Ah, cet album se démarque bien avec son beau collage photo signé Hypgnosis, où une femme nue et casquée semble flotter en impesanteur à côté d’une voiture au milieu d’un désert rocailleux. Didier MAROUANI est déjà dans le game du Disco avec son premier album à succès, mais ne perd pas son temps et lui donne un successeur seulement huit mois plus tard.

Bien que la patte sonore et musicale de Didier MAROUANI déjà affirmée sur Magic Fly (1977) soit encore prégnante sur Deliverance, les leads syncopés et nappes sous Flanger sont toujours de la partie. Force est de reconnaître que sur plusieurs morceaux de l’album, le groupe opte pour une production plus dépouillée : le son d’ensemble est plus aéré, la batterie n’est plus compressée en un beat désincarné (ce n’est pas péjoratif) comme sur "Fasten Seat Belt" ou "Magic Fly".

Les chansons, cette fois-ci au nombre de deux, encadrent l’album. "Prison" ouvre les hostilités de manière assez excellente, avec un très bel équilibre entre le thème en mode mineur et le refrain majeur enrichi de chœurs grandiloquents. Là où les paroles de "Carry On, Turn Me On" tenaient en quatre lignes, "Prison" et "Deliverance" contiennent de véritables paroles sur plusieurs couplets, même si ceux de "Prison" sont répétés deux fois à l’identique. Madeline Bell s’y montre une fois de plus exemplaire, plus dynamique que sur "Carry On, Turn Me On" et en donnant la réplique aux chœurs de la chanson-titre. Malgré ces chœurs rébarbatifs et un peu envahissants, "Deliverance" finit par convaincre grâce à une montée en intensité réussie.

Le gros problème de l’album, ce sont les deux ballades qui occupent le centre de chaque face. Autant pour le premier album, ça passait à peu près, autant avec celui-ci, douze minutes cumulées, aoutch ! Pour ainsi dire, "Let Me Know The Wonder" et "Baby’s Paradise" versent dans la variété pure et dure, cordes électroniques et accords de piano à l’appui. Que les compos soient instrumentales ne changent rien à l’affaire : c’est la musique électronique des années 1970 dans son penchant le plus facile, sirupeux et ennuyeux. Les thèmes sont pauvres mais artificiellement allongés par de la déroulade mélodique. "Let Me Know The Wonder" est assurément le pire des deux, interminable et plombé par des chœurs assez ridicules – le péché mignon de Didier MAROUANI.

Les deux morceaux centraux, plus courts, sont les singles synth-pop de service, présentant un son d’ensemble plus compact et compressé et marquent le retour des beats Disco. Oui, ce disque est vraiment construit de manière symétrique. Pour le coup, "Air Force" et "Running In The City" sont de la même trempe que "Magic Fly", voire "Fasten Seat Belt" et "Tango In Space", ce qui ne les empêche pas d’être tout à fait réussis dans ce style Disco électronique.

Mon constat global reste mitigé du fait d’un excès de zèle dans les ballades de la part de Didier MAROUANI, un problème qui malheureusement nous tiendra en haleine jusqu’au bout. SPACE s’est clairement défini une recette musicale, sans toutefois pondre une copie carbone de Magic Fly. Le groupe ne parviendra malgré tout jamais à égaler le succès commercial de son premier album.

P.S.: Certaines rééditions CD de cet album contiennent en piste bonus un "Love Theme" assez nullissime, s’agissant en fait de "Lover’s Song (Part Two)" issue de Le Gagnant (1979), seconde bande originale de Didier MAROUANI en solo.