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- Style : Les Croquants

Jacques BREL - Les Bigotes (1963)
Par EMMA le 31 Décembre 2024          Consultée 778 fois

En 1963, BREL est au sommet son art, ses succès tels que "Ne Me Quitte Pas", "Le Plat Pays" résonnent dans les cœurs et traversent largement les frontières. Adoré et adulé, considéré comme une idole, terme qu’il ne supporte pas et comparé à de grands poètes tels Rimbaud ou Verlaine il se dérobe à cette étiquette se considérant comme un artisan qui écrit ce qu’il a à dire. Il retourne en Belgique et fait figure de père et d’époux quelques jours par mois. Sa femme Miche reste son pilier. Elle gère d’ailleurs ses chansons alors qu’ils ont créé leur propre maison d’édition l’année précédente. Quand il n’est pas dans la maison familiale ou sur scène, il partage son temps avec son amante à Roquebrune, dans le sud.

Ce septième opus évoque très finement, derrière une grande ironie illustrée notamment par l’arrangement musical, l’univers si caractéristique de BREL, où chaque mot est chargé d’une dimension symbolique émotionnelle et sociale. Nous y voilà plongé dès les premières secondes de l’album titre "Les Bigotes". Dans le même style que "Les Flamandes" quelques années plus tôt, BREL nous entraine dans une satire mordante, sur un ton faussement léger, de la piété hypocrite. La musique contraste, légère, presque dansée, assez traditionnelle, entre percussions et accordéon. Comme en écho "La Parlote" clôt l’album sur un air carnavalesque que l’on retrouve régulièrement tout au long de l’album. Génie théâtral, dans l’exagération, presque grotesque, BREL module sa voix, et nous fait vivre la pièce passant du chant à une articulation presque parlée et mimée avec sarcasme. Dans un même style musical aux sonorités circulaires évoquant celles d’un cirque et renforçant un côté décalé, "Les Filles Et Les Chiens" livre une caricature provocante sur les attentes des relations humaines. Il juxtapose de manière cynique et légère à la fois les femmes et les chiens, poussant l’ironie à son extrême quitte à créer un malaise, provoquer et diviser. La comparaison fille/chien n’en reste pas moins rétrograde, pour l’époque actuelle tout du moins. De toute façon, on le sait, BREL se méfie des filles. Il le rappelle d’ailleurs une nouvelle fois avec "La Fanette", où il chante son amour pour une femme qu’il va perdre. Très narrative, l’alternance entre de petits couplets mineurs sombres et nostalgiques et des refrains majeurs soutenus par un accordéon qui apporte une touche d’espoir rappellent une musique de film.

Très dénonciateur, "Les Fenêtres" est une évidente personnification de la fenêtre témoin de nos vies, symbolisant le regard sur la vie de l’autre. Dans la continuité, "Les Toros" pointe du doigt les corridas. Sur une orchestration rythmée, presque martiale, il évoque une certaine dualité entre la fascination morbide qui entourent ce genre d’évènement et la répulsion d’utiliser la faiblesse des autres pour se sentir fort.

Œuvre inévitable et poignante du répertoire de BREL, il écrit "Les Vieux" alors qu’il est très touché par la maladie de sa mère et dresse un portrait, comme il sait si justement le faire, d’un réalisme brut, effrayant et émouvant de l’universelle vieillesse. Trois couplets, de longs vers comme le temps qui passe, un refrain, un tempo lent soutenu par le piano, l’accordéon et le xylophone illustrant les mouvements inéluctable d’une horloge. L’ajout d’instruments ici et là intensifie la mélancolie et transforme "Les Vieux" en une célèbre pièce d’une justesse tristement irréprochable. Et, parlant du temps qui passe, au cœur de ce tourbillon arrive "J’aimais" comme parenthèse de douceur. Malgré son immense succès et ses innombrables tournées, BREL continue à se produire dans des villages reculés cherchant à fuir l’idée d’un rendement de l’industrie musicale et le matérialisme et c’est un peu ce qu’il chante nostalgiquement en opposant implicitement la superficialité du présent aux choses simples et authentiques qu’il chérit.

Encore et toujours accompagné de François Rauber et son orchestre, BREL propose un septième album très dans l’ironie, assez complexe, aux paroles bien plus profondes qu’elles n’y paraissent. Le comique de situation appuyé par un arrangement musical quasi carnavalesque dissimule la tragédie transformant ces huit titres en une pièce burlesque au service d’une réflexion sur la condition humaine. BREL se démarque encore davantage et n’en finit pas de marier les mots dans une virtuosité rare et envoutante avec une force interprétative grandiose à se demander où sont ses limites.

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1. Les Bigotes
2. Les Vieux
3. Les Fenêtres
4. Les Toros
5. La Fanette
6. Les Filles Et Les Chiens
7. J'aimais
8. La Parlote



             



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