose qui, après des années où les interprétations romantiques étaient finalement la norme, surprend peut-être moins, Carmignola fait surtout preuve d’une certaine classe. A l’image du packaging et de la pochette aux subtiles arabesques, l’ensemble est particulièrement soigné. C’est dans ses détails de sophistication, à première vue imperceptibles que ce disque parvient à se distinguer. Encore faut-il apprécier les histoires où le personnage principal s’accapare tout l’espace.

Enfin, le troisième lauréat et grand gagnant du concours n’est autre qu’Il Giardino Armonico. La formation italienne s’est ici totalement détachée de la partition, nous livrant une réinterprétation plus qu’une autre version. Le printemps n’est pas ici qu’une floraison, des petites filles naissent dans les roses et des garçons dans les choux. Les oiseaux que l’on perçoit sont ceux d’une Blanche Neige de Walt Disney, aimants et nombreux. L’été par comparaison est une traversée du désert sans la moindre goutte d’eau, et dont la foudre puissante ne peut émaner que d’un Zeus en colère. Les insectes que l’on y entend sont ceux des sept plaies d’Egypte. L’automne est ivre de ses vignes, avec ses chasseurs festifs. La pluie s’y fait grêle, ce ne sont d’ailleurs plus des grêlons mais des parpaings de glace qui tombent, annonçant la noirceur hivernale. Menaçants, les arbres défeuillés vous y toisent de leurs branches griffues. Le vent ne souffle plus il lacère, les violonistes ont troqué leurs archets contre des scies. Le feu crépitant dans l’âtre de l’adagio n’y est plus réconfortant mais hanté. Dehors, les flocons de neige se font lourds et suffocants. La fin de l’hiver, censée évoquer les passants qui marchent sur la glace, n’est plus qu’une piste de Bobsleigh ensanglantée. Cette version extrémiste, qui n’hésite pas à jouer de dissonances, à changer les rythmes et à casser les habitudes, bien plus que celle de Biondi, a bien sûr ses détracteurs. On prend toutefois un plaisir coupable à se délecter de ce déchaînement passionnel d'éléments. L'auditeur ici éloigné des charmes champêtres de par l'acquisition d'une version alternative, plus légère, pourra trouver un complément utile. Ce chef-d’œuvre le mérite bien.

(1) Totalement ? De fortes présomptions subsistent sur l’influence qu’ils auraient pu avoir sur le jeune Joseph HAYDN, cf. chronique des symphonies 6 à 8 dites « de la journée ».
(2) Vous n’avez toujours pas vu Intouchables ?

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- Il Giardino Armonico, Milan
- Giovani Antonini (chef d'orchestre)
- Enrico Onofri (violon soliste)
- Paolo Grazzi (haubois sur le rv 454)


- la Primavera (rv 269)
1. Allegro
2. Largo
3. Allegro
- l'estate (rv 315)
4. Allegro Non Molto . Allegro
5. Adagio . Presto
6. Presto
- l'autunno (rv 293)
7. Allegro . Allegro Assai
8. Adagio Molto
9. Allegro
- l'inverno (rv 297)
10. Allegro Non Molto
11. Largo
12. Allegro
- concerto For Oboe, Strings And Basso Continuo
13. Allegro
14. Largo
15. Allegro
- concerto For Violin, Strings And Basso Continuo
16. Allegro
17. Largo
18. Allegro



             



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