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SIOUXSIE AND THE BANSHEES - Nocturne (1983)
Par RICHARD le 19 Janvier 2019          Consultée 2505 fois

En cette fin de septembre 1983, d'étranges créatures excentriques et bariolées, des nuées de sombres corbeaux également, investissent avec joie la fosse et les balcons du très prestigieux ROYAL ALBERT HALL de Londres pour deux soirées de feu et de glace. L'esprit punk s'invite dans ce cadre plus que cossu, et c'est encore une fois toute l'Angleterre atypique qui s'offre à nous pour notre plus grand plaisir ! C'est en effet ici que les fans pourront voir sur scène SIOUXSIE et ses fidèles harpies qui terminent leur tournée mondiale (Europe, Japon, Australie) dans leur ville natale. Que de chemin parcouru depuis les débuts du groupe en 1976 en pleine explosion punk ! Cinq albums majeurs sortis entre 1978 et 1982. Une recherche sonore permanente qui voit le groupe passer avec la même aisance du post-punk abrasif au psychédélisme barré, de la pop élégante à la noirceur des effluves gothiques. Un combo en tout point unique, malheureusement bien trop sous-estimé et ce n'est pas seulement que le très grand fan qui parle. On le considère un peu trop facilement comme une pâle copie des CURE dans le meilleur des cas, auteur de petits hits faciles alors que mené par Susan Ballion il est à l'évidence une entité essentielle de la musique anglaise populaire. Voilà, c'est dit, je vais mieux, mais c'est dit, quand même !

La petite tribu en cette année, c'est d'abord et toujours SIOUXSIE Sioux, maîtresse femme qui développe un univers ambigü de sensualité, de désir et de peur. Steven Severin, bassiste et principal compositeur, ainsi que Budgie, fabuleux batteur quasi "inventeur" des roulements tribaux qui marqueront tant les univers sombres demeurent également fidèles parmi les fidèles. Le guitariste quant à lui sur toutes ces dates depuis fin 1982 n'est ni plus ni moins, excusez du peu, que Robert Smith des CURE qui gravite depuis 1979 dans la galaxie des BANSHEES aussi bien comme remplaçant de luxe que compagnon d'excès en tout genre. Il a remplacé au pied levé le pourtant très talentueux écossais John McGeoch parti pour dépression et surmenage. Avec l'arrivée de Smith, les BANSHEES ont indéniablement gagné en visibilité et ils comptent bien en profiter, du moins en surface. En effet, même si Maîtresse Sioux et Fat Bob s'apprécient artistiquement parlant, les dissensions subsistent : pour rester poli, les deux ont à l'évidence une très forte personnalité.

Feu et glace, donc, comme les premières mesures du Sacre du Printemps de STRAVINSKI qui servent d'introduction au concert. La tension palpable durant ces deux minutes monte, monte encore et explose. C'est parti ! Les Londoniens soignent leur ouverture et proposent le single gothique "Israel" sorti en 1980. Il n'y a pas de meilleur exemple pour comprendre la magie des BANSHEES sur scène. Une voix puissante, une basse liquide mise très en avant, une guitare économe dans ses sons mais essentielle et une batterie tribale. Voilà, le tour est joué, les règles sont énoncées, la cérémonie peut continuer. Le groupe a trop souvent été réduit à une caricature gothique avec à sa tête une prêtresse sado maso. Bon, c'est vrai, ce n'est pas ce live et cette introduction qui vont atténuer cette sensation. Ceci est d'autant plus facile à vérifier que le concert avait été filmé pour sortir en VHS (désolé, pour les lecteurs de moins de quarante ans). Tout est noir, tendu et c'est bien la magnétique SIOUXSIE qui capte encore une fois la majeure partie de l'attention.

Nocturne délivre un set ultra puissant, s'appuyant principalement sur les deux derniers albums (Juju et A Kiss In The Dream House). Du premier, considéré à tort ou à raison comme l'une des galettes fondatrices du mouvement gothique, on retiendra cette beauté crépusculaire nourrie par de sourdes tensions. C'est une forme de transe à laquelle les BANSHEES nous convient. De l’enivrant "Spellbound", où Budgie donne littéralement tout, à l'anxiogène "Voodoo Dolly" où SIOUXSIE captive par la force de sa voix, on en ressort quelque peu abasourdis. Ça tombe bien, du second album, déborde alors une sensualité à la fois attractive et malsaine. Comme une forme de pause avant de reprendre les hostilités. Du sexuel "Melt" au crispant et pourtant grisant "Slowdive", le groupe propose un monde étrange, parfois inconfortable mais toujours particulièrement inventif et stimulant.

Et entre ces deux univers, il y a toute la force créatrice des Anglais qui se libère. Des incantations païennes et oppressantes qui s'élèvent vers le dôme de la salle (le superbe "Switch") au rock froid qui tend le dos (le classique "Paradise Place"), le groupe imprègne de mille et une couleurs l'espace. Heureux d'être en retrait, Smith parvient facilement à trouver ses marques. Par son jeu en apparence simple, il permet aux trois autres membres d'évoluer à leur aise. C'est particulièrement criant sur "Dear Prudence", la reprise des BEATLES, ou sur le définitif "Pulled To Bits" où le petit Robert s'amuse comme un petit fou avec sa guitare acoustique. Sur scène, c'est certain, l'entente est plus que cordiale, ce qui permet au groupe de déployer toute sa sombre énergie.

L'utilité et la nécessité d'un album live ne sont pas toujours évidentes. Nocturne fait partie de ces essentiels puisqu'il nous offre deux ténébreuses nuits londoniennes particulièrement fortes et attractives.

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   RICHARD

 
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- Siouxsie Sioux (chant,guitare)
- Robert Smith (guitare)
- Steven Severin (basse)
- Budgie (batterie)


1. Israel
2. Dear Prudence
3. Paradise Place
4. Melt !
5. Cascade
6. Pulled To Bits
7. Night Shift
8. Sin In My Heart
9. Slowdive
10. Painted Bird
11. Happy House
12. Switch
13. Spellbound
14. Helter Skelter
15. Eve White/eve Black
16. Voodoo Dolly



             



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