Franchement, sincèrement, existe-t-il aujourd'hui au Québec ou même dans l'ensemble de la Francophonie un groupe plus enthousiasmant que les COWBOYS FRINGANTS ? Oui, sans aucun doute, diront les fans des BB Brunes. Allez, reconnaissons objectivement l'apport phénoménal du groupe dans une scène folk-rock enrichie par les nombreux albums de qualité publiés par le quintette. Le groupe, engagé dans la défense de l'environnement et toujours prêt à proposer des solutions alternatives à celles, inappropriées, imposées par les cols blancs de la Belle Province, aurait pu gagner en sérieux et en inaccessibilité. Ce serait mal connaître la personnalité par nature débonnaire et espiègle des COWBOYS qui, au faîte de leur gloire au Québec, décident de rendre hommage à leur passé en donnant une série de concerts entièrement consacrés aux morceaux écrits « lors de ces années où le groupe n'annonçait pas la fin du monde dans ses chansons et où les mots gouvernement et néo-libéralisme n'avaient pas encore contaminé leurs ritournelles ». Les Insuccès, puisque c'est le nom donné à ce périlleux exercice, feront l'objet d'un enregistrement live au National de Québec en 2006, et se verra distribué gratuitement sur le site Internet des COWBOYS.

Si vous ne supportez pas l'humour pataud des jeunes débutants et les approximations, alors la vingtaine d' « Insuccès » ici présentés vous horripileront au plus haut point. Si l'on retrouve ici certains morceaux « endisqués » sur la première cassette du groupe (« Les routes du bonheur », « Plattsburgh », « Evangeline », etc), nombre de titres présentés n'ont jamais fait l'objet d'un enregistrement, et constituent des œuvres de jeunesse que l'on prend grand plaisir à découvrir. Le groupe a pratiqué un minimum, et s'y reprend à plusieurs fois avant de parvenir à interpréter correctement certaines d'entre elles, dont la désopilante « Le reel de la patate pilée » qui doit être recommencée quatre fois avant que le chanteur Karl Tremblay ne finisse par se souvenir des paroles. Un grand moment d'espièglerie et de bonheur pur comme le groupe sait en distiller. Les bons moments sont d'ailleurs très nombreux, entre « Voir du pays », sorte de « Ballade des gens heureux » à la sauce québécoise, la countrysante et sans queue ni tête « Les bons légumes », ou encore le petit plaisir final « Repentigny-by-the-sea » qui résume à lui seul tout le talent des COWBOYS.

Ces insuccès, qu'ils soient ersatz de morceaux jamais aboutis (« Tendresse / Paul »), ou petites perles qui auraient mérité leur place sur un album studio du groupe (« Voir du pays »), en apprennent beaucoup sur les différentes étapes par lesquelles le groupe est passé pour faire mûrir et grandir son folk engagé, ainsi que sur l'apport inestimable du batteur Dominique Lebeau, qui quittera le groupe l'année suivante pour se lancer dans une carrière solo. Ce dernier se taille en effet la part du lion sur ce live, conversant inlassablement avec un public entièrement acquis à la cause du groupe.

Bien entendu, l'ensemble est bancal et fleure bon l'amateurisme assumé, mais malgré tout, le talent transpire par tous les pores, même par ce « Cass de pouëlle » sibérien et ridiculement savoureux. Les ingrédients de Break Syndical et La Grand-Messe sont déjà là, et bien présents, dans ces compositions qui séduisent par leur naïveté assumée et l'investissement total des membres du groupe. Une petite curiosité, essentielle pour les amateurs des COWBOYS.