The Long Run fut accueilli de manière tiède par les critiques. À vrai dire, même le groupe s’avérait sceptique concernant sa dernière offrande, Don HENLEY ne pensant pas que cela constitue un bon disque. Seul Rolling Stone se montra dithyrambique, une relative surprise en comparaison avec ses avis précédents plus nuancés, évoquant une évocation glaçante et tout à la fois brillante de la nuit hollywoodienne.

En ce début de décennie 80, l’entité EAGLES ne tenait plus qu'à un fil. À l’épuisement général, s’ajoutait la pression croissante dévolue à un groupe devenu mastodonte depuis la publication d’Hotel California, tout cela sans compter les drogues qui augmentaient paranoïa et incommunicabilité grandissante entre ses membres. Mais au lieu de lever le pied, ces derniers choisirent de continuer à accélérer, mettant sur pied une gigantesque tournée de promotion où l’ambiance générale était souvent glaciale sauf en concert où le change était remarquablement donné. Jusqu’à cette soirée californienne de juillet 1980 où le trop plein explosa.

Connu dans la mythologie du groupe sous le nom de Long Night at Wrong Beach soit Longue Nuit sur la Mauvaise Plage, le spectacle de bienfaisance supportant la campagne de réélection du sénateur démocrate de Californie Alan Cranston à Long Beach scella la destinée des EAGLES. Point culminant des frustrations accumulées au fil des ans, cette journée voit Don Felder et Glenn Frey monter lentement en température, le premier n’étant pas enthousiasmé par cette représentation, en général méfiant à l’égard des hommes politiques, et l’affichant ostensiblement, y compris lors de sa rencontre avec le sénateur. Sur scène, les échanges se tendent encore, alimentés par l’alcool et les insultes, d’ailleurs enregistrés par Bill Szymczyk. Les deux hommes n’iront pas jusqu’à la confrontation physique, mais l’incompréhension atteint ici un point de non-retour qui sera entériné seulement deux ans plus tard via leur manager Irving Azoff, lors d’une interview.

Entre-temps, le testament discographique – finalement provisoire alors qu’on le pensait définitif – des EAGLES sortait, peu après l’incident s’étant produit à Long Beach.

Eagles Live, double album… live et dernier du contrat passé avec Asylum, compilait tous les plus grands hits enregistrés sur différentes scènes californiennes entre 1976 et 1980. On retrouve ainsi selon le morceau soit Randy Meisner soit Timothy B. Schmit à la basse. Sinon, pas de surprise véritable de la part d’un groupe réputé pour reproduire fidèlement et sans fioritures sur scène son répertoire, à fortiori quand celui-ci est peaufiné ensuite à l’extrême par chaque musicien de son côté en studio.

On note tout de même la présence inédite sur disque d’une reprise de Steve YOUNG "Seven Bridges Road" qui nous rappelle pourquoi les harmonies vocales des EAGLES étaient parmi les plus belles du circuit ainsi que deux morceaux écrits par Joe WALSH, "All Night Long" seul rescapé du concert à Long Beach et "Life’s Been Good", reggae-rock longue-durée de plutôt bonne tenue et agrémenté d’un synthé. L’artwork choisi pour illustrer Eagles Live s’avère sincère sur la suite des événements, affichant un 86 issu de la restauration signifiant qu’un plat n’est plus disponible à la carte.

Une double plaque non dénuée d’intérêt mais toutefois à réserver aux fans les plus hardcore du groupe californien.