AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Un groupe bien établi et même, osons l’affirmer, mainstream catalogué dans la sphère Hard-Rock/Metal sort un film de concert entrecoupé de scènes de fiction ainsi insérées afin de consolider sa légende dans les têtes de ses fans ahuris, ça ne vous dit rien ? Si on se place du point de vue de Jimmy Page, on lâcherait une punch line à la Cloclo du type : 'c’est la même chanson !'. Car, oui, The Song Remains The Same.
Mais Page n’est peut-être pas si fan de GHOST, alors autant demander son avis à James Hetfield, lequel a démontré qu’il suivait nos Suédois avec le plus grand intérêt. Or, ce dernier te dirait un truc du genre: 'à travers le jamais' (Through The Never en V.O.). Ok James, je ne sais pas ce tu que as bu, mais ça ne signifie strictement rien toussa. Du coup Tobias Emeritus Forge nous lâche un 'ici et maintenant'’ auréolé d’un jeu de mot orthographique (Rite Here Rite Now pour right here right now) qui signifie qu’on assiste à la diffusion d’un rite cérémoniel comme déjà indiqué sur son précédent live, Ceremony And Devotion.
Afin d’illustrer le concert*, Tobias s’appuie sur le contenu des vidéos envoyées sur sa chaine YT où l’on suit les atermoiements et autres relations compliquées qui lient les membres du haut clergé dirigeant la contre église érigée depuis les balbutiements du projet. Copia semblait être sur la sellette (autant dire condamné à mourir) surtout que son comportement immature faisait l’objet de cinglantes remarques de la part de Sister Imperator, entre autres tristes sires. Sauf que TWIST !!! Ok, in french on dit 'coup de théâtre', mais ici on est dans une arène de concert sise à Los Angeles, au pays du twist donc. Parce que si on se doutait que Copia Emeritus IV était quelque part le bâtard sorti du ventre de Sister, imposé par elle à Papa Nihil qui avait vu sa progéniture se faire vitrifier par sa douce, on apprend désormais qu’en réalité (car le monde de GHOST est la réalité !) Copia est leur enfant à tous les deux. Oui, c’est pô cohérent mais où est la cohérence dans ce monde de m*rd* ?

D’ailleurs, le concert commence très fort passé l’instrumental introductif, puisque Papa Emeritus IV enfonce le clou sans attendre, délivrant "Kaisairion", "Rats" et "Faith", histoire de bien nous faire comprendre que nous sommes perdus : tous les empires finissent par s’écrouler, les épidémies mortelles se propagent sans crier gare, sans oublier la religion dont l’impact prolonge le désastre qui mène vers l’enfer. Et si le concert s’achève sur les chapeaux de roue avec un "Square Hammer" dont on ne se lasse pas, force est de constater que les messages sataniques se mettent en retrait à mesure que la réputation de GHOST (et aussi sa disco) progresse(nt). A priori on ne nous propose rien de joyeux, ni même d’un tantinet lumineux, dans le discours porté par Tobias, et pourtant…

Pourtant, ce concert est une authentique fête où les réactions du public Angeleno sont parfois mixées bien en avant au cours des morceaux. Ok, tout cela peut s’avérer être totalement ou plus sûrement partiellement artificiel surtout lorsqu’on sait ce que sont capables de faire les ingés sons en post-prod, on peut citer l’exemple du Alive II de KISS -une des références de Tobias- où l’on sent bien que les cris du public ont été ajoutés dans le mix de façon à singer l’ambiance d’un Live des BEATLES. Les spectateurs éructent pour l’arrivée du revenant Papa Nihil juste avant qu’il prenne le solo de sax sur "Miasma" et, chaque fois qu’il se passe un truc visuellement impactant, on attend de voir le DVD –quand il sortira- du film si on n’est pas allé au spectacle pendant la dernière tournée, sinon des tas de captages de piètre qualité sont dispo où vous savez et où on entend Tobias chanter archi faux le final de "Respite Of The Spitafield" tandis que sa choriste commet l'exploit de maintenir ses harmonies dans les clous. Mais cette fois, Tobias chante juste sur ce passage, overdub ? Probablement. Pour rebondir sur la prod’ de ce live, il n’est pas inutile de rappeler que Ceremony And Devotion a –on le sait depuis- fait l’objet de nombreux overdubs. Ce qui n’en fait pas pour autant un mauvais témoignage et on le considère ici comme un chouette best-of toujours aussi agréable à écouter.
Eh bien, figurez vous que Rite Here Rite Now entre parfaitement dans ce cadre, qu’il pourrait obtenir l’appellation Volume 2, d’autant qu’il ne comporte que trois doublons avec son prédécesseur**. Parmi les surprises, on a le droit à une version musique de chambre de "If You Have Ghosts", sur fond de piano et de violoncelles, moment délicieux pour un authentique interlude de Pop music. Issu de Impera, le morceau "Twenties" fait –enfin- son apparition sur les setlists et c’est une très bonne chose. Sur cette tournée pas moins de huit musiciens s’affairent derrière leur frontman (contre cinq auparavant), dont deux choristes féminines qui apportent un cachet reluisant à la musique et davantage évitent les samples de voix utilisés sur les tournées précédentes. La dernière piste est un titre inédit en studio que l’on doit à Papa Nihil et qui s’intitule in french :le futur est un pays étranger. Vaste sujet pour une affirmation qui mériterait une dissertation au bac philo, autrement moins abscond que, au hasard : A travers le jamais. Quoique. Surtout "The Future Is A Foreign Land" se révèle être un très bon titre sur la durée, typique de l’effet GHOST où on se dit d’abord bof puis pas si mal et qu’en fait c’est vraiment bon, mais où la différence avec les "Mary On A Cross" et "Kiss The Go-Goat" (ici dans des versions supérieures à leur copie en studio) est que sa prod’ se rapproche vraiment du son late 60’s dont il est censé provenir.

Ainsi, cette B.O. de film/concert s’inscrit dans les pas de Ceremony And Devotion, soit –comme évoqué plus avant- un best-of Live Vol.2 en rectifiant ce qui avait été pointé comme un manque il y a quelques années puisque image il y a. Certes, il fallait se précipiter au ciné car le film n’était programmé que sur trois jours et uniquement dans certains cinémas situés dans des grandes villes. On patientera pour la sortie sur support physique. Cinq chansons***, pourtant présentes dans le film, ont été écartées des supports audio, du coup on patientera -encore plus- impatiemment. Et comme on n’est pas avares en spoilers sur F.P, sachez que Sister Imperator y lâche son ultime souffle, ce qui a pour conséquence de propulser Copia Emeritus IV au poste ultime de Frater Imperator. Au dessus du pape qu’il est déjà même si les connaisseurs savent qu’il s’agit là d’un emploi précaire et surtout risqué. Mais désormais Tobias, ou plutôt Copia dispose des pleins pouvoirs. Question : n’était-ce pas déjà le cas depuis le début ?

* En réalité les titres furent captés au même endroit les 11 et 12 septembre 2023
** "Cirice","Absolution" et "Square Hammer"
*** "Con Clavi Con Dio", "Year Zero", "Ritual", "He Is" et "Mommy Dust"