Magma existe depuis 1969. Si les groupes ayant une pareille longévité se comptent sur les doigts de la main, ceux qui peuvent prétendre avoir fait vivre leur musique aussi longtemps sont encore plus rares. La formation de Vander n’en est pas là par hasard. Elle a su se renouveler, se nourrir, grandir, se métamorphoser. Aujourd’hui, l’heure n’est pas aux grands discours. Depuis Ëmëhntëtt-Ré, le groupe se concentre sur un format EP, travaillant ses compositions dans les concerts. Il polie sa musique dans ses moindres détails et offre une attentions toute particulière à son écrin et à l’univers qui l’entoure. Aussi ce n’est plus un disque que l’on achète, mais une part inexploitée d’un monde que l’on a plus ou moins cartographié.

La dernière pièce de Magma, Slag Tanz (que l’on prononce « Shlag Tanz ») reste dans la lignée de son prédécesseur, Félicité Thösz. Pochette énigmatique au recto et verso identiques, vingt minutes au total.

Slag Tanz présente d’emblée une atmosphère anxiogène. Le fil rouge sera un thème répétitif agrémenté d’une basse lourde et en contretemps ainsi que de vibraphones. L’enchaînement des morceaux est parfaitement continu et plutôt véloce. A ce titre, l’écriture est d’une grande intelligence. La progression de la musique laisse paraître deux opposés qui d’abord s’alternent dans une lutte manichéenne et s’entremêlent ensuite dans un puissant crescendo.

Comme pour Félicité, Slag Tanz est connecté avec toute la discographie du groupe. A la fois dans le son (la basse, le chant, la batterie et les percussions) et dans la composition (rappels de Köhntarkösz ou d’Üdü Wüdü). Le Kobaïen laisse une belle place au Français et semble être son double maléfique, son versant démoniaque et destructeur.

Slag Tanz est donc direct, puissant, extrêmement bien écrit et exécuté. Il rend hommage au Magma puissant et rituel de 74-76 tout en ajoutant un délicieux soupçon de lyrisme. Slag Tanz, comme l’écrasante majorité des albums du groupe, restera comme une musique résolument moderne et intemporelle. Si, dans les cœurs, il pourra se tailler la part du lion avec Félicité Thösz, il en demeurera l’éternel et indispensable compagnon.