Je vais vous faire une confidence. Malgré l'annonce d'un nouveau single pour le moins enchanteur ("Entendez-Vous"), lorsque j'ai appris que Cécile CORBEL avait signé un contrat avec Sony/Universal via Polydor, j'ai eu peur. Ce n'est pas pour faire du 'major bashing', l'éternel sceptique face aux fournées des grosses maisons de disques, néanmoins beaucoup d'artistes intègres se sont quelque peu brûlé les ailes lorsqu'ils ont adopté la même démarche. Mais Cécile CORBEL est une fée, ses ailes sont d'une autre matière. Elle ne fait ici qu'étendre la portée de sa baguette magique.

On le connait bien depuis une dizaine d'années, cet univers enchanteur, tissé par la harpe de la jeune Bretonne, effleuré par sa voix au timbre caressant et acidulé, cristallin. Logiquement, on le retrouve ici, de même que les éléments qui font son empreinte musicale : mélodies celtiques et, depuis l'expérience Arrietty, teintées d'influences est-asiatiques subtiles, clavecin et cordes baroques, percussions en tous genres, groupe pop avec une rythmique basse-batterie en soutien occasionnel. Les textes puisent dans l'enfance et les légendes, en conservant une légèreté qui les dissocie des premiers albums de Cécile CORBEL, plus sombres par moments, et dans des langues diverses.

Le plus remarquable avec ce nouveau disque, c'est que malgré l'événement d'un passage à une plus grande visibilité, l'artiste reste elle-même, aidée par ses collaborateurs fidèles, Simon Caby, Cyrille Bonneau. Il n'y a pas le libellé Songbook, mais c'est tout comme. À part quelques arrangements vocaux plus importants comme le choeur du morceau-titre, "La Fiancée", et quelques effets sonores inédits, il n'y a pas de réel changement. L'ensemble est moins intimiste que Roses, le disque précédent, et moins acoustique que Renaissance (2011), mais la qualité y est toute aussi présente. C'est du deuxième album que La Fiancée(fi] se rapproche le plus, on trouve même un instrumental appelé "Route de la Soie".

Toujours avec poésie et délicatesse, Cécile CORBEL puise dans la chanson de la Renaissance et les déclarations courtoises ("La lettre"), la nature ("Entendez-vous"), fait des clins d'oeil indirects à MALICORNE et distille influences celtiques ou orientales à l'envi. On peut déceler en "Jardin Secret" -inspirée par Alice au Pays des Merveilles- une tentative de single pop-folk au tempo élancé, chose unique parmi les douze morceaux proposés, sans dénaturer pour autant. Proposé en avant-première, "Emmène-Moi", est porté par un refrain libérateur, une invitation au rêve. Les mots sont simples, des images contées avec autant de spontanéité que d'innocence. Le livre-objet qui recouvre l'album est, à lui seul, un bonheur pour les mirettes.

La Fiancée, c'est une petite fille qui chante et joue à la marelle sur un nuage ou sous la neige, qui pense à son amoureux en se promenant au bord du Miroir aux Fées en Brocéliande, qui rêve éveillée et désire partir à l'aventure. Elle peut sans crainte venir toucher davantage le coeur de ses semblables, celles qui ouvrent grand leurs yeux plein d'étoiles devant Arrietty et Raiponce, sans oublier les soeurs aînées. Princesses endormies ou non, une nouvelle fois, celles-ci n'ont pas forcément moins de treize ans, souhaitons-le pour longtemps encore ! De même que le talent de mademoiselle CORBEL, à travers des chansons aussi belles que "La fille du miroir", "Breathing You" à l'introduction inspirée de CLANNAD, et toutes celles déjà citées, et les autres. Un peu d'enchantement et de douceur dans ce monde 'réatriste'.