Les deux doigts dans la prise (1992) est un album live assez exceptionnel dans lequel LES SHERIFF exécutent pas moins de trente-et-un titres en soixante-dix minutes. Le tout sans aucun temps mort et avec une coloration Punk Rock sans faille. Un incontournable !
Après plus de trente années, et après un retour très réussi, le groupe nous revient avec ce troisième album live, Près du chaos.

Premier constat, le disque ne contient 'que' quatorze titres, pour une durée de quarante minutes. Quarante, comme quarante années de carrière, quarante comme le nombre de concerts donnés lors de leur dernière tournée.
Second constat, l’orientation légèrement plus Métal/Hard-Rock, déjà ressentie dans Grand bombardement tardif, est ici bien tangible. C’est aussi pêchu et rentre-dedans, mais le son plus massif et la batterie plus lourde et constante. Le parallèle avec MOTORHEAD pourrait être fait, d’autant que l’entame du concert a tout de l’hommage : le traditionnel We are Motorhead and we play rock ‘n Roll étant ici remplacé par On est les Sheriff et on vient de Montpellier.
Cette évolution est certainement due au fait que plus de la moitié des morceaux présentés sont issus de ce dernier album, le groupe faisant l’impasse totale sur la période Le grand, le maigre, le petit... (1989), Du goudron et des plumes (1991) et Allegro Turbo (1995).
Clairement, le parti-pris semble être de ne pas faire doublon avec leurs deux précédent album live. aussi bien dans le style, dans le choix des morceaux, que dans la volonté de ne pas faire de reprises.
Le son est excellent et le groupe bastonne sévèrement. Il suffit de se prendre "Le temps est élastique" et "Du Rock ‘n Roll dans ma bagnole", deux titres récents, en pleine face pour en convenir sans hésitation. C’est massif, puissant et s’apparente à des uppercuts sans concession. Des adjectifs qui peuvent également s’appliquer aux morceaux plus mid-tempo comme c'est le cas de "Ma lumière". Il faut dire que la batterie, mixée très en avant, ne fait pas de quartier et impose sa force. Celle-ci pourrait toutefois faire preuve d’un peu plus de subtilité par moments. Clairement, la puissance et la régularité sont bien présentes, mais quelques variations et breaks ne seraient pas superflus.
Fidèle à leur réputation, les interventions d’Olivier entre les morceaux sont assez succinctes, LES SHERIFF s’y entendant pour enchaîner les morceaux sans faiblir.
Il est indéniables que les morceaux issus de Grand bombardement massif passent très bien le cap du live et confirment la bonne impression qu’a laissé cet album.
Au niveau du choix général des titres, un sujet toujours très subjectif et personnel, il n’y a pas de faute de goût et seul les choix de "Loin du chaos" et de "Pour le meilleur et pour le pire" ne me semblent pas forcément les plus judicieux. Quelques titres plus emblématiques ou avec une orientation un peu moins 'puissance directe' m’auraient semblé plus efficaces pour apporter un peu de fraîcheur à ce disque très massif (un adjectif qui vient en permanence à l’esprit lors de l’écoute de ces quatorze titres) et monolithique.

Moins marquant que Les deux doigts dans la prise et sa folie débridée, ce nouveau disque montre un groupe bien plus carré et sérieux. Et qui, de ce fait, met d’autres qualités en avant. L’humour, la dérision et une certaine candeur sont moins présents au profit d’une puissance et d’un professionnalisme indiscutables.
LES SHERIFF en 2024 ne sont plus LES SHERIFF du début des années 90, et si certains pourront le regretter, il y a, à mon sens, plutôt lieu de se réjouir que le groupe soit parvenu à évoluer et à acquérir une maturité lui permettant d’être toujours pertinent de nos jours. Est-ce que voir ses membres essayer de faire revivre la candeur, l’insouciance et la gentille naïveté de leur jeunesse à leur âge, serait vraiment judicieux ? J’ai la faiblesse de croire que ce serait un peu ridicule et qu’ils ont fait le bon choix. Même si cela chatouille un peu notre propension à la nostalgie.
Solide !
3.5/5