La rencontre de Ian ASTBURY, le brun aux cheveux longs admirateur de MORISSON et de la culture amérindienne, et de Billy DUFFY, le guitariste punk racé (animal fort rare), blond peroxydé à la coupe plus true tu meurs, va entraîner la création de DEATH CULT. Dès le début des années 80, le groupe va ouvrir pour BAUHAUS. La section rythmique composée de Jamie et Nigel, déjà chevronnée, complète admirablement le dispositif. Pour le moment cependant, la musique est clairement d'obédience new-wave avec de fortes consonances cold agrémentée d'une guitare de fort belle tenue. Rapidement pourvu d'un deal, le groupe s'enferme au Rockfield Studio, Pays de Galles, pour enregistrer son premier album, un melting-pot passionnant d'influences diverses et variées.

Armé de sa Gretsch White Falcon, Billy balance la sauce avec maestria ; voilà le mec qui a introduit Johnny MARR à la guitare et encouragé MORRISSEY à chanter... Ouais, les SMITHS lui doivent sans doute beaucoup ! Le duo magique qu'il forme avec Ian va immédiatement donner toute sa mesure. Le son de Duffy et la voix d'Astbury sur des compos qui n'appartiennent qu'à eux, c'est toute l'essence du CULT.

D'ailleurs, le single qui lance une carrière haute en couleurs est « Spiritwalker », qui outre une rythmique déjà mature d'une qualité indéniable, propose un texte sur les esprits shamans qui passionnent tant Ian, suite à des années passées au Canada. Une petite merveille de new-wave, entre gothique et cold. Le second single « Go west » n'a sans doute pas les mêmes qualités, plus formaté pour le passage en radio, mais il n'est pas pour autant exempt de moments sympas.

Le morceau-titre « Dreamtime » a certaines similarités avec ce que pond BIG COUNTRY ou même U2 dans ces vertes années et ce titre reste encore aujourd'hui un classique de leurs sets. « Gimmick » est une chevauchée encore plus aboutie, avec une structure intense et serrée, un joli bridge et un lick de guitare qui entraîne l'auditeur sans difficultés, avec la voix, bien sûr, de Ian, si particulière et si véhémente, un trip réussi. On a même parfois l'impression d'entendre la guitare de Robert Smith des CURE comme sur l'intro de « 83rd Dream », dont on retiendra le joli chant modulé d'Ian.

« Horse Nation » évoque les grands espaces de la nation sioux, ainsi que la direction vers laquelle tend le groupe. Pour l'instant toutefois la basse garde la primauté du son sur les guitares, mais la composition n'est pas désagréable. Et puis, quand on aime les DOORS, on ne le revendique pas à moitié, ainsi « Rider in the Snow » se veut à la fois hommage déguisé et profession de foi sur l'avenir du groupe. Le refrain ne laisse pas planer le moindre doute sur leurs capacités à créer la fusion qui les mènera au sommet du stardom international.

Alors, certes, l'album n'est pas encore un chef-d'œuvre, mais pour une œuvre de jeunesse, il est révélateur des possibilités du CULT et des élans créatifs de ses deux leaders, qui deviendront rapidement indéboulonnables. Ian aux textes, Billy à la musique, une formule magique qui ne va pas tarder à faire un vrai ramdam dans les rues de Londres, puis dans le monde entier.