C’est le dernier album de l'auteur témoin de son époque que fut Daniel BALAVOINE. Et c’est un album fort, qui traite, entre autres choses, de sujets de l’actualité de l’époque et reste encore très actuel aujourd’hui.

On ressent encore sur cet album, comme sur le précédent, une grande recherche des sonorités (programmation Fairlight). C’est parfois très réussi, comme sur "Tous les cris les SOS", et parfois moins, comme sur "Ne parle pas de malheur", qui donne une tonalité trop artificielle, d’une forte modernité mais qui ne sied pas à BALAVOINE, pas à ce point en tout cas. Sur ce morceau, il n’y a guère que le pont musical au saxophone qui ait un petit intérêt. C'est pourquoi, cet album ne mérite pas pour moi d'être considéré comme son meilleur album, après l'excellent Loin des yeux de l'Occident.

Les mélodies sont toujours très soignées, "Aimer est plus fort que d’être aimé" a eu son succès, à juste titre, mais l’orchestration donne un effet un peu trop superficiel et on peut en dire autant de "Sauver l’amour" avec, à mon sens, des chœurs féminins plutôt malheureux.

En revanche, "Tous les cris les SOS" est une merveille. Là, les effets sonores donnent une profondeur à la mélodie et à des mots d’une poésie sans commune mesure. Il faut revenir à l’original, à une époque où la médiatisation galvaude et variétise des musiques initialement sublimes.

Les premières notes de "L’Aziza" (écrite pour sa femme juive-marocaine) évoquent immédiatement les images du clip, à savoir un soleil qui se lève (sur Paris en l’occurrence) et nous emmène à Casa. Hit reconnu de l’opinion public et aussi des associations contre le racisme. Mais BALAVOINE n’aimait pas l’expression 'contre', il préférait se dire 'pour' les échanges interculturels.

"Petit homme mort au combat" est comme une marche, celle des enfants embrigadés par des islamistes fanatiques, des fous de dieu. Son rythme est presque guerrier. La mélodie est directe, les paroles aussi, pas de fioriture, tout est clair et lisible, pas besoin d’explication de texte pour comprendre l’idée.

BALAVOINE nous a réservé le meilleur pour la fin A partir d'une intro extraite d’une chanson d’Yves SIMON, "L’enfant assis attend la pluie" est une merveille en terme de poésie (bourrée d’exercices de style qui donnent une musicalité au texte), et en terme d’atmosphère musicale. Les sonorités sont orientales dans l’intro, la voix et les synthés aériens. La musique comme les mots décrivent un enfant dont les yeux s’ouvrent sur un monde aride qui s’éveille sur la misère puis se meurt quand le soleil se couche sans que la pluie ne vienne soulager son malheur. Un superbe solo de guitare sèche, aussi sèche que cette Afrique dépeinte ici, vient agrémenter le tout. Et à la fin de cet album, il nous reste comme une image rémanente de cet enfant qui pourrait être le symbole de la lutte de Daniel pour faire refleurir ce continent meurtri.

Et ce sera, hélas, le dernier cri qu’il poussera avant de trouver la mort quelques semaines plus tard dans les dunes africaines.