Nous attaquons l'époque transitoire de la carrière des EVERLY. Ce sixième opus est un quasi concept album puisqu'il est divisé en deux parties, la face A étant pour faire la fête, la seconde pour les rêveurs. Au four et au moulin quoi, les pontes de Warner ont déjà compris qu'il leur fallait adapter le duo à la mode d'alors. Voyez donc ce qui est arrivé au KINGSTON TRIO à la même époque, mais eux ne disposaient aucunement de l'aspect rock'n'roll des chansons choisies par les frangins. Quatorze titres d'ailleurs, ils ne font pas les choses à moitié, pourvu qu'ils évitent les fillers ! Un bref coup d'oeil à la set list n'a rien de rassurant, car je me rend compte que pas un seul de ces morceaux n'a passé le cap de la postérité. Pas une compo des EVERLY n'est présente sur cette livraison 1961, on s'éloigne des débuts du rock et forcément les aspects pop deviennent de plus en plus importants.

Mais nous avons tout de même une face "Rock"... pour faire la fête donc ! Essayons ! On débute avec "Mammy" dont on retient le joli riff de guitare bien galopant, mais nous sommes fort loin de leurs grands succès, même si ça reste toutefois bien agréable. On est presque Rag sur "Mention My Name In Sheboygan". C'est sympa mais j'ai beaucoup de difficultés à imaginer la jeunesse d'alors se prendre de passion pour pareille composition. C'est drôle mais totalement suranné. "Muskrat" est un titre de Merle TRAVIS, qui dépote bien avec sa batterie véloce, et d'une modernité étonnante grâce à la guitare de Chet ATKINS qui prend une place considérable.

Le piano bluesy de "My Gal Sal" surprend, on ne s'attend pas à pareille ambiance de la part des EVERLY. Et entendez donc ce solo à deux doigts de la distorsion de l'immense Chet ! On n'est qu'en 61 , mais oui ! Voilà qui change la donne ! Carrément ! Super rapide, "Bully Of The Town" est une adaptation d'un traditionnel par leur papa Ike. Ça dépote sévère et à nouveau, tout repose sur Chet qui vole la vedette aux voix pourtant si justes de Don et Phil. Le mid tempo "Chlo-e" sonne très pop avec son rythme boléro, mais c'est peu remarquable.

Que donne la face pour les rêveurs ? On espère des harmonies de folie dans le coin ! "Hi-Lili, Hi-Lo" sort de la B.O de l'éponyme classique "Lilly" avec Leslie Caron, oscar de l'année 53. On pêche partout on on peut, mais on s'endort un peu. Leur version de "The Wayward Wind" ne rentre pas dans l'histoire, c'est celle de Anne MURRAY qui intègre les annales. Mais le tagada du cheval ne prêche pas pour la modernité. D'ailleurs, "Grandfather Clock" nous ramène à la fin du 19ème siècle. Et il faut capter l'auditoire des années soixante. Mais le traitement appliqué notamment grâce à l'apport de Chet, toujours lui, est très sympa.

Plusieurs de ces chansons pour les rêveurs endorment cependant l'auditoire, attention ! "Don't Blame Me" est un slow larmoyant doowop peu amène alors que "When I Grow Too Old To Dream" est une contine pour les enfants. Le vieux classique du pacifique de culture Maori est "Now Is The Hour", on se croirait dans blue hawai d'Elvis, au secours ! "Little old lady" n'est pas beaucoup plus remarquable, si ce n'est que le sujet est mignonnet. Finalement, la meilleure surprise vient de l'hispanisante "Love Is Where You Find It" de Nacio BROWN, d'une vélocité étonnante. On y entend peu le frangin Phil, mais le résultat est magnifique.

Pas un seul titre de gloire n'est sur cet album. Sur les standards de 1961 cependant, il reste d'un abord agréable. Quelques titres surnagent mais peu, mais je ne peux que conseiller les écoutes de "Mammy" et de "Love Is Where You Find It". Pas de quoi tirer vers le haut un album que l'on qualifie d'à peine moyen pour le duo le plus connu au monde.