Maintenant que notre Brian est bien installé avec son big band des familles au top du swing du 21ème siècle, nous voilà prêts à tenter de nouvelles expériences. Vous imaginez bien que notre matou blondin ne va pas en rester là, ce serait faire fi de son attrait pour les défis. Alors, voyez donc cette photo de couverture, rien moins que le Brian SETZER la pompadour moins volumineuse mais en léopard au beau milieu d’un aréopage des plus grands compositeurs classiques de l’histoire. Oui, Brian s’attaque au répertoire classique, qui plus est à Minneapolis, au milieu du midwest US, ça, c’est subversif ! Nous sommes en 2007 et Brian a désormais 49 ans, l’âge de réaliser ses rêves.

Reprendre Ludwig BEETHOVEN en swing, voilà qui pourrait en boucher un coin à pas mal ! Le pari est plus qu’audacieux. Nous voici donc avec une 5ème symphonie revisitée par notre cher Brian. Ca s’intitule "Take The 5th" et c’est surprenant. Impossible de s’aligner sur l’originale, mais l’instant est étonnant. On reconnaît les mélodies et Brian laisse sa grestch faire la discussion. MOZART ne renaît pas si mal dans cette resucée de "la petite musique de nuit". C’est "Wolfgang’s Big Night Out" et c’est la guitare qui tricote dans tous les sens. C’est probablement un peu réducteur pour le génial Autrichien. Nous avons un mix de WAGNER et de MENDELSSOHN pour ce "Here Comes The Broad" et la sauce prend super bien, on s’y croirait carrément. La gretsch tressaute et les cuivres tiennent la baraque avec maestria.

Si vous lisez F.P, vous savez comment je considère GRIEG et son légendaire Peer Gynt "One More Night With You", Brian a choisi de la reprendre avec des lyrics et le résultat est tout à fait passionnant. Impossible de retranscrire la puissance du titre en mode swing mais son aspect bombastique prend tout son essor avec cette nouvelle proposition orchestrative qui laisse deviner quelques penchants pour MOONDOG de la part du grateux new yorkais. Une petite merveille. Les guitaristes aiment reprendre la "Lettre à Elise", on se souvient de Wolf HOFFMAN avec ACCEPT et "Metal Heart". C’est cette fois un violon à la Stephane GRAPELLI qui accompagne le matou dans les méandres de ce "For Lisa" ainsi transformé en jazz manouche.

"Honey Man", c’est RIMSKY KHORSAKOV et son "Vol du Bourdon". Nous avions déjà Joey de Maio de MANOWAR et son solo de basse idoine ; voici Brian et sa Gretsch, c’est bien sûr plus écoutable, à grands renfort de cuivres et de backing vocaux. C’est efficace et très sympa. On reste avec ROSSINI et MANOWAR puisque Joey de Maio avait aussi repris le fameux "William’s Tale". Cette fois, ça se nomme "Swingin Willie" et on va tenter de lancer la flèche dans la pomme. Il manque sans doute d’une certaine dynamique effacée au profit d’un smooth rigolo pour les forêts suisses. L‘époumonante "Danse du sabre" de KHATCHATURIAN reste la "Sabre Dance" avec Brian qui choisit de donner une rythmique très punky au titre exotique. Cette fois, le choix s’est orienté vers l’agressivité.

Nous voici à Paris en pleine opérette avec OFFENBACH et son "Orphée", ça donne "Yes We Can Can" et cela se marie fort bien avec le swing des années 40 défendu par Brian. La logique est respectée avec une fin en forme de "Smoke On The Water". Une tonne de percussions introduit le "1812 Overdrive" de TCHAIKOVSKY, c’est un brin pompier. Sacré Brian ! Il se fout de notre gueule en appelant "Le grand Danube Bleu" de STRAUSS, un "Some River In Europe". Ces Américains… Aucun respect ! Ce n’est d’ailleurs pas le morceau le plus réussi. Et il continue en nommant "Take A Break Guys" le magnifique cantique "God Rest Merry All You Gentlemen" - un traditionnel grand breton -. Le titre est cependant taillé pour la guitare et le résultat est à la hauteur. Mr SETZER parvient à le faire sien avec beaucoup d’aplomb.

C’est la bataille des puristes contre les rebelles, tout ça ! Il y a à boire et à manger avec notre cher Brian qui s’en est clairement donné à coeur joie et s’est bien éclaté à reprendre les plus grands noms du classique en ne se prenant pas au sérieux, comme il le fait depuis toujours. Soyons justes et reconnaissons au guitariste chanteur des STRAY CATS l’invraisemblable culot de l’avoir fait. Ce garçon est admirable à bien des égards. Le disque n’obtient pas le succès espéré, une petite 160ème place au billboard, mais cela n’empêche pas Brian de tourner à donf jusqu’à la mort. Quand à moi, je trouve que certains instants de gloire jouxtent certains plus inconsistants, c'est donc un trois sans saveur pour ce projet qui mérite cependant une écoute attentive.