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- Membre : Mother Earth

Tracy NELSON - Deep Are The Roots (1965)
Par LE KINGBEE le 8 Juillet 2023          Consultée 410 fois

Bien avant d’intégrer MOTHER EARTH puis de s’envoler vers une carrière solo au milieu des années 70, Tracy NELSON avait enregistré son premier disque en 1964 à 19 ans. Native de Madison (Wisconsin), Tracy débute alors qu’elle n’est encore qu’une gamine au sein du Fuller Wood Singers, une troupe familiale Folk bienpensante genre Famille Trapp. Elle enchaine chez The Fabulous Imitations, autre formation locale, pour une période aussi brève. Alors qu’elle s’apprête à terminer son cursus universitaire en science sociale, Tracy se produit dans une veine Folk Blues dans le circuit des facs et des bars.

Charlie MUSSELWHITE, jeune harmoniciste ayant fait ses gammes sur Maxwell Street, la recommande à l’ethnomusicologue Samuel Charters. Responsable du catalogue Jazz et Blues et dénicheur de talents pour la firme Prestige, Charters décide de produire lui-même la chanteuse.

Enregistré à Chicago, Deep Are The Roots reprend le concept des premières bandes enregistrées par Charters pour le label Folkway Records. Ici pas de fioritures, le producteur privilégie un enregistrement épuré, Tracy Nelson étant accompagnée avec parcimonie par Musselwhite sur cinq pistes, le pianiste de Gospel Harvey Smith (4 plages) et du guitariste Peter Wolfe (présent sur 7 titres). Si la pochette de ce premier jet ne renseigne aucunement sur son contenu, l’étui de guitare sur lequel s’accoude une souriante chanteuse laisse planer l’idée d’une ambiance Folk Blues. Fortement ancré dans le domaine du Jazz, Prestige Records sort de son carcan éditant une production Folky Blues à l’instar de quelques unes de ses productions de l’époque (Pete, Peggy et Mike Seeger ou bien Tom Rush).

A travers ces racines profondes, Tracy Nelson propose ici une remontée dans le temps avec un voyage bluesy à la rencontre de Bessie Smith (décédée en 1937 dans un accident de la route) et Ma Rainey, victime d’une crise cardiaque en 1939. Si la première hérita d’un prestigieux surnom Impératrice du Blues, la seconde ne fut pas en reste avec la Mère du Blues. Deux icones du Blues féminin remises au gout du jour à travers une relecture Folk Country Blues du meilleur effet.

Tracy nous offre d’excellentes relectures de Bessie Smith. Enregistré en 1931 sous forme de Blues Jazzy avec piano et section cuivre, "Long Old Road" prend ici une tournure éloignée de l’original ; si les deux guitares nous plongent dans un délicat fumet mississippien, l’harmonica de Charlie Musselwhite impulse une sonorité typique au Delta. Le titre sera repris par Queen Latifah dans le biopic Bessie réalisé en 2015 par Dee Rees. Titre le plus long de l’album "Startin’ For Chicago" marque une légère rupture avec l’ensemble, derrière un véritable Piano Blues et le délicat jeu d’harmonica de Musselwhite, Tracy Nelson nous apporte une contribution dédiée à Chicago, comme peut le laisser suggérer son titre.

Second point d’ancrage, Ma Rainey, auto-proclamée Mère du Blues, a fait ses gammes dans une église baptiste avant de devenir une vedette dans le registre minstrel show. Ces nombreuses tournées permettront à Ma Rainey de découvrir de nombreux chants traditionnels dont elle s’inspirera pour composer un répertoire somme tout personnel. Propriétaire d’une centaine de titres édités par Paramount, label qui malheureusement avait tendance à négliger la qualité sonore, Rainey lui apporte "Oh My Babe", titre gravé initialement en 1926. Si Odetta avait repris la chanson en 1962 dans une étrange mouture alliant Jazz et Dirty Blues, Nelson apporte ici une autre dimension, portée par le piano d’Harvey Smith, la chanteuse parvient à donner une ambiance quasi crépusculaire alors qu’elle ne force à aucun moment sur sa voix. Changement de décor avec "Grieving Hearted Blues", si l’harmonica tisse encore un lien avec le Delta, le piano tranche apportant une touche entre Rag et Barrelhouse. Si "Black Cat Hoot Owl Blues" offrait de la fantaisie avec des miaulements de chat en guise d’intro, un cornet et un jug archaïques, la présente version avec harmonica s’avère plus sérieuse, c’est qu’on ne déconne pas avec ces histoires de superstitions, thématique usuelle du Blues et du Voodoo. Derrière "Ramblin’ Man" se cache en fait un autre intitulé de Ma Rainey avec "Hear Me Talking To You", une petite pépite de Folk Blues. Dernier emprunt à la Mère du Blues avec "Trust No Man" *, titre dans lequel la guitare acoustique de Peter Wolfe et le piano d’Harvey Smith dévoile une ambiance propre aux tavernes de Chicago.

