Musicalement, au Japon, il y a un truc bien particulier. Ils ont dans leur électro-pop une envie constante de vitamine qui m’a toujours ébloui. Leur Metal, de même, est virtuose. Il n’y a qu’à voir les artistes internationaux qui ont du succès là-bas : Yngwie MALMSTEEN, Paul GILBERT… Marty FRIEDMAN n’est même jamais revenu ! Au Japon, ça va vite. La vitesse, j’aime ça. Mais ces japonais tout véloces, sont vraiment capables du meilleur comme du pire.

Si leur musique était du cinéma, on pourrait dire que c’est systématiquement surjoué. Après tout, nous sommes au pays du théâtre Nô. D’ailleurs la première fois qu’on s’essaye à un anime en VO, le choc culturel est immédiat. Mais si, rappelez-vous : YAMETE KUDASAI ! (ah, c’était pas dans ce genre-là, pour vous ?). Ou peut-être est-ce en France que l’on aurait plutot tendance à sous-jouer en comparaison ? Godard… j’ai essayé, je n’ai pas tenu jusqu'à la fin, j’avais plus d’air, j’étais… A bout de souffle ! Enfin il y a pire que le "sous-jeu" à la française, il y a le "non-jeu". Voyez The Lobster de Yórgos Lánthimos pour l’exemple : pire calamité cinématographique qu’il m’ait été donné de voir. L’histoire était sympa, mais alors ces acteurs qui ne jouent plus ? Se taper le regard de moule de Colin Farrel façon Dominic Purcell dans Vinkingdom (1) pendant 2h, c'est de la torture. Qu’est-ce que l’excellente Rachel Weisz a été foutre là-dedans ? J’ai eu le droit à Hélène et les garçons quand j’étais ado, j’ai eu ma dose de mauvais acteurs, n’en jetez plus, merci ! Quand j’y repense, j’ai toujours une pensée émue pour Madeline Besson, fille de Coline Serraud, qui nous a ébloui de par sa 'magnifique' prestation dans 18 ans après. Pour Giraud, Bougenat et Dussolier, ça n’a pas dû toujours être facile de donner la réplique… Mais bon, faut bien payer ses impôts ! Tout ceci pour vous dire que nous aussi, nous sommes capables du meilleur comme du pire (voyez 3 hommes et un couffin, l'original donc, pour le meilleur). Tout est relatif, comme disait Einstein.

Revenons au Japon. Oui parce que la musique française, moi... dès que ça chante, c'est compliqué! Enfin ça chante... Vous aurez compris l'allégorie avec le cinéma, j'espère. On déclame des vers en France, on est plutôt bons en poésie. Pour la musique en revanche, heureusement qu'on a la scène électro! Bref, le Japon. Quand ils tentent de combiner l’électro avec le Metal, c’est là qu’on commence à entrevoir quelques soucis. Les deux ne vont pas à la même vitesse, ou alors pas dans la même direction… Pour sûr, à la fin, on obtient un carambolage. J’ai l’impression que toutes leurs tentatives de mariage échouent irrémédiablement et de façon archi-bruitiste. Cela donne, pour ce que j’ai pu en écouter, une espèce de mélange hyper technique et surproduit dont on n’arrive plus rien à distinguer, une masse incohérente difficile à supporter sur la longueur.

Pour l’exemple notoire, voyez Les BO des jeux Devil May Cry (1, 2 et 4, pour ceux auxquels j’ai joué). Pour moi, ça, c’est du bruit. Qu’on se comprenne bien, autant dans le Metal que l’électro je suis capable d’apprécier des trucs bien énervés. Human de DEATH ou The Living Will Envy the Dead de WE ARE MAGONIA : il ne me semble pas que ce soit taillé pour les petites natures. Mais là, voilà, quand les japonais tentent le mix, ouille ouille ouille ! Ça n’a pas l’air propre au Japon (voyez la BO du Doom de 2016, pour un autre truc bien foireux et inaudible). Mais j’avoue qu’à force, avec les Japonais, quand ils tentent une hybridation guitare saturée et clavier, j’y vais à reculons. Il doit bien y avoir des contre-exemples, j’en suis certain. D’ailleurs il y en a, sur ce Battle SQ, plus Electro que Metal au final. Mais sur cet album en particulier, par moments, je serre les dents et j’attends un peu que ça passe. D’une scène surjouée au charme tout exotique, on passe parfois au snuff movie.

Ecoutez moi cette reprise des thèmes de combat de Final Fantasy IV dans le genre. Qu’est qu’ils ont fichu avec la guitare basse et le clavier ? Ils ont pris de la cocaïne ou quoi ? Je pense qu’ils jouent un autre morceau, ce n’est pas possible d’écrire un arrangement pareil ! Ou alors c’est au mixage, ils ont inversé les pistes. On n’y comprend plus rien. Pour le guitariste rythmique sur la reprise de Romancing Sa.Ga 2, c’est aussi très limite. A croire que les pistes des différents instruments n’ont pas été mixées à la même vitesse. Au début, ça passe, à la fin on dirait du Free Jazz, mais à la guitare saturée ! C’est chaud pour les oreilles. Je vous renvoie une nouvelle fois vers l’album Re:Birth II Romancing Sa.Ga Battle Arrange pour les bonnes reprises à la guitare électrique des thèmes de combat de Kenji ITO. Ce n’est ni le titre original, ni l’idée de l’arrangement, qui posent problème ici, mais bien la réalisation.

Il y a cette reprise de Chocobo’s Dungeon aussi ! On dirait un mix du vieux générique du JT de TF1. Sauf que là, c’est la version reprise par Kad Mehrad et le disque est rayé. En plus, on entend bien la batterie ! Quoi ? JE DIS ON ENTEND BIEN LA BATTERIE ! Jeudi sonotone pain le pétri ? Oui c’est ça, il faut se mettre de la mie de pain avant dans les oreilles, ou se procurer un sonotone après, à vous de choisir !

Bien sûr, je grossis le trait. Si vous acceptez déjà WE ARE MAGONIA et/ou DEATH, rien ne devrait vous rendre vraiment sourd là-dedans. La reprise "The Bird Flies in the Sky, The Fish Swims in the River" de Live a Live est très sympathique. Celle du "Decisive Battle with Magus" de Chrono Trigger également. Si vous n’êtes pas allergiques au Dubstep à la SKRILLEX, la fanfare de victoire des Final Fantasy (version des épisodes I-VI et IX) nous est bien malaxée comme il faut. Même chose pour la nerveuse "Battle on the Big Bridge" de Final Fantasy Tactics.

Dans l’ensemble, l’album est toutefois excessif. A noter qu’à l'image de Beer SQ (sorti exactement le même jour), il existe également une version limitée avec disque bonus, que je ne possède pas. L’album d’origine est déjà bien assez long. Je présume que, compte tenu de la thématique d'affrontement des titres ici repris, faire dans l’excès pour les reprises était l’idée de base. Mais à l’origine, ces musiques sont censées accompagner des batailles de jeu de rôles japonais. Des jeux où action rime normalement avec réflexion. Là, nous avons trop de couches, trop de genres, trop de bruit, trop de pistes, trop de durée. Impossible de se concentrer. Comme dirait mon collègue Jasper Lee Pop, quand c’est trop, ce n’est pas seulement du jus d’orange à l’eau, c’est juste trop (2)


(1) Si vous n’avez pas vu ça, c’est grandiose : https://www.youtube.com/watch?v=sxdybjNFw9I
(2) J’allais bien finir par lui la piquer, celle-là ! Je vous invite à relire son excellente chronique de VINNIE VINCENT INVASION à cette occasion.