Janvier 2002 : le corps de Jon LEE est retrouvé pendu dans sa maison de Miami, avec quatre notes à ses pieds pour tenter de justifier son acte. Et voilà que Grant NICHOLAS et Taka HIROSE doivent se poser la question que se sont posées trop d'autres groupes avant eux : Et maintenant ?

En honneur de leur ami ils décident de continuer. Pour faire face à cette nouvelle aussi froide qu'absurde, leur meilleur remède reste la musique, et, après avoir fait leur deuil en privé, ils tentent de trouver une forme de thérapie en retournant sur scène pour quelques festivals underground avant de retourner en studio. Le titre de leur quatrième opus est tout trouvé, ce sera "Comfort in Sound", du réconfort dans le son, titre très poétique et qui sera accompagné sur la pochette par un sobre dessin. Le premier single fera aussi office d'au-revoir, ce sera "Come Back Around", l'un des derniers morceaux qu'ils avaient composés tous les trois ensemble. Ils n'en modifieront que les paroles mais en garderont le côté rock et brut de décoffrage. Un clip vidéo est tourné, les montrant jouant en face de quatre batteurs, toutes des femmes, une petite pique au fait que Lee se plaignait que leurs clips manquait de présence féminine.

D'un point de vue stylistique ils poursuivent l'adoucissement pop commencé sur Echo Park et, au vu des circonstances, mettent de côté les guitares abrasives pour se concentrer sur les morceau mid-tempos, qui constituent le plus gros de l'album. A part "Come Back Around", seul "Forget About Tomorrow" rappelle que Feeder sait sortir les crocs lorsque nécessaire. Mais l'atmosphère du disque n'est pas nécessairement pesante. Triste oui, mais avec une forme de positivité, comme une tentative de relever la tête face à l'adversité et d'honorer la mémoire du disparu en continuant son œuvre.
Rester concentré sur des morceaux calmes permet à l'album de rester plus cohérent et de trouver le bon équilibre par rapport à ses prédécesseurs. Comme dit plus dit Feeder a continué sur sa lancée plus pop-rock commencée sur Echo Park en mettant de plus en plus en valeur le synthétiseur et la guitare acoustique au lieu de la guitare électrique mais laisse de côté l'aspect juvénile forcé d'Echo Park pour approfondir la maturité qui commençait à poindre sur Yesterday Went Too Soon.

Malheureusement cela serait trop simple si cet équilibre parvenait à sécuriser la promesse d'un chef-d’œuvre. Mais même après plusieurs écoutes, il reste difficile de retenir autre chose de Comfort in Sound autre chose que les deux singles déjà cités, le morceau éponyme et "Summers Gone". Comme Le Silence dans Doctor Who que l'on oublie sitôt que l'on cesse de les regarder, les morceaux s'évaporent de notre mémoire sitôt écoutés, ce qui d'autant plus paradoxal que l'on se surprend sans cesse à se demander pourquoi, alors qu'ils sont tous bien fichus et agréables à écouter. C'est un problème plus insidieux qui va continuer à gagner en ampleur chez Feeder et que l'on aura l'occasion d'apporter plus en détail prochainement, mais c'est que déjà l'effet de déjà-vu -ou plutôt déjà-écouté- se fait ressentir.

Malgré cela je ne peux pas être trop dur. D'abord à cause du contexte entourant l'album, une seconde peau impossible à ignorer, et ensuite parce que même si les morceaux ne sont pas mémorables ils n'en sont pas moins agréables. Si le résultat final n'est pas toujours concluant, Grant Nicholas a le chic pour dénicher des mélodies qui font mouches.