Nelson nous propose également des titres issus du Traditionnel. C’est ainsi qu’elle reprend "Motherless Child Blues" titre des années 30 de la texane Elvie Thomas. Les deux guitares de Wolfe et Nelson diffusent un délicat fingerpicking mettant en lumière les vicissitudes d’une jeune fille n’écoutant pas les dernières recommandations d’une mère mourante reprenant de ce fait les mêmes erreurs de sa génitrice pour son plus grand bonheur. Le titre a récemment connu une nouvelle version via Rory BLOCK. Grand classique de Big Joe William, "Baby Please Don’t Go" est délivré ici sous une forme Folk Blues plus proche de Greenwich Village que du Mississippi. Un titre dans lequel Tracy s’occupe à la fois du micro de la guitare et des ivoires. Standard de Mississippi John Hurt, "Candy Man" a été mis à toutes les sauces tant au niveau du texte que de l’orchestration. Ici l’harmonica de Musselwhite et la guitare de Tracy dépeignent un Folk épuré dans la lignée des versions de Dave Van Ronk et Ramblin’ Jack Elliott. Grand classique du duo Clarence Ashley/Gwen Foster, "House Of Rising Sun" aura connu plus d’un coucher de soleil entre la version d’origine, le carton des ANIMALS et les multiples versions Folk ou Protest Song. Là, c’est une version Folk et en solo que nous offre la chanteuse, un titre qui marche sur les traces de Ramblin’ Jack Elliott. Officiant encore en solo, Tracy transforme "Jesus Met The Woman At The Well", un Gospel enregistré par les Two Gospel Keys et popularisé par Mahalia Jackson et le Révérend Blind Gary Davis en une pièce Folk bluesy du meilleur effet. Nick CAVE reprendra la chanson en début de carrière. Toujours est-il que Nelson nous conte ici l’épisode biblique entre un Jésus mort de soif et la Samaritaine.

Si certains titres peuvent paraitre aujourd’hui mous du genou ou austères, Tracy Nelson superbement épaulée par le grand Charlie Musselwhite nous délivre un premier opus sincère et particulièrement convaincant, annonciateur d’une longue carrière. Entre Folk et Blues Revival, l’atmosphère et une production sans la moindre poudre aux yeux de Charters, on a entre les mains un disque qui mérite d’être redécouvert. Edité à l’origine en mono, l’album fera l’objet d’un second pressage en stéréo. Le label Wounded Bird Records l’a réédité en format CD en 2018. Pour une meilleure cohérence, cet opus sera classé sur l’étagère du Folk.

* Titre homonyme à celui de Jimmy Cliff.

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   LE KINGBEE

 
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- Tracy Nelson (chant, guitare 1-2-4-7-10-11, piano 4-9)
- Peter Wolfe (guitare 1-2-4-5-6-8-12)
- Harvey Smith (piano 5-6-8-12)
- Charlie Musselwhite (harmonica 3-6-7-8-9)


1. Motherless Child Blues
2. Long Old Road
3. Startin' For Chicago
4. Baby Please Don't Go
5. Oh My Babe
6. Ramblin' Man
7. Candy Man
8. Grieving Hearted Blues
9. Black Cat Hoot Owl Blues
10. House Of The Rising Sun
11. Jesus Met The Woman At The Well
12. Trust No Man



             



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