Après la tournée européenne de 1983, les frères Young décident de produire eux-mêmes leur disque suivant. Mettre Mutt Lange entre parenthèses, c'est évidemment vouloir revenir à un son plus brut, à la crudité des seventies.

L'analyse des décibels crachés par les enceintes ne soulève pas l'enthousiasme pour autant. Difficile d'affirmer qu'on s'éloigne du précédent, ni qu'on est proche d'un Dirty Deeds ou Let There Be Rock. Les riffs sont similaires, bien plus inoffensifs qu'autrefois, le chant de Johnson rigoureusement le même commence à lasser, les refrains sont tous scandés en chœur, comme un mécanisme destiné à endormir. Aucune accroche, aucun break, petite syncope pour nous sortir de la torpeur.

On le sait, l'exercice est extrêmement difficile : séduire les foules avec les mêmes accords de blues, les mêmes plans, le même son. Une magie qui peut fonctionner si les morceaux sont écrits au millimètre, avec un chanteur au feeling aiguisé, et des gimmicks malins pour faire tenir la machine sur 3 ou 4 minutes. Hélas, leurs meilleurs plans ont tous été écrits ou presque. Les tonnes de dollars qui leur sont tombés dessus après Back In Black n'ont pas dû aider, et c'est avec peine que l'on essaie de s'exciter sur l'intro de "Landslide" (le morceau tient la route, malgré les éternels chœurs en refrain qui fatiguent), ou de taper du pied sur "Deep in the Hole", assez réussi (le riff est plus original, et pour une fois Johnson assure le refrain quasiment seul, franchement ça fait du bien). Idem pour "Brain Shake" qui se distingue un peu par son riff initial, mais pâtit encore une fois d'un refrain totalement transparent.

Le disque n'est pas honteux. Les 3 morceaux cités plus haut se laissent écouter, mais ne sont au final que de pâles copies de ce qu'ils ont fait auparavant. La banalité règne en maître.

On peut aisément imaginer que si cet album n'existait pas, cela ne changerait rien à la vie de nos oreilles, un peu comme For Those About to Rock, sauf qu'ici pas un seul morceau ne surnage.