Artiste prolifique presqu’autant en musique qu’en scandales, Chris BROWN en est déjà à son onzième album, sorti cet automne 2023 sous le nom très recherché 11:11. Le chanteur aurait-il perdu toute inspiration après presque vingt ans de carrière ? Ou est-il simplement devenu fan de numérologie et de synchronicités ? On penchera sur un mix des deux même si BROWN tente de nous faire avaler la deuxième option avec sa pochette où il tente d’y personifier les chakras par les couleurs. Tout un concept pour le chanteur qui voit ses ventes dégringoler en chute libre depuis quelques années déjà. Bref, on ne sait pas trop ce qu’il a fumé mais comme nous aussi on peut planer avec de la bonne, on manifestera de toutes les fibres de notre corps un chef d’oeuvre auditif à défaut d’un visuel qui vaut le détour.

11:11 est un double album, comme Chris nous y a habitué dans ses dernières sorties, et on pourra l’entendre scander ce titre sur la jolie guitare de la piste d’ouverture "Angel Numbers/Ten Toes". C’est du r’n’b classique où le piano et les éléments électroniques viennent tenir l’ensemble, il faudra bien ça pour retenir un Chris Brown à moitié dans les nuages en train de flotter, et à moitié les pieds sur terre, avec ses dix orteils bien scotchés au sol (Baby can you make a wish for me?/Healing energy on me/When it’s 11:11, I need it).

Le single "Sensational" en featuring avec les chanteurs nigériens DAVIDO et LOJAY met à l’honneur les rythmes africains qui peuplent les ondes dernièrement, et c’est exactement le même processus sur le titre aux influences des îles "Nightmares", un single lui aussi où le chanteur va raconter la vie d’un mec dépressif visiblement en recherche de street créd. Ca se laisse écouter, alors on prend puisqu’il faut bien essayer de voir le positif dans tout.

Bon, à part ça, devinez quoi ? Bien sûr que le chanteur de 34 ans suit la tendance du moment, vous croyez quoi ? Donc la tendance, si on a bien suivi, elle nous emmène vers les vibes dancehall des pistes "Very Special", très chiante avec son autotune et ses penchants côté techno qui donnent mal au crâne, ou le duo "No One Else" où se retrouvent notre Chris et le chanteur FRIDAYY autour d’une petite guitare sympa… mais franchement les grésillements de l’autotune commencent sérieusement à déglinguer la positive attitude qui nous tenait jusqu’alors.

Heureusement, il y a bien quelques chansons en mode r’n’b atmosphériques qui passent plutôt bien comme "Press Me", "Messed Up" et "Shooter" (merci le sample de "Ubaba Ulala Nami", encore un son africain qui a fait le buzz en ligne), car sinon il faut se taper les chialantes "Best Ever", "Feel Something" et "Moonlight". Pour le reste, le deuxième disque est principalement peuplé de tracks r’n’b classiques à souhait ("Need A Friend", "Stutter", "Feelings Don’t Lie", "Red Flags", "Closer" ou le single "That’s On You" en featuring avec le rappeur FUTURE). Je continue mais franchement rien de très neuf et rien d’exceptionnel à en dire, si ce n’est un mini détour aux inspirations dance sur "Midnight Freak" où le fuckboy - encore un - tente de pécho à grand renfort de poésie (You like it when I beat, beat, beat/Pretty girl, what a midnight freak/I know you need a nigga like me/Nobody but you and me/I’m a beast with the beauty in the sheets).

Trop d’autotune tue l’autotune sur "Make Up Your Mind", on croirait presque que BROWN est en manque de cul puisqu’il n’a pas trop l’air de vouloir penser à autre chose qu’une prose tout en finesse, sur "Bouncing/G5" par exemple (She make it clap, it be bouncin’/Bouncin’, bouncin’, bouncin’, bouncin’/And she be wet like a fountain) ou sur "Views" (Girl you ride like a pro, ain’t your first rodeo). Le fuckboy oublie l’harmonie des chakras et se concentre sur son chakra sacré uniquement dans "Summer Too Hot" où il chantera son oppressant désir au gré d’une instru qui bounce presque autant que le boule qu’il a dans le viseur (Summer too hot, had to double up/Shawty too fire with the bubble butt).

Bref vous avez capté les bails je présume ? Chris BROWN tente de se racheter une conscience avec 11:11, album qu’il semble concevoir telle une (trop) longue heure de développement personnel… oui, l’intention est là mais bon, ça ne vaut guère mieux qu’un 1,5 dans les bons jours (vous savez, ces jours où tous vos chakras sont débloqués), et puis vous connaissez l’expression : chassez un fuckboy, il revient au galop !