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BALDOCASTER - Visions (2021)
Par CHIPSTOUILLE le 19 Avril 2022          Consultée 869 fois

4/5 pour une nouveauté de BALDOCASTER ? Déjà-vu, comme dirait Keanu Reeves. Je vous rassure, vous n’êtes pas coincés dans la matrice. Certains lecteurs ne se sont probablement pas donné la peine de cliquer. Je sais que BALDOCASTER n’invente pas grand-chose. Pourtant, l’envie de réécouter ce Visions encore et encore s’est faite irrésistible depuis sa découverte. Bien plus que les quelques influences, évidentes, que l’on m’a pointées du doigt à propos de l’artiste.

Pour correctement évaluer cet album sorti avant War Rig mais composé bien après, il m’aurait fallu décortiquer les discographies pléthoriques de tous les ténors de la musique électronique qui l’ont influencé. Mais l’heure tourne. Passé le mois de Mai 2022, l’échéance généreuse que nous nous octroyons afin de considérer des sorties comme des 'nouveautés' arrivera à son terme. Un an, souvent moins si l’on ne scrute pas toutes les sorties, reste trop peu de temps pour parcourir tous ces détails. Aveu personnel de méconnaissance du sujet ? Sans doute, oui. Ça ne sera pas la première ni la dernière fois que je m’aventure en territoires méconnus sur ce site. Mais il y a un équilibre subtil à doser entre connaissance du contexte d’une œuvre et excitation provoquée par sa découverte. Sans quoi toutes les chroniques pourraient manquer leur but. Soit par excès de cynisme à force d’être blasé, soit par excès de dithyrambes qui ne seraient partagées que par ceux au fait du sujet traité. Or, soyons honnête, cet album ne fera plaisir ni aux blasés, ni aux premiers venus.

Reprécisons donc que BALDOCASTER est très influencé par TANGERINE DREAM. Sur Visions, troisième album de sa composition, on entend également du Jean-Michel JARRE. Les amateurs du Français devraient retrouver ici un peu du trip planant d’Oxygène et des mélodies plus terre-à-terre d’Equinoxe. Mike OLDFIELD est également de la partie. La mélodie d’"Outcome" par exemple, toute instrumentale qu’elle est, pourrait rappeler celles de "Five Miles Out" ou "Foreign Affair". Ou tout du moins, c’est ce qu’il ressort de quelques pérégrinations sur la toile à son propos.

Aurais-je d’ailleurs eu un avis totalement différent si j’avais eu le temps d’explorer ces influences ? Que trouvons-nous de plus ou de moins dans une œuvre lorsqu’on en explore les rouages ? N’est-il pas nécessaire en premier lieu de l’apprécier (ou tout du moins espérer de) pour fournir cet effort supplémentaire ? Bon nombre d’albums possèdent des lectures alternatives, des messages ambigus, des intentions déguisées. Quelques-unes de mes œuvres favorites dévoilent encore des traits dont je ne les soupçonnais pas au bout de centaines d’écoutes et dizaines d’années. Or, ces chefs d’œuvres n’ont pas changé. J’ai récemment découvert de (trop) subtiles variations dans le Human After All de DAFT PUNK. Des variations que j’étais incapable d’entendre à sa sortie. La seule chose qui a changé entre temps, ce sont mes connaissances en musique, ma façon de percevoir les sons, ma perception de tout ceci. Human After All m’horripile toujours au plus haut point. Mais je suis désormais capable de percevoir quelques qualités que certains auraient pu lui trouver. La connaissance a posteriori n’altère que très rarement l’appréciation.

Certains fans de musique électronique vintage (à défaut de pouvoir la qualifier autrement…) n’ont donc en ces lieux virtuels, pas hésité à ranger BALDOCASTER dans la catégorie des médiocres. Depuis, je ne suis que perplexité. Alors à quoi bon insister ? Des 4/5 en nouveauté sur Forces Parallèles, ce n’est pas ce qui manque. Ce n’est pas comme si une note allait vous convaincre. La question n’est pas de savoir si cet album est bon. Il l’est, je persiste et je signe. La question est de savoir à qui celui-ci peut donc s’adresser.

