Depuis le temps, on le sait. Toute forme d’art y est soumise, et pourtant on s’obstine à l’oublier : moins, c’est plus. Un adage qui a maintes fois prouvé son efficacité. Moi qui suis fan de Star Wars, film de la surenchère, il me laisse parfois sceptique. Mais le tout premier film de la saga a bel et bien été sauvé du fiasco par des coupes drastiques. La moitié du premier montage a en effet été jetée à la poubelle, et le film est devenu celui qu’on a adoré.

Mais comment adapter l’adage à de la musique Chiptunes, comment faire moins que basique ? En revenant à la source, à sa forme la plus essentielle. Les Chiptunes des ères 16 et 32 bits ne sont pas celles de l’ère 8 bits, en réalité. Signaux triangulaires, carrés et sinusoïdaux ont peu à peu été remplacés par des synthétiseurs FM et des banques de samples. Le nombre de pistes sonores a lui aussi évolué. L’idée brillante de SQ Chips a donc été de revenir aux sonorités d'origine, tout en se débarrassant des contraintes. Il y avait donc moyen de faire mieux tout en faisant moins.

Premièrement, pour les musiques de la NES ou de la Game Boy, on sort du carcan étriqué des microprocesseurs 8-bits. Pas besoin d’en faire des tonnes pour sublimer ces mélodies. Quelques effets parsemés, quelques nappes, et revisiter la section rythmique suffisait. Les crachouillis de la NES, que les artistes de l’époque se sont évertués à rendre les plus abrupts possible afin de simuler des percussions, n’ont jamais été satisfaisants. Tout est ici revisité version EDM tendance House avec quelques débordements pour le style. Ce sont les mêmes tendances que l’on avait déjà noté sur Love SQ et More SQ. Mais ici la recette est d’une part complètement assumée et d'une autre surtout sublimée.

Mais pour le reste ? On revient en arrière ! Moins c’est plus ! On applique donc la même formule : Des signaux simples et à peine quelques arrangements. Le plus fou, c’est que cela fonctionne du tonnerre ! Secret of Mana (1993), Final Fantasy VI (1994), Chrono Trigger (1995), FF VII (1997), Einhander (1997), Xenogears (1998), Brave Fencer Musashiden (1998) et même Nanashi no Game (2008) et FF XIII (2009 !) : tous régressent comme si ces jeux étaient sortis quelque part avant 1992, sur NES ou Game Boy. Ou plutôt sur la PC Engine, la Rolls des musiques Chiptunes, que l’on n'a pas vraiment connue. En 2011, les jeux vidéo indépendants avaient le vent en poupe. Le rétro gaming en a profité pour se tailler la part du lion. Tant et si bien qu’aujourd’hui, il est parfois difficile de distinguer ce qui est d’époque de ce qui est moderne dans cette abondante production. La musique a réalisé de même un demi-tour. On croyait que les Chiptunes étaient l’affaire du passé. Ils sont revenus de plus belle, et avec la manière ! Ce n’était pourtant pas si vieux, souvenez-vous de Dragon Quest VIII en 2004/2005 ! Même Dragon Quest XI (2017) est revenu aux affaires depuis. Point d’effet de mode ceci étant, simple imbroglio à propos de droits d’auteur, en réalité…

Malheureusement, Square-Enix Music n’a pas tout compris à l’affaire. Quelqu’un s’est encore dit là-dedans que plus c’était également plus. Tout le monde sait que non, pourquoi s’obstiner ? 18 titres et presque autant d’arrangeurs, je n’ai même pas besoin de vous faire un dessin. On retrouve de nombreux noms qui ont déjà officié sur les précédentes moutures. SEXY-SYNTHETIZER en particulier, qui revient sur 3 des meilleurs titres, est ici en pleine forme ! Mais tous ne sont pas de ce niveau. Il aurait fallu faire plus de tri. Le remix de "Ronfaure" (FFIX) par exemple, est complètement inutile. Je n’ai pas vraiment été convaincu par le côté R2D2 de "Near the Water" (FFXII) non plus.

En revanche, les Medleys de SaGa 2 et Mystic Quest (GB) sont bourrés d’une énergie folle. "Blinded By Light" de FF XIII prouve si nécessaire que sa mélodie est excellente, même sans orchestre. "Skullpion" de Brave Fencer Musashiden sort de la formule en nous proposant une brillante section rythmique Drilln Bass, utilisant les bruitages de jeux plus vieux que lui. Pour le coup, ça crachouille, mais quand c’est si bien fait, on en redemande !

Conclusion classique donc, il y a un excellent album à tirer de SQ Chips. Connaissant la boutique, moins de titres auraient probablement signifié moins de Brave Fencer Musashiden ou de Mystic Quest. Ce qui aurait été bien dommage. On ne va donc pas bouder notre plaisir. L’idée de SQ Chips était géniale, et le résultat est grandement à la hauteur, malgré ses quelques titres superflus.