Ce premier album de Dionysos est passé assez inaperçu à sa sortie en 1996, malgré le bouche à oreille qui s'est fait petit à petit dans la région de Valence suite aux prestations scéniques déjà très appréciées du groupe... Quand on voit la pochette d' "Happening Songs", on ne sait pas vraiment à quoi s'attendre : une écriture un peu "orientale" sur la façade, des statuettes étranges reposant dans une herbe ressemblant fortement à des épines de sapin de Noël, le tout avec quelques effets de miroir histoire de rendre la chose encore plus absurde...

Cette galette est une auto prod et on l'entend un peu, le son est légèrement sale de temps en temps, mais on s'habitue, on y prend goût, vraiment... Il est composé de morceaux très typés rock, des morceaux qui, par ailleurs, suivront le groupe encore longtemps en concert ("Wet", "Can I?", "New eye Blues"), et des petites ballades folk un petit peu dénaturées, sauvages, authentiques ("Polar Girl", "Everything", "Still Bleeding", "Sceamin' like an egg", "sad smiling f---"). L'album, entièrement écrit en anglais, est doté de paroles très étranges, parfois magiques, parfois violentes, parfois absurdes ; mais d'une poésie certaine. Quelques exemple :
"I can make love to the trees, make love to the birds,
Make love to them ONE BY ONE."
ou encore :
"An empty chair, an empty chair gives me a smiling fuck
Now the show began and I shot all my friends"

Les mélodies sont particulièrement démoniaques. On peut y trouver des sons de toute sorte, notamment une petite berceuse ou perceuse qui se balade, des ronflements, des magnétos endiablés, des rires, des sifflements étranges... Tout cela rajouté à la qualité de l'enregistrement artisanal, parfois du bourdonnement, de la saturation, du grésillement... Tout cela donne un objet bien typé et ne gâche en rien le plaisir de l'écoute, au contraire, un son "propre" sur un album aussi déjanté aurait paru quelque peu anormal. Toute une ambiance est alors créée entre compositions et enregistrement. L'utilisation fréquente de saturation sur la voix de Mathias est parfois un peu dérangeante pour la compréhension des paroles, mis à part son accent très original.

Cet objet est alors un objet rare et puissant du rock français, doté d'un univers très particulier, réunissant généreusement des paroles, des mélodies, des accents complètement décalés. Les premiers pas de Dionysos, en opus fait à la main et d'origine contrôlée, sont plutôt réussis, mais sont restés trop inaperçus... Peut-être trop artisanal ?