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VARIÉTÉ FRANÇAISE  |  STUDIO

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- Style : Les Croquants

Jacques BREL - Les Marquises (1977)
Par EMMA le 8 Février 2025          Consultée 1477 fois

Neuf ans se sont écoulées depuis le dernier album de BREL. Après s’être plongé dans le 7ème art et le théâtre il part pour un tour du monde à bord de son voilier avec l’une de ses filles et sa nouvelle amante. Malade, il subira une opération qui lui coûte un poumon et se sachant condamné, il poursuit les vagues jusqu’aux îles Marquises, avec sa compagne. Il ne reverra ni ses filles, ni sa femme, Miche. Mais il n’a pas fini, il n’a pas encore tout dit, alors, loin des regards médiatiques, il écrit Les Marquises. Parce qu’en France, personne ne l’a oublié, à sa sortie, le succès est immense et l’album se place en tête des ventes et se verra disque d’or en 1978 et disque de platine en 1981.

"Jaurès" ouvre le dernier bal, une chanson engagée, une supplique aux générations futures. La voix puissante et la diction inégalable se marie parfaitement à la musique poignante, languissante et taciturne de l’accordéon. Une œuvre saisissante qui conserve toute sa résonance dans l’actualité.

"La Ville S’endormait", nous emporte dans un flot d’émotions, une mélancolie musicale sublime, une marche lente et puissante en écho à la voix de BREL qui chante même dans les silences. Une chanson immense à l’orchestration grandiose tantôt pesante tantôt ponctuée d’envolées musicales et vocales, intime et d’autant plus poignante qu’elle est comme l’annonce d’une fin inévitable. Dans un crescendo intense, il lance une dernier pique de misogynie ou de lâcheté en disant des femmes "je ne suis pas bien sûr comme chante un certain qu’elles soient l’avenir de l’homme" en réponse à la célèbre phrase d’Aragon.

"Vieillir" et "Le Lion" sont deux chansons traitant de la mort sur un ton empreint d’ironie. Toutes deux ont une interprétation très théâtrale, quasiment mise en scène, et des arrangements musicaux d’une festivité lourde. La première expose tout un tas de manière de mourir tant qu’on ne meurt pas en se sentant vieillir, ce qui, pour BREL, paraît pire que tout.

"Les F…" marque le retour de l’humour acerbe de BREL qui règle à nouveau ses comptes avec les flamands. La musique diffère largement de d’habitude et adopte un style funky qui alterne tel un dialogue avec des paroles pleines d’humour et dénonciatrices. Une véritable performance. Et sur un tango, "Knokke-le-Zoute Tango" maintient une note joyeuse avec une montée en puissance croissante, une interprétation qui s’intensifie et un orchestre magistral. BREL avait participé à un festival à Knokke-le-Zoute, à ses débuts et était arrivé avant dernier. D’ailleurs, il n’hésite pas, au cours de cet album, les clins d’œil à ses anciennes chansons.

"Les Remparts de Varsovie", suit dans la lignée des chansons fantaisistes, et, BREL nous offre le loisir de goûter à un portrait comme il sait les peindre. Un moment joyeux, où l’on retrouve tout son génie, sur un ton ironique, un piano rapide qui suit la cadence tandis que l’orchestre festif s’ajoute progressivement jusqu’à l’entrée d’un chœur dans une grande théâtralité qui marque son style. "Le Bon Dieu" est une jolie chanson, où il chante au service d’une orchestration légère, sublime et dansante.

"Orly" s’ouvre dans un silence lourd, près d’une minute où la musique se retire pour laisser place à la voix chargée et dramatique. Peu à peu l’orchestre s’élève, profond et solennel enveloppant la voix de BREL et intensifiant le drame. La tristesse est infinie sans jamais tomber dans le pathos. C’est l’histoire de l’au revoir de deux personnes, où, "Orly" est métaphore de cette séparation. BREL y tisse la douleur, la solitude, et, introspectif, comme une confession intime, ses