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NEW-AGE/AMBIENT  |  STUDIO

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- Style : Eno Moebius Roedelius, Terry Riley , Steve Roach
- Membre : Roxy Music, Jon Hassell , Quiet Sun, Jon Hassell / Brian Eno , Brian Eno & David Byrne, David Bowie , Eno/cale, Robert Wyatt
- Style + Membre : Roger Eno , 801, Harold Budd & Brian Eno, Cluster, Harmonia, Laraaji, Fripp & Eno, Roger Eno & Brian Eno

Brian ENO - Foreverandevernomore (2022)
Par AIGLE BLANC le 4 Juillet 2023          Consultée 1144 fois

Brian ENO se définit lui-même comme non musicien, assertion pour le moins paradoxale venant d'un artiste jouissant d'une telle renommée dans la sphère musicale. Doté d'une palette de talents à multi-facettes, il débuta en effet comme clavier de ROXY MUSIC, le groupe millésimé de Brian FERRY, poste qui eût suffi à lui assurer une place pérenne dans l'histoire de la musique populaire du 20ème siècle ; il s'est affirmé également comme un grand producteur-arrangeur au service d'artistes ou groupes d'obédience internationale tels David BOWIE, avec qui il signa la fameuse trilogie berlinoise -Low / Heroes / Lodger, ou U2 dont il produisit l'acclamé The Joshua Tree, auxquels s'ajoutent TALKING HEAD, JAMES, COLDPLAY, John CALE, ULTRAVOX etc. Comparativement à ses travaux de producteur, sa carrière solo demeure quantitativement plutôt modeste, sans être insignifiante pour autant.

Brian ENO est avant tout un artiste conceptuel, toujours à la pointe de l'avant-garde, par conséquent jamais bien loin de l'expérimentation. Il semble être le concepteur de la 'musique ambient', style qui se caractérise par sa faculté à se fondre dans l'environnement atmosphérique de l'auditeur et à ne pas exiger une écoute forcément attentive. Il n'est pas interdit selon ce principe que la musique ambient s'efface derrière l'écran des pensées et sensations de l'auditeur, jusqu'à atteindre une forme d'invisibilité, ou de silence subliminal. S'il en verbalise la définition, il n'est pas le premier à explorer de telles pistes musicales. On peut en dénicher les prémices dans les travaux de l'école berlinoise représentée par TANGERINE DREAM (Phaedra, 1974), Klaus SCHULZE (Picture Music, 1973), ASH-RA TEMPEL (face B de l'album éponyme), et même dans l'étonnant titre "La Création du Monde" extrait de la Bande Originale de la série animalière L'apocalypse des animaux (1973) composée par VANGELIS. Fort de cette découverte, Brian ENO a produit la quadrilogie 'Ambient' (Music For Airport, 1978 / The Plateaux of Mirror, 1980 / Day of Radiance, 1980 / On Land, 1982) dont chaque volet expose un aspect de ce style musical ne s'appuyant sur aucune assise rythmique.

C'est dans ses nombreuses et diverses collaborations, avec le groupe allemand CLUSTER (After the Heat, 1978), avec Robert FRIPP (No Pussyfooting, 1973), David BYRNE (My Life In the Bush of Ghosts, 1981), John HASSEL (Possible Music, 1980), John CALE (Wrong Way Up, 1990), Harold BUDD (The Pearl, 1984) que son apport comme arrangeur et concepteur s'avère le plus déterminant. Ainsi, l'étonnant My Life In the Bush of Ghosts, qu'il signe avec David Byrne, passe pour le premier album pré hi-hop à user de voix samplées à la télévision ou à la radio. Le résultat, s'il a quelque peu vieilli depuis, reste des plus novateurs quand on le resitue dans son contexte historique.

Quant à sa carrière solo, des albums référentiels l'émaillent, jusqu'en 1985 : Music For Airport où Brian ENO inaugure ('Ambient 1') sa conception de l'ambient music' en élaborant la musique idéale à diffuser dans les aéroports ; Apollo où il recrée, avec l'aide de son frère Roger ENO et de son ami Daniel LANOIS, la bande-son idéale de la mission Apollo sensée transcrire musicalement la sensation d'apesanteur ressentie par l'astronaute en orbite stellaire ; sans oublier Thusday Afternoon où il pousse dans ses derniers retranchements les limites de la musique ambient tout en exploitant de façon inédite le format du nouveau CD apparu en cette année 1985, et qui autorise, par sa capacité de contenance alors inédite, à livrer une seule composition d'une heure, sans la coupe artificielle du vinyle à devoir retourner à la fin de la face. Forts de cette nouvelle possibilité, d'autres artistes comme Klaus SCHULZE (Virtual Outback) ou Jean-Michel JARRE ("En attendant Cousteau") n'ont pas manqué de proposer une composition occupant l'espace intégral du CD, soit autour de 60 minutes, sans pousser autant que Steve ROACH (le roi de l'ambient) les limites du CD, en alignant les albums de 74 minutes constitués d'un titre unique, la série Immersion notamment.

