« Si c’est ça le Québec moderne
Moi je mets mon drapeau en berne
Et j’emmerde les bouffons qui nous gouvernent ».

C’est par ces mots que les COWBOYS FRINGANTS nous accueillent dans leur quatrième album, Break Syndical. Critique virulente de la société québécoise moderne, ‘En berne’ débute l’album de manière plutôt fracassante. Inégalités sociales, mépris des questions environnementales, bon nombre des griefs formulés par les COWBOYS sont valables pour la majorité des pays industrialisés et permettent à nous autres, maudits Français, de se retrouver dans les paroles d’un J-F PAUZE plus mordant que jamais.

Mais bien vite, la facette joviale des COWBOYS reprend le dessus. Croquant de façon tantôt hilarante, tantôt touchante, les épisodes anecdotiques de la vie quotidienne, les COWBOYS nous prennent par la main et nous emmènent dans leur univers bigarré, cette fois bien plus maîtrisé que sur Motel Capri, déjà annonciateur du succès futur des Québécois. La manifestation, la noce, racontent sur des airs joyeux ces épisodes tournant bien souvent au grand n’importe quoi. Musicalement plus abouti que les albums le précédant, Break Syndical voit le violon de MARIE-ANNICK LEPINE, plus présent et inspiré que jamais, se marier à merveille avec la guitare dansante de J-F PAUZE, au service de compositions en apparence légères, mais qui renferment souvent une portée sociale non dénué de sens.

Les morceaux s’enchaînent (quatorze au total) et peu à peu se révèlent les grandes réussites de cet album. Le très folk Toune d’automne, petite saga familiale sous couvert d’exode rural, Heavy Metal, tout en syncopes, se moquant gentiment de l’époque des cheveux longs et des t-shirts Foreigner et Cinderalla, ou encore le plus sombre L’Hiver approche, évoquant la vie quotidienne et enneigée de banlieusards montréalais. Agrémenté de petits intermèdes musicaux (Break Syndical) ou non (Quand je r’garde qui voit MARIE-ANNICK LEPINE prendre le micro), ce quatrième album des COWBOYS ne propose que quelques morceaux anecdotiques (La tête à Papineau, Salut mon Ron), pour une flopée de réussites incontestables.

Break Syndical possède sans doute la fin d’album la plus remarquable des COWBOYS, laissant dans la bouche un goût de trop peu, et ce malgré les 50 minutes de musique proposée ici. La ballade Mon chum Rémi, sorte de version québécoise du Manu de Renaud, se révèle être un des plus beau morceaux de cet album, alors que Joyeux Calvaire, très enjoué, possède sans doute la partie de violon la plus marquante de miss LEPINE. Biographie réaliste d’une trentenaire souffrant de déboires amoureux à répétition, Joyeux Calvaire est l’avatar de ces cinq COWBOYS sur le sentier la gloire ! Se clôturant sur Ruelle Laurier, titre émotionnellement très fort, narration poétique et tristement magnifique d’un parricide, Break Syndical s’établit bien vite comme le premier album indispensable des COWBOYS FRINGANTS. Et si les albums suivants verront l’inspiration des Québécois monter encore d’un cran, ils ne seront pas dotés de ce petit grain de folie qui fait de Break Syndical un album définitivement à part.