À l’occasion de ce cinquième album, CERRONE délaisse complètement les studios Trident au profit des studios Cherokee de Hollywood en Californie – Don’t Give A Damn (1979), le second album de REVELACIÓN, y avait déjà été en partie enregistré. Angelina voit également la participation de nombreux musiciens de session de premier choix, et surtout de Steve Lukather et David Hungate, respectivement chanteur-guitariste et bassiste du groupe de rock américain TOTO. Leur participation octroie une saveur rock à l’ensemble, tout du moins aux deux premiers morceaux, plus encore que sur la première face de The Golden Touch (1978). Les cordes sont déboutées pour de bon et les synthétiseurs réduits à la portion congrue, ce qui, avec les guitares particulièrement abondantes, procure une certaine sécheresse sonore à cet album (que l’on retrouve également chez MAX BERLIN, le frère de CERRONE), ce qui confirme la direction amorcée avec Don’t Give A Damn.

"Rock Me" débute l’album avec un parti-pris assez radical : si la rythmique est toujours caractéristique du Disco et empreinte du style de CERRONE, les guitares dominent largement le propos, balayant toute trace de funk et de soul. La chanson-titre qui lui succède voit le retour timoré des cuivres et du piano électrique. CERRONE y ose une composition à la croisée des chemins, arborant des caractéristiques rock, reggae (cet orgue Hammond!) et soul. Sur ces deux premiers morceaux, Georges RODI ne se manifeste qu’avec des nappes électroniques occasionnelles. Tout comme sur The Golden Touch, les guitares et le style rock qui leur est corollaire se font nettement plus discrètes? passé le deuxième morceau, et le reste est plus typique de ce que l’on peut attendre de CERRONE. "Call Me Tonight" est une ballade qui ressemble beaucoup à "Look For Love", les suites d’accords des refrains respectifs étant identiques. Les développements sauvent le morceau de la redite pure et simple, mais restent nettement moins intéressants que ceux de "Living On Love".

Cet album est également atypique par les répartitions du chant : Michelle Aller et CERRONE lui-même s’arrogent le chant lead, Kay Garner, au timbre si particulier, étant reléguée parmi les choristes. Ce changement de rôles apporte une présence vocale différente, qui participe à la singularité de cet album, bien que CERRONE ne soit pas toujours très assuré derrière le micro. Enfin, à l’exception de "Rock Me", nous avons droit à de belles envolées de cuivres, en particulier sur "Not Too Shabby" et "Living On Love" qui bénéficient clairement de la lancée de l’excellent "Rocket In The Pocket" (The Golden Touch, 1978).

Angelina conclut l’âge d’or de CERRONE. Pas tellement en terme de qualité, de belles choses étant encore à venir dans les années ultérieures. Mais un coup du sort va forcer CERRONE à revenir en France. L’un de ses propres collaborateurs, au sein de l’équipe de Malligator, faisait presser en surnombre l’album The Golden Touch pour en vendre certains exemplaires de manière officieuse et garder une partie des bénéfices pour lui seul. Un imbroglio qui n’en fait qu’appeler d’autres à l’orée d’une décennie 1980 qui s’annonce difficile.