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MUSIQUE ÉLECTRONIQUE  |  B.O FILM/SERIE

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- Style : Ramin Djawadi
- Membre : Bande Originale De Film
- Style + Membre : Hans Zimmer/benjamin Wallfisch, James Bond

Hans ZIMMER - Paperhouse (1988)
Par AIGLE BLANC le 3 Juillet 2018          Consultée 1278 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Le film de Bernard Rose et sa Bande Originale ont surgi à la fin des années 80 tels deux ovnis dans le paysage médiatique de l'époque. Aujourd'hui encore, ils détiennent la palme des oeuvres les plus étranges qu'aient produites les arts musical et cinématographique. Ils nous renvoient à une époque ô combien révolue où il était encore possible de trouver un producteur assez audacieux pour adouber un projet périlleux, quasiment condamné à l'échec commercial, un projet que le cinéaste anglais a pris à bras-le-corps avec une ferveur rare et une intelligence non moins rarissime.
Paperhouse est l'adaptation du roman "Marianne Dreams" de Catherine Stor, écrivaine britannique spécialisée dans les contes pour enfants qu'elle aborde avec une très fine compréhension de leurs ressorts psychanalytiques. Le réalisateur et son scénariste Matthew Jacobs se sont emparés de l'univers de la conteuse avec un respect digne d'éloges. L'oeuvre de Catherine Stor, qui n'infantilise jamais son jeune lectorat, court le risque de se mettre à dos la ligue des parents, pour le traitement hyper lucide de son sujet qui s'adresse en priorité à la part adulte de l'enfant.
Le livre et le film traitent de la maladie infantile et du deuil, sujets éminemment douloureux, et d'autant plus quand c'est un enfant qui en est frappé.

Marianne, onze ans, découvre le pouvoir télépathique de ses rêves qui la mettent en relation avec Marc, un enfant de son âge qu'elle n'a pourtant jamais rencontré et au sujet duquel son docteur lui apprend qu'il est atteint d'une grave maladie. Afin de modifier la tragique destinée qui guette Marc, Marianne se met à dessiner, découvrant alors l'influence de ses dessins sur ses rêves... et, croit-elle, de ces derniers sur la réalité.
Malheureusement, ce petit bijou est quelque peu oublié aujourd'hui, au profit d'autres films de Bernard Rose tels Candyman et Ludwig von B. Sa musique aussi a rejoint les limbes de l'oubli malgré l'illustre patronyme de son compositeur Hans ZIMMER devenu depuis l'artiste officiel numéro 1 du cinéma hollywoodien.

La B.O. de Paperhouse démontre a posteriori l'impasse dans laquelle Hollywood aujourd'hui enferme la musique de film, obligeant les compositeurs à ne plus "composer" et à ne concevoir leur partition que comme tapisserie de fond sans caractère particulier pour ne pas supplanter les images. Même Hans ZIMMER, du haut de sa gloire, ne peut échapper aux directives abominables des technocrates d'Hollywood. Sa musique a ainsi perdu tout ce qui faisait sa personnalité initiale.
Par opposition, Paperhouse s'affirme comme une B.O de caractère, si fusionnelle avec le film qu'elle ne soutiendrait pas le sacrilège d'être transférée sur d'autres images. Les premiers travaux de Hans ZIMMER font la part belle aux claviers électroniques que le compositeur utilise avec invention et une belle science des ambiances propres à chaque scène.
Ici, il dispose d'une armada de synthés très typés années 80 : le Fairlight Series III, le Moog 55, le Yamaha DX1, sans oublier le Oberheim Xpander et le Roland MKS80. Si vous êtes allergique au son de ces claviers tels que les faisaient sonner les groupes de synth Pop à la mode (A-HA, TEARS FOR FEARS, DEPECHE MODE...) s'il vous plaît, ne fuyez pas pour autant la B.O. de Paperhouse. En effet, Hans ZIMMER ne lorgne pas du tout du côté de la Pop électronique. Il sait conférer à sa partition musicale une vraie empreinte orchestrale au son ample et puissant, capable de faire trembler le sol sous vos pieds, mais aussi vibrer la corde sensible de l'enfant resté tapi en vous.
La grande force de Hans ZIMMER est d'avoir compris et mesuré l'infinie tendresse qui s'exprime dans les rêves étranges de Marianne et de l'avoir traduite dans sa partition par deux thèmes à la douceur fragile comme l'enfance, disséminés de façon récurrente dans les 6 pistes de l'album, jusqu'à s'épanouir littéralement lors des 4 minutes finales, le pic émotionnel du disque. Ces deux thèmes très émouvants sont mis fort justement en relation avec le magnifique "Sanctus" de Gabriel FAURE dont Stanley Myers, l'arrangeur de H. ZIMMER, assure les directions chorale et orchestrale. L'interprétation qu'il dirige ici remplace les voix de sopranos habituelles par des voix enfantines, conformément à la volonté initiale de Gabriel FAURE qui avait compris l'émotion irremplaçable d'un choeur d'enfants pour traduire dans son Requiem la tendresse et le réconfort qu'il attribuait à la mort. Cette version du "Sanctus" dégage en effet une fragilité et une tendresse bouleversantes.
Cependant, le chemin semé d'embûches qu'a entrepris Marianne dans le film (déjouer les pièges inéluctables de la mort) entrave la formidable tendresse de ces deux thèmes que le compositeur se voit contraint de disséminer au fil de l'album, en n'en proposant que des bribes, des parcelles prometteuses mais que viennent briser de brusques assauts de violence, assénés par le Fairlight, autant de ruptures mettant les nerfs de l'auditeur à rude épreuve.
Dans de nombreux passages, comme l' "Overture" ou la première partie de "Is Anybody There ?" des synthés, plongés dans les entrailles terrestres, jaillissent des sons de basse extrêmement menaçants. Dans "The Staircase", l'angoisse surgit des accords glaçants d'un orgue quasi funéraire que l'on retrouve, amplifiés jusqu'à la frayeur, dans la piste finale "Me and My Daughter, We Get On Like a House On Fire", l'impressionnante suite pour synthés, guitare électrique, batteries robotiques, voix sépulcrale filtrée au vocoder et sifflement du vent, sans oublier les pales d'un hélicoptère, qui occupait à elle seule l'ancienne face B de la version vinyle.
Dans ses meilleurs moments, la musique de Paperhouse rejoint les préceptes de la musique concrète mâtinés du "Pierre et le le loup" de Tchaïkovski, où les bruits de la nature (le vent, les mouettes), le claquement d'une porte, la voix d'un ogre traitée au vocoder et jaillissant d'une radio infernale, racontent une histoire sans nul besoin d'accompagnement musical classique. C'est à ce titre que la B.O. du film de Bernard Rose supporte avec force et inspiration une écoute aveugle, sans la connaissance des images qu'elle accompagne.
Et lorsque, à la fin, resurgit le thème principal, cette fois-ci parcouru dans sa version intégrale, à l'ampleur et à l'intensité inédites, et dans la force brute de ses riffs de guitare électrique au lyrisme puissant, l'auditeur ne peut que rester sans voix. La B.O. de Paperhouse vient de se conclure en beauté, au comble de l'émotion, tandis que deux derniers assauts de batteries électroniques la referment comme un rideau rouge, dans la ferveur d'un finale saisissant.

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   AIGLE BLANC

 
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- Hans Zimmer (fairlight series iii, moog 55, yamaha tx816, emu m)
- Stanley Myers (directions chorale et orchestrale)


1. Overture
2. Is Anybody There?
3. Sanctus
4. I'll Be Back
5. The Staircase
6. Me And My Daughter, We Get On Like A House On Fire



             



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