Soyons factuels. BALDOCASTER est non seulement mélodique, mais très polyphonique. Arpèges, nappes riches et chromatismes viennent en effet régulièrement soutenir des mélodies très réussies. Du point de vue sonore, si l’on peut déplorer quelques rares éléments trop synthétiques, le tout conserve néanmoins une fluidité très organique, très nostalgique de cette vague propre aux années 70. Point d’imitations de cordes pincées, grattées, frottées ou frappées ici à déplorer. Tout ici est synthétique certes, mais BALDOCASTER embrasse pleinement ces sonorités pour les employer à des fins précises d’altérité. Sur la question de l’humain aux commandes de la machine, on pourra peut-être adresser plus de reproches. Mais même sur une console NES aux capacités bien limitées sur la question, on trouvait des artistes comme Tim FOLLIN capables de rendre incarnée la plus synthétique des musiques: cf. "BGM 1" du piètre Silver Surfer. Dans mes oreilles, tout synthétique qu’il est, BALDOCASTER s’apparente donc plus à Tim FOLLIN qu’à l’incompétent Paul WILKINSON (cf. l’exécrable OST de The Terminator). En outre, comparée à celle de ses influences, la production de BALDOCASTER s’est enrichie entre temps de bien des subtilités modernes, que ce soit en matière de saturations diverses, richesse des tessitures ou complexité et puissance de la section rythmique. On pourrait d’ailleurs la comparer à la frappe 'lourde' de Simon Philips chez Mike OLDFIELD, bien qu'elle soit assurée par une boîte à rythme.

BALDOCASTER ne s’adresse donc pas aux fans de TANGERINE DREAM, Mike OLDFIELD ou Jean-Michel JARRE, qui ne trouveront là qu’un échantillon moderne, peut-être trop limité en matière d’invention sonore à leur goût, de ce qu’ils ont déjà parcouru de long en large.

Visions, bien au-delà de sa technique et de ses influences, nous fait premièrement voyager. Si War Rig arpentait des déserts inexplorés, cet album en serait, en majeure partie, le pendant originel, prélude à l’accostage de la moindre planète. Les rares sur lesquelles nous poserions le pied auraient alors tout du voyage vers l’inconnu.

BALDOCASTER doit donc également être rapproché de quelques-uns de ses contemporains sur la question. La classification Synthwave m’oblige à citer de nouveau WAVESHAPER que l’on retrouvera là par bien des aspects colorés et synthétiques. Mentionnons également Siddhartha BARNHOORN et la bande-son de Out There, jeu-vidéo qui bien que modeste parvenait à toucher du doigt l’aliénation propre à l’exploration sans limite des infinis de l’univers. Arnaud ROY, également connu sous le nom de FLYBYNO, auteur de la B.O de Endless Space, pourrait s’approcher des qualités ici restituées. Mais parlons surtout de Sam HULICK, compositeur de "Uncharted Worlds", titre inoubliable de la trilogie de jeux Mass Effect. Bien plus que de copier ses aînés, BALDOCASTER semble être parvenu à capturer cette magie exploratoire afin d’en proposer moultes déclinaisons sur l’intégralité de son album.

Visions se rapproche donc de cet imaginaire fait de contrées spatiales, rendu de plus en plus palpable par quelques expériences interactives encore relativement récentes, lesquelles étaient sublimées par la simple magie du son. Pourtant, chacune des B.O précitées se heurte hors-jeu à de longues séquences contemplatives, souvent trop vides pour prolonger le plaisir une fois hors-de-portée de notre écran. C’est là que BALDOCASTER réussit son pari. Il parle le même langage sonore, mais ne s’éternise jamais dans son discours. Ce qui est somme toute logique, car le but n’est pas le même. Il n’est ici pas question d’habiller de longues sessions de jeu pouvant s’étaler sur des centaines d’heures. Le potentiel en durée de vie de Endless Space ou Out There étant en effet véritablement vertigineux. BALDOCASTER, tout au contraire, concentre son propos au maximum. S’il emprunte donc à ses influences quelques outils pour parvenir à cette finalité, c’est avant tout la sélection judicieuse des éléments pris dans les bibliothèques foisonnantes d'autres explorateurs, ceux de la musique électronique, qui lui a permis d’aboutir à ce résultat.

Visions est donc une passerelle entre la synthwave et les jeux-vidéo spatiaux modernes d’une part, et la musique électronique ancienne de l’autre. Je m’emploie à l’emprunter, nul doute que comme toute passerelle entre deux univers, elle peut être parcourue dans les deux sens.

En d’autres termes, lancez Visions, fermez les yeux et imaginez une carte céleste holographique s’étalant devant vous. Puis naviguez, découvrez les réseaux de planètes entourant ces millions d’étoiles, les relais cosmodésiques qui permettent de les relier, les entrées encyclopédiques décrivant les compositions de chacune, les probabilités de vie locale, les conditions atmosphériques, les sondes minières à lancer, les possibilités de terraformation, les us et coutumes des formes extra-terrestres amicales les peuplant ou, tout au contraire, les menaces que celles-ci pourraient représenter. Peut-être qu’à ce moment précis, la majesté grandiloquente de "Fury", sommet de cet album, se prendra moins les pieds dans les lignes de claviers péremptoires qui la balafrent en son milieu.

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- David Paul Hill


1. State Of Balance
2. Visions
3. Fury
4. The Pines
5. Moter
6. The Great Divide
7. Night Falls (feat Traveler Cs)
8. Canyons (part Ii)
9. Hunting Grounds
10. Sunrise, Sunset
11. Outcome (feat. Traveler Cs)
12. Canyons (part Ii) [steve Moore Remix]



             



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