Laura BRANIGAN possède une voix merveilleuse, qui se marie à ravir avec les mélodies chaloupées, les ballades emplies de pathos et de larmes amères. Mais c'est clairement dans le domaine de la pop qu'elle est la plus connue ; et en 1990, derrière un titre éponyme et une pochette aussi belle, on aurait pu penser que la sublime brune allait nous faire le coup, très en vogue à l'époque, de l'album "retour aux sources", avec de la ballade par paquets et un peu d'unplugged. A vrai dire, pour une fois, ça n'aurait pas été déplaisant. Hélas, derrière des apparats romantiques, BRANIGAN cachait son jeu et cette cuvée 90 sera encore plus axée synth pop moderne et dansante que Touch. Et le résultat ne sera pas au rendez-vous.

La moitié des titres se montreront un peu faciles, racoleurs, bien dans le ton sexo-sensuo-bikini-SABRINA de cette fin de décennie huitante. Et ça ne lui va pas trop, à la grande Laura, même si elle reste classe en chantant "Sex On The Beach". Le cauchemar culmine avec "Turn The Beat Around", qui se veut émoustillant mais se montre simplement indigne de son talent -probablement sa pire chanson jusqu'ici. Et puis bon, les gémissements de 3615 Vulvatrix ça donne peut-être envie à certains, mais du PLEURAGE sur les strings synthétiques, il y a de quoi se transformer en Demi Moole.

Des "No Promise", "Reverse Psychology" ou "Smoke Screen" - plus proche de Pauline ESTHER que de Whitney HOUSTON - ne sont pas foncièrement nuls, mais très moyens et anecdotiques, avec des instrumentistes qui cachetonnent et/ou s'ennuient un peu. "Let Me In" aussi, qui ne sait pas où s'arrêter, et où la prod développe des pétatonnes d'énergie pour que Laura sonne à la fois urbaine, sexy et mystérieuse. Mais si on y réfléchit bien, Nicolas Sarkozy aussi, voulait être urbain, sexy et mystérieux. Guillaume Musso aussi. Jessica des "Marseillais à Brie-Comte-Robert" aussi. Ce n'est pas la BRANIGAN dont on est tombés amoureux fous dès la première chanson, et le côté africain n'est pas assez poussé pour réclamer l'indulgence.

Et pourtant, le ratage de ces titres n'est pas dû qu'à leur nature érotico-synthétique. Preuve en est que "Bad Attitude", malgré - ou grâce à - une prod un peu cheap, arrive à convaincre dans ce domaine. Laura y met du sien, et côté "forçage de badasserie", on a déjà connu pire. Ce n'est donc pas le gros son froid qui est en cause, mais bien la relative faiblesse des compos. Regardez "Unison" : moins réussie que la version de l'éternelle rivale Céline DION, sortie la même année, elle se montre aussi plus funky et tout à fait correcte, nonobstant un solo de hair metal shreddeux dont la gratuité me choque - ME choque, c'est dire le niveau.

Si la ballade de fin est un peu trop légère, "Never in a Million Years" arrivera cependant à monter le niveau et se montrer presque digne des grandes pages BRANIGANesques ; mais le titre le plus réussi reste le premier, "Moonlight on Water", qui est une tentative pure et dure de refaire un "Self Control", mais au moins se donne les moyens de son ambition et attrape l'auditeur dans ses filets. Pas mal du tout, mais Laura nous avait habitué à bien, bien mieux, et cet album éponyme est mal nommé puisqu'il semble finalement ne pas lui correspondre. Une déception, pour le coup.