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Murray HEAD - Say It Ain't So - Live (2024)
Par MARCO STIVELL le 5 Mars 2024          Consultée 1303 fois

C'est à croire que les artistes folk-rock sont sauvegardés de manière particulière pour une extraordinaire longévité en termes de vie, de carrière. Regardez Hugues AUFRAY, 95 ans et toujours l'impression d'en faire vingt de moins, toujours sur scène, même si c'est peut-être la dernière. Un exemple certes bien français. Prenez maintenant Murray HEAD, le plus français des Anglais, installé depuis longtemps dans les Pyrénées-Atlantiques (64). À peine 77 ans, mais avec une voix pratiquement inchangée depuis le même nombre en années du XXème siècle. Certes, il peut monter moins haut et en permanence qu'en 1977, mais le timbre est toujours celui que l'on a connu. Et c'est beaucoup, à l'ère des chanteurs si peu sincères.

Cher vieux frère, dont le dernier album My Back Pages (constitué de reprises) date de 2012, déjà, et qui décide de fêter ses cinquante années d'oeuvre personnelle sur scène ; celle-là, en revanche, il ne l'a pas délaissée longtemps durant toutes ces années. Les albums studio ont du mal à se vendre, alors pourquoi ne pas marquer le coup en publiant un disque live ? Chose qui n'était point arrivée depuis 1981 et Find the Crowd, resté à l'état de vinyle (même s'il y avait eu possibilité d'entendre des concerts de l'année 2009 enregistrés sur galette). Deux musiciens sur cinq, à part le chanteur donc, étaient déjà présents à cette lointaine époque, à savoir Phil Palmer et Geoffrey Richardson. Outre Jennifer (anciennement Ian) Maidman, autre présence de longue date, on trouve deux nouveaux accompagnateurs, Ally McDougal (qui co-produit l'album), Harry Fausing Smith (TRAVELLING B AND) et d'une choriste, Chloe Foy, artiste folk anglaise elle aussi.

Ce qui est très fort, c'est que le spectacle, pris sur diverses dates françaises dont Alençon, est en deux parties, et que l'une d'elles est entièrement réservée à un album joué dans son intégralité. Pas le moins connu de Murray HEAD, certes, mais qui fait encore cela de nos jours, à part les groupes de rock progressif ? Say It Ain't So, donc, bijou en pop-folk de l'année 1975, est ici totalement représenté et dans l'ordre s'il vous plaît, mis à part le tube éponyme, introduction au départ, qui ici termine l'album après un long et splendide voyage. Commencer par "Boy on the Bridge", soft-rock plaintif aux nappes ARP de Maidman et au solo guitare très fin de Palmer, est une idée si chic, tout comme l'aspect un peu plus rock sudiste encore du rugueux "She's Such a Drag", avec une montée de choeurs centrale encore plus travaillée.

Avec ses six musiciens, Murray HEAD colle au plus près des arrangements d'époque sur l'album d'origine tout en se réservant quelques subtilités. Si Geoffrey Richardson, brillant musicien qui a tant fait de prouesses depuis les 70's progressives justement, se laisse aller pour la première fois à jouer de la clarinette sur la reprise "Someone's Rockin' My Dreamboat", la fanfare est remplacée par le saxophone de Harry Fausing Smith, qu'on ne réentend pas avant le deuxième CD du live. Le plus émouvant demeure le solo d'alto par Richardson sur "Never Even Thought", perle sentimentale étirée à sept minutes de toute beauté, y compris certains couplets ici moins binaires que valsés. "Boats Away" tout comme "Silence is a Strong Reply" transpirent de classe comme de slide guitares, de steel drums et autres éléments appelant le soleil et la mer à peu près partout en France.

Le chanteur fait participer le public dès que possible, en communion, même si on se régale davantage de celle avec les musiciens-choristes sur "Don't Forget Him Now" (et ce piano électrique par Maidman, miam !). Il a beau ne plus pouvoir atteindre les cimes vocales de sa jeunesse, ne pas éviter quelques couacs (âge, aléas du direct), le timbre reste toujours aussi beau. Et c'est bien ce que l'on retient au milieu de toutes ces mélodies superbes, "You're So Tasty", duo femme-homme toujours aussi suave et distingué en tête, mais aussi et surtout "When I'm Yours". La quintessence de la folk galante à l'anglo-saxonne, de l'arpège en picking matiné de piano Fender Rhodes, elle est là, avec toujours un solo de guitare tirant vers l'andalou assez fantastique. Que dire alors du tube, "Say It Ain't So Joe", la carte de visite de Murray HEAD, dans une montée live intense et aussi fluide voire plus que lors du live de 81, avec toujours cet esprit à la Voices (l'album) ? Merci, cher artiste.

Le deuxième CD n'est pas moins dénué d'attraits, même s'il faut bien reconnaître que "One Night in Bangkok" (1984), le deuxième et dernier grand hit de Murray HEAD sous son nom, n'est là que pour faire plaisir à une partie du public, sans mégaphone au chant mais avec ses bandes préenregistrées qui ne gagnent réellement que le sax de Fausing Smith, et encore. On l'entend plus longuement et loquacement sur "Joey's on Fire" et "Countryman", avec une préférence pour ce dernier par son solo plus folk. Ce qui est sûr, c'est que ces titres peu connus du grand public ont été prélevés pour montrer une autre facette de HEAD, permettre aux musiciens de se lâcher, notamment McDougal au milieu des choeurs et des claps.

Ce dernier critère prend carrément une tournure africaine pour la très belle "No Mystery", inédite sur album, que HEAD avait créée pour le film Pour Cent Briques, T'as Plus Rien d'Eduardo Molinaro en 1982. Cette récréation folk-reggae soft entre Kenya et Antilles, violon et mandoline en prime, introduit joliment un deuxième CD qui se veut simplement plus dansant, permettant au public de remuer après la partie Say It Ain't So, comme le chanteur le lui fait remarquer avec ironie. À noter que mis à part le second tube, ce deuxième CD n'est rempli que de titres faisant huit à douze minutes ! Dansant mais intelligent, à l'image de "Corporation Corridors", autre extrait de Shade (1983, comme "Joey's on Fire"), sans doute le meilleur morceau de Murray HEAD en la matière, terriblement chaleureux et groovy, au point que Maidman surprend plus qu'agréablement tout le monde avec un long solo de basse dantesque, quelques intentions un peu plus metalliques aussi.

En somme, et à part le rappel irrémédiablement factice, voilà un disque qui devrait ne pas être écouté seulement par les vieux de la vieille, au contraire, si tout allait bien à propos de la conjoncture. Musicalement, clairement, c'est une autre époque, et c'est ça qui rend Say It Ain't So – Live! plus précieux.

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   MARCO STIVELL

 
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- Murray Head (chant, guitare)
- Chloe Foy (choeurs, chant)
- Phil Palmer (guitares lead, choeurs)
- Jennifer Maidman (basse, claviers, choeurs)
- Ally Mcdougal (batterie, percussions, choeurs)
- Harry Fausing Smith (saxophone ténor, violon, guitare, basse,)
- Geoffrey Richardson (alto, mandoline, clarinette, whistle, gu)


1. Boy On The Bridge
2. Boats Away
3. When I'm Yours
4. Someone's Rockin' My Dreamboat
5. She's Such A Drag
6. Never Even Thought
7. Silence Is A Strong Reply
8. Don't Forget Him Now
9. You're So Tasty
10. Say It Ain't So Joe

1. No Mystery
2. Corporation Corridors
3. Countryman
4. Joey's On Fire
5. One Night In Bangkok



             



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