Dès 1978, la messe est dite. Avec son curieux mélange de futurisme, d’imagerie soviétique et d’électronique désincarnée, KRAFTWERK vient de fournir une Bible à tous les innovateurs qui vivotaient en suivant les préceptes de Copains des Bois.

Déjà, rien que « Die Roboter », qu’est-ce que c’est que ce truc complètement hors de son époque qui vient épeler le mot techno avant tout le monde ? Rythmique simple et mécanique, rapport tout à la fois naïf et ambigu à la technologie, voix robotisée qui assène son « Wir sind die Roboter » : KRAFTWERK fournit le moule et les ingrédients, il n’y a plus qu’à sortir les cookies du four.

Die Mensch-Maschine est aussi et surtout la suite logique du voyage entamé avec Autobahn : on commence par la voiture, on enchaîne avec le train, et là, au bout du bout, on embarque sur la navette spatiale. L’univers, la ville, la lumière artificielle : tous les thèmes sont déjà là, une fois de plus.

Et surtout, ne dites jamais que KRAFTWERK n’est pas humain. Derrière les paroles scandées comme des slogans, il y a une poésie de la résignation, le regard vide de l’aliéné qui essaye de reconstruire un idéal dans sa cellule capitonnée. C’est de la musique d’Allemagne de l’Est, mais avec des machines qui fonctionnent.

S’il fallait vraiment ne retenir qu'un album de Kraftwerk au sein de leur carré magique Autobahn – Trans-Europa Express – Die Mensch-Maschine – Computerwelt, c’est sur l’Homme-Machine que mon choix se porterait. Simple, court, révolutionnaire, et terriblement attachant, c’est l’album qui vous fait aimer l’électro même après que votre gamin a carillonné pendant deux heures sur son clavier Playskool.