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- Style : Candi Staton

Bettye LAVETTE - Worthy (2015)
Par LE KINGBEE le 25 Septembre 2022          Consultée 708 fois

Récapitulons quelques dates écrémant la carrière de cette chanteuse tragédienne : en 1962, à tout juste seize ans, Bettye LAVETTE * triomphe avec "My Man – He’s A Lovin Man". En 1965, elle met en boîte le single "Let Me Down Easy" pour Calla Records qui grimpe à la 20ème place des charts R&B sans la moindre promotion. Cinquante ans plus tard, tout juste après ce second fait d’arme, la native du Michigan revient avec Worthy. Entre temps, Bettye a connu quelques années de disette et d’obscurité tout en demeurant néanmoins toujours active.
Dix ans après le carton inattendu de "I’ve Got My Own Hell To Raise", la chanteuse retrouve le producteur Joe Henry et les guitaristes Chris Bruce et Doyle Bramhall II pour une plongée dans des répertoires Rock et Americana concoctés à sa sauce.

Depuis le nouveau millénaire, son timbre a acquis une intensité incroyable, parfois proche de la tragédie, et une profondeur qui lui permet d’extraire et de faire vivre d’incroyables émotions. Si certains pourront se montrer sceptiques, pérorant que Bettye n’écrit que très rarement, sachez qu’elle a le don de reprendre des morceaux souvent peu connus et de se les réapproprier, leur donnant bien souvent une autre dimension et par la force des choses une seconde vie.

Il faut avoir de l’oreille et de l’imagination pour reconnaître "Unbelievable", titre figurant dans Under The Red Sky, disque sous-estimé de Bob DYLAN. Loin de moi l’idée d’affirmer que le Country-Rock du barde était gentillet, mais la version de Miss Bettye dévoile un groove et une puissance dramatique aux confins de l’érotisme dont l’original était dépourvu.

Lors d’une interview, la chanteuse déclarait qu’elle privilégiait avant tout la mélodie, et des chansons qu’elle peut fredonner sous la douche ou siffler en cuisinant. Il arrive que Kevin Kiley (son époux et conseiller) lui suggère des titres mélodiques qui ont aussi une histoire forte, la chanteuse préférant des textes pas nécessairement autobiographiques mais qu’elle est capable de se réapproprier.
C’est ainsi qu’elle s’attaque à "Complicated", titre des STONES au générique de Between The Buttons, en prenant soin de changer quelques lignes de texte pour que la chanson lui colle comme un gant. LaVette s’offre d’autres incursions dans le paysage de la Perfide Albion, reprenant le "Wait" des BEATLES. Composé à l’origine par Paul McCartney, la chanson évoquait une relation tendue entre Sir Paul (pas encore Sir) et l’actrice Jane Asher, là Bettye parvient à détourner les paroles, procédé qui lui permet d’invoquer du regret. Joe Henry concocte des arrangements totalement différents à "When I Was A Young Girl" **, obscure composition de Chris Youlden pour SAVOY BROWN. L’art de transformer une purge en pépite.

La chanteuse reprend également quelques obscurités issues du terroir américain : c’est ainsi qu’elle relance "Where A Life Goes", balade de Randall Bramblett, musicien de session et songwriter réputé ayant collaboré avec Elvin BISHOP, Gregg ALLMAN et Bonnie RAITT. Comme souvent, le timbre enflammé contribue à apporter une touche proche du paroxysme. Autre superbe pioche avec "Just Between You And Me And The Wall You're A Fool", une petite pépite de Country Soul des AMAZING RHYTHM ACES. Si l’ambiance crépusculaire est garantie, les guitares épurées et l’orgue débouchent sur un sentiment d’apaisement. Elle sort de l’anonymat "Undamned", une balade Folk d’Over The Rhine, duo formé par le couple Linford Detweiler/ Karin Bergquist et produit alors par Joe Henry. Création sibylline du tandem Christine Santelli/Brian Mitchell, "Step Away" semble avoir été composé pour l’album. Le texte rageur semble remettre les pendules à l’heure et l’Américaine n’est jamais aussi bonne que quand il s’agit de rendre les coups: I been lied to, I been crossed - I been put up hard and damn near lost - I been promised, I been fooled - I been deprived, but I been schooled. On reste sur une impression similaire avec "Worthy", une compo de la paire Beth Nielsen Chapman/Mary Gauthier. Comme elle l’affirme via les paroles It took a mighty blow to crack me to the core - To finally come to know I could ask for more - Trying to survive, how could I have known ? - Worthy, worthy, what a thing to claim, Bettye dévoile un caractère de battante, rien de plus normal pour une chanteuse indestructible. Titre qui donne logiquement son nom à l’album. Enfin, elle reprend avec ferveur "Stop" ***, titre clin d’œil qui figurait dans l’album Scar de son producteur.

Cet album constitue un excellent filigrane avec ses prédécesseurs, contenant des reprises judicieuses et un accompagnement aussi sobre que délicat. On adresse une mention à "Unbelievable", "Complicated", "When I Was A Young Girl" et "Just Between You And Me And The Wall You’re Fool".

On a par moment l’impression de se retrouver dans un studio de Muscle Shoals. Si Bettye regrettait que Jack White ou Don Was ne se soient pas intéressés à elle alors qu’ils sont tous deux établis dans le Michigan, elle ne perd rien au change avec Joe Henry, auteur d’une production soignée. La pochette peu engageante, des chansons aux thèmes souvent apathiques et une certaine similarité sonore empêchent l’album d’acquérir la note maximale, mais avec Worthy traduisible par Digne, Bettye LaVette se paie encore une bonne note avec un 4,5.


*Depuis une dizaine d’années, Bettye a opté pour une orthographe différente de son nom d’artiste, celui-ci devenant LaVette avec un V majuscule.
**Le titre était à l’origine "When I Was A Young Boy".
***Titre homonyme à ceux de Moody Blues, Loretta Lynn, Pink Floyd, Spice Girls, Jane’s Addiction.

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- Bettye Lavette (chant)
- Doyle Bramhall Ii (guitare)
- Chris Bruce (basse)
- Jay Bellerose (batterie, percussions)
- Patrick Warren (orgue, piano, chamberlin)


1. Unbelievable
2. When I Was A Young Girl
3. Bless Us All
4. Stop
5. Undamned
6. Complicated
7. Where A Life Goes
8. Just Between You And Me And The Wall You're A Fool
9. Wait
10. Step Away
11. Worthy



             



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