[Préambule : pour des raisons pratiques, la discographie de Nena sur Forces Parallèles englobera celle du groupe d'origine et celle de la chanteuse en solo, à l'instar d'Alice Cooper]

Nena, ça vous dit quelque chose ? Mais si, "99 Luftballons", voyons ! L'un des plus célèbres, pour ne pas dire le plus célèbre tube chanté en allemand. Plus de 30 ans après sa sortie, la chanson sonne et résonne encore sur les ondes, à tel point qu'on en oublie qu'elle a été créée par un groupe complet qui a marqué l'histoire musicale de son pays avec une discographie forte de 4 albums presque tous de qualité.

Nena, au départ, c'est qui, ou quoi ? Tout d'abord, c'est Gabriele Kerner. Née en 1960, la chanteuse commence d'abord sa carrière musicale avec The Stripes, un groupe de pop chantant en anglais, comme tant d'autres et oublié de tous ou presque. Après le split en 1982, Nena et son petit ami de l'époque, le batteur Rolf Brendel, acceptent la proposition de leur maison de disques, CBS, de retenter l'aventure, à Berlin et en allemand. De fil en aiguille, arrivent également le claviériste Jörn-Uwe Fahrenkrog-Petersen (on se contentera de Fahrenkrog), le bassiste Jürgen Dehmel, et le guitariste Carlo Karges, un ancien du krautrock ayant fait partie de Tomorrow's Gift et Novalis.

Le groupe ainsi formé prend le nom de sa chanteuse, et connait le succès immédiat avec... "Nur geträumt". Oui, il y a bien eu une vie avant "99 Luftballons". Et une vie qui commence en fanfare, puisque le premier single de Nena propulse le groupe directement dans le peloton de tête des charts allemands. Suivent ensuite "Leuchtturm", jolie chanson d'amour sous-marine, et le fameux "99 Luftballons", se gaussant (?) de ballons pris pour des ovnis. Trois singles placé sous le signe de la Neue Deutsche Welle, avec des guitares acérées et des synthés un peu cheap (pas autant que ceux de Jacno) mais convaincants.

Ces trois singles ont donc bien déblayé le terrain pour le premier album studio de Nena, sorti en janvier 1983. Ce dernier n'est d'ailleurs pas avare en chansons de qualité, écrites qui plus est par tout le monde ou presque – même si c'est Karges qui s'impose le plus à l'écriture. Tout en restant plus ou moins homogène, Nena (l'album) est varié, tape aussi bien dans la new-wave nerveuse et rapide ("Kino", "Nur Geträumt"...) que dans la pop plus classique et romantique ("Vollmond", "Zaubertrick"...). Il y a également des incursions plus curieuses, comme "Ich Bleib' im Bett", un morceau aux accents reggae, mais qui marche bien, pour un truc concocté par des blancs. "Indianer", pour sa part, est le morceau post-punk de l'album, avec une ambiance tribale crédible. Nena va même tâter avec une certaine crédibilité du hard rock avec "Noch einmal", toutes proportions gardées. Point commun de tous ces morceaux : la voix de Nena, bien sûr, unique et reconnaissable entre mille, pas forcément magnifique mais convaincante et touchante.

Pour un premier jet, Nena s'en sort plus que bien. Il y a quelques chansons à la qualité moindre, comme la ballade "Einmal ist keinmal", assez basique et ennuyeuse, mais rien de très grave. L'expérience déjà acquise des membres du groupe leur est très profitable, et la musique qu'ils créent, dans le cadre de la pop, est de très haute qualité. Et de plus, tout le monde met la main à la pâte, même la batteur, au niveau de la composition. Quel dommage qu'on réduise Nena à "99 Luftballons"...