Passé l'épisode scabreux mais obligatoire du best of, nous voici de retour sur la discographie classique des EVERLY BROTHERS. Petit point sur la situation : désormais les frangins sont des stars reconnues mondialement, leur style unique fait d'eux des influences évidentes sur la décennie qui s'ouvre. Les harmonies vocales notamment seront un trademark majeur dès l'explosion du british boom. Et il faut admettre qu'une beauté diaphane et pure se dégagent de leurs vocaux, le mélange des voix de Don et de Phil restent à ce jour incomparable. 1960  l'heure du changement sonne ! Et tout va pour le mieux pour notre duo du Kentucky, réunis en compagnie d leurs requins de studios à Nashville, Chet ATKINS notamment est là.

C'est "So sad", une chanson écrite par Don, qui va sortir en single pour continuer la domination au sommet des charts à laquelle le duo est maintenant habitué, certes une jolie mélodie, mais moins adictive que ce à quoi on pouvait légitimement s'attendre. Elle atteint tout de même la 7eme place du billboard ce qui reste un gage de qualité. Puis dans leur précarré, nous avons le petit shuffle western tressautant de "Carol Jane" qui nous renvoie aux grands espaces américains, réminiscence de leurs premiers amours, sans trop de débauche vocale cela dit. Et on se dit que le niveau n'est pas encore là !

Car les Compositions amenées par le couple Bryant n'ont pas la classe et le niveau de leurs grands classiques, loin s'en faut : "Sleepless Nights" me semble trop pencher vers le teenage rock des idols tels Ricky NELSON, c'est très mou ! "You Thrill Me", sans être désagréable, n'est pas mémorable, on est plus doowop sur "Oh True Love" avec son petit beat de piano, c'est mignonnet mais à des années lumières de leurs succès précédents. Chet embellit grandement "Some Sweet Day" une petite compo plutôt pop sans beaucoup de relief – Chris ISAAK a du l'écouter et a su rajouter du smooth sur ce genre de compo plus tard. "Just In Case" est certainement la plus réussie du lot, mais ne casse pas des briques pour autant, ça ressemble aux BO du King d'alors... pas forcément un défaut mais pas non plus un argument majeur !

"Nashville Blues" est plus proche des roots du blues, nonobstant les harmonies vocales bien sur, la guitare de Chet est là pour donner le change. Un titre plutôt réussi, qui lui aussi annonce les évolutions à venir. Toujours bluesy "What Kind Of Girl" est l'archétype même des compositions qui vont envahir le paysage musical trois ans plus tard, à la base pourtant le titre de Ray CHARLES se veut plus rythm'n'blues, mais tout est là, le rythme, la mise ne place, finalement voilà du british boom avant l'heure, c'est presque étonnant de constater à quel point la pierre apportée par les EVERLY à la construction de la musique populaire est énorme, ce morceau en est une preuve irréfutable.

"I Want You To Know" me semble plus chasser sur les terres des CRICKETS de Buddy HOLLY, alors qu'il s'agit d'une composition du savoureux FATS DOMINO. Chet ATKINS y règne en maître et impose son jeu de la tête et des épaules, ce presque au détriment du chant des EVERLY. D'ailleurs le meilleur instant de cette livraison vient d'une reprise de Bob MONTGOMMERY, le partenaire de Buddy HOLLY avec "That's What You Do To Me", s'il y en a un à retenir, le voilà ! Enfin, je trouve aussi un petit plaisir coupable avec "Memories Are Made Of This", dont la version présente est meilleure que celle classique de Dean MARTIN.

Comme vous l'avez certainement compris, cette livraison de début 60 n'est pas le disque que je recommande pour la découverte du duo des EVELY BROTHERS. Mais il y a du bon, et la présence de Chet ATKINS – leur ange gardien - est une véritable aubaine pour les frangins. Pourtant il ne fait pas de doutes que la collaboration avec les époux Bryant marque ici le pas. Cela dit, l'album s'écoule comme autant de petits pains et confirme leur domination à la tête des charts. Ils restent des superstars.