Art MENGO aurait pu être une superstar de la chanson. Aurait pu. Mais ne l'a pas été. Il est resté dans une certaine confidentialité. Pour son portefeuille, ce n'est pas le pied, mais pour les amateurs de sa musique, au moins le bonhomme ne s'est-il jamais compromis. Et je pense que cette image d'incorruptible a été définitivement cimentée lors de la sortie de ce live. Pas de Zénith, pas de Bercy, même pas d'Olympia, mais un petit bar caf-conc' de Toulouse. Désormais renommé le Taquin, le Mandala faisait partie de ces toutes petites salles où l'on se trouve à quelques mètres, parfois centimètres des musiciens, et c'est bel et bien cette proximité, cette chaleur humaine que l'on ressent ici.

Live au Mandala est un live très sympathique. Déjà, parce qu'il est live. Ensuite, parce qu'il est sympathique. Lapalisse nous voilà : live, donc joué en direct malgré le fait qu'à l'époque, Art MENGO n'ait que 3 albums à son actif, mais 3 parmi ses plus minutieusement produits. Or, dans le domaine du réarrangement, MENGO se débrouille plus que bien. Nombre de titres se voient transfigurés : "Gino" avec sa guitare wahwah et son solo de trompette, "Les parfums de sa vie" transformé en chacha menaçant, "Magdeleine" surtout dont le riff de guitare iconique est doublé à la flûte traversière pour un résultat enthousiasmant. Sympathique ensuite car outre l'ambiance feutrée, bon enfant (on regrettera un public trop souvent poli), Art se permet une tracklist franchement bonne, voire étonnante.

"L'amour codé" ! Jouée au piano Yamaha CP, avec l'intégralité des harmonies d'origine, voilà une chanson qui retrouve une nouvelle importance. "Pendant que je cherchais" ! Si on regrette que la seconde partie ne soit pas assez bourrine (parfois le bourrin, c'est bien), la première est sublimée avec du groove, un côté rock qui lui sied à merveille. "La bure" ! Incroyable qu'il ait tenté cette chanson, qui perd son côté mystérieux et solennel, mais gagne en polissonnerie grâce à l'apport malin de blue notes. Notre chanteur serait-il finalement retourné dans ce couvent le temps d'une après-midi crapuleuse ?

"Nous nous désaimerons" en mode plus jazzy, avec une guitare plus sombre, "Ma tombe" dont le tempo augmenté renforce le caractère ironique, le tubesque "Je suis incendie" où la guitare fluidifie les accords : globalement, notre homme modifie considérablement ses chansons, et c'est d'ailleurs là que le live prend tout son sens, les chansons les moins convaincantes étant les plus fidèles aux originales. On finit (de façon un peu abrupte, ça manque de dialogue avec le public) sur le single-only "Parler d'amour", bien rendu et qui fait une fin tout à fait honorable. Moi qui n'aimais pas trop ce single en duo avec Ute LEMPER, le voilà ici réhabilité : c'est la preuve que ce concert était réussi !

Il y a des live qu'on adore parce qu'ils sont grandiloquents et putassiers (rhââââ oui des lasers et des flammes, encore, ouiiii !), et il y a ceux qu'on aime parce qu'ils nous placent au plus proche de l'artiste en tant qu'être humain. Mandala fait indubitablement partie de ces derniers, avec un musicien concerné, qui fait honneur à son répertoire tout en jouant avec, et met en valeur d'excellents musiciens (mention spéciale au pluridisciplinaire Jo Maonda qui a plus d'une fois l'occasion de briller). Que ce live soit arrivé si vite dans sa carrière est un plus, mettant un point final à un premier chapitre absolument passionnant. Ce n'est pas un "grand" live, mais il est une pierre angulaire de la discographie de son auteur, et franchement, tous les live ne peuvent pas en dire autant.

Note finale : 3,5/5