Cet album est généralement cité comme le sixième album de SYNERGY, ayant été publié en 1981 à la suite de l’album Audion. Mais, chronologiquement, il s’agit bien de la cinquième œuvre de Larry Fast, les trois morceaux la composant ayant été enregistrés en janvier 1980.
Computer Experiments Volume One est né de la collaboration de Larry Fast avec John Simonton, dirigeant de PAiA Electronics Inc., société basée à Oklahoma City concevant des synthétiseurs anaogiques ainsi que des ordinateurs miniaturisés capables de les contrôler, avant même l’avènement de la norme MIDI. John Simonton conçut notamment un programme dénommé Pink Tunes, permettant de générer une suite de notes dont la hauteur, la durée, les harmoniques étant prédéterminées par l’utilisateur et sélectionnées aléatoirement* par l’algorithme. Dans un second temps, cette suite de notes est convertie en signaux électriques et jouée par les synthétiseurs connectés à l’ordinateur.

Bien que Pink Tunes fût conçu à l’origine exclusivement pour les ordinateurs et synthétiseurs PAiA, Larry Fast réussit à connecter un ordinateur PAiA avec un Prophet 5, synthétiseur analogique contrôlé par microprocesseur. C’est ainsi qu’il créa, en trois sessions de studio, le présent album. Larry Fast n’envisageait pas dans un premier temps de publier ces trois morceaux en album, mais se décida à proposer Computer Experiments Volume One à la vente via des bons de commande trouvables avec l’album Audion, à compléter et retourner par courrier. Computer Experiments Volume One fut finalement réédité normalement dès 1986 par Audion Co., filiale de Passport Records fondée par Larry Fast lui-même.

Voilà pour la petite histoire. Et je crains que nous ayons déjà dit l’essentiel sur ce disque. Les trois longues plages constituant Computer Experiments Volume One sont de caractère très calme, ambiant voire statique, l’exact opposé d’un album habituel de SYNERGY. Bien sûr, il y a toujours de l’harmonie, voire quelques vagues accords, mais ceux qui attendaient de nouvelles mélodies épiques en seront pour leurs frais.
Tentons quand même un survol de l’ensemble. Les deux premiers morceaux portent le même titre, c’est malin. Le premier, "Artificial Intelligence" du 28 janvier, place en opposition des notes cristallines très aigues et des vagues de fausses cordes dans les graves. Le deuxième, "Artificial Intelligence" du 25 janvier, est plus fourni, débutant par des sons étranges dans les aigues, rapidement complétés par de larges nappes de type cordes. Cette deuxième piste est plus inquiétante que la première, de par la tension harmonique entre les nappes majestueuses et les effets sonores aigus.
"The World After April" du 22 janvier couvre toute la seconde face – c’est le seul et unique morceau de SYNERGY dans ce cas de figure. Ce morceau est assez proche du précédent, en plus épuré. Nous y trouvons encore des nappes de cordes posant quelques accords disparates, avec des tintements mystérieux en arrière-plan.

Computer Experiments Volume One reste un album original pour l’époque et agréable à écouter, malgré sa difficulté d’accès et son caractère radicalement expérimental. On peut donc se montrer indulgent sur la note finale.

*Quand on parle d’aléatoire en informatique, il ne s’agit pas réellement de hasard; il n’existe à l’heure actuelle aucune fonction mathématique permettant de générer des valeurs totalement aléatoires. Il y a donc deux moyens de générer des valeurs pseudo-aléatoires sur ordinateur : soit capter des données physiques de la machine et les convertir en nombres, soit utiliser un 'pseudorandom number generator', générateur de nombres pseudo-aléatoires qui, à partir d’un unique paramètre appelé 'graine', génère une suite de nombres avec une fonction mathématique complexe.