Comme le fait remarquer notre cher confrère Waltersmoke, il y a bien longtemps qu'un nouvel opus de Brian ENO ne constitue plus en soi un événement. L'artiste poursuit en effet une carrière discrète mais assez productive en définitive, caractérisée par une liberté totale que favorise l'absence de toute démarche commerciale ostentatoire, dans le sens où ses travaux ne visent nullement l'approbation ni ne répondent aux attentes du public. Si bien des groupes ou musiciens pourraient lui envier cette liberté, cela ne rend pas forcément meilleure la musique qu'il propose depuis ces vingt dernières années. Sa carrière semble dictée par le hasard : quand un album d'ambient pur a vu le jour, il n'est pas rare alors que le suivant explore des voies plus rythmiques, voire technoïdes. Sans crier gare, il peut même livrer un opus chanté flirtant avec la pop de ses débuts. Mais quel que soit le style ou le genre abordé, le résultat hélas s'avère la plupart du temps 'routinier', 'anecdotique', plus ou moins 'passéiste' dans la mesure où l'artiste a cessé d'explorer des territoires vierges, se contentant d'exploiter des recettes qu'il est l'un des rares, il est vrai, à si bien maîtriser.

ForeverAndEverNoMore bénéficie de l'habituelle production de Brian ENO, à la fois soyeuse, éthérée et précise, signature caractéristique d'un expert du son et des techniques d'enregistrement, qui invite l'auditeur à une véritable expérience immersive, grave, mystérieuse et introspective, inspirée par les sentiments que suscitent à l'artiste ses inquiétudes liées au devenir de notre planète. Que ceux qui craindraient l'étalage d'un discours moralisateur voire culpabilisant se rassurent, l'album ressemble davantage à un journal intime à qui Brian ENO confierait ses humeurs, élégiaques et mélancoliques. Inutile donc de chercher dans les 10 compositions qui en constituent le programme la moindre invitation à danser ou à susciter le bien-être. Il est préférable, pour appréhender positivement cet opus, de ne pas être réfractaire aux musiques sombres et a-rythmiques ni aux atmosphères languides et neurasthéniques dont le caractère anxiogène culmine dans le conclusif "Making Gardens Out of Silence In the Uncanny Valley", aux 13 minutes réactivant les textures sonores abstraites et atmosphères étranges de On Land (1982), quatrième et meilleur volet de son illustre série 'Ambient'.

La surprise, cette fois, provient du retour inattendu au chant de Brian ENO dont la voix grave évoque, par moments, celle de Dave Gahan (en atteste "Garden of Stars") ou, plus surprenant encore, l'élégant baryton de Brendan Perry, le magnifique troubadour-philosophe, pourtant tellement sous-estimé, du génial DEAD CAN DANCE, comme cela s'entend dans l'émouvant et recueilli "There Were Bells" (l'un des plus beaux de cette livraison). Que Brian ENO ne soit pas plus chanteur que Mike OLDFIELD, cela ne nous dispense pas de reconnaître qu'il réussit ici une jolie performance qui, à défaut d'être exceptionnelle, s'avère un peu plus qu'honnête. Il est parfois accompagné au chant de sa fille Darla Eno ("Let It In" et "I'm Hardly Me"), ou de sa nièce Cecily Eno ("Garden of Stars"), quand ce n'est pas à celles des irlandaise Clodagh Simonds ("These Small Noises") ou japonaise Kyoko Inatome, cette dernière assumant seule l'intégralité des vocaux auto-tunés du dernier mouvement précédemment évoqué, de loin le plus expérimental.

L'album ne se résume pas pour autant à un simple recueil de chansons : les voix, nimbées d'un écho leur conférant un aspect fantomatique, sont traitées alternativement comme un instrument parmi d'autres ou un effet spécial. Par ailleurs, significativement, aucun titre n'est construit sur le binôme couplet/refrain. Le traitement des voix, et la place importante attribuée aux nombreux passages instrumentaux, fait ressembler l'album à un recueil de poèmes mis en musique, ce qui lui confère une prégnante solennité.

L'album cependant ne convainc que sporadiquement : pris isolément, chaque titre est bon, mais leur enchaînement, surtout celui des 3 premiers ("Who Gives a Thought", "We Let It In" et "Icarus of Blériot"), provoque une terrible lassitude, à cause notamment de leur trop proche structure formelle qui rend difficile leur différenciation, ennui qu'aggrave leur a-rythmie chronique et leur solennité parfois trop marquée. Les meilleurs passages sont en même temps les plus émouvants ("There Were Bells") ou ceux qui ne craignent pas de plonger dans l'expérimentation ("Garden of Stars" et l'impressionnant titre conclusif). C'est alors que pour l'auditeur attentif quelque chose d'intéressant se passe.

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   AIGLE BLANC

 
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- Brian Eno (chant)
- Darla Eno (chant)
- Cecily Eno (chant)
- Clodagh Simonds (chant)
- Kyoto Inatome (voix)
- Leo Abrahams (guitare)
- Roger Eno (accodéon,)
- John Hopkins (claviers - titre 9)
- Peter Chilvers (claviers - titre 4)
- Marina Moore (violon et alto)


1. Who Gives A Thought
2. Let It In
3. Icaria Of Blériot
4. Garden Of Stars
5. Inclusion
6. There Were Bells
7. Sherry
8. I'm Hardly Me
9. These Small Noises
10. Making Garden Out Of Silence In The Uncanny Valley



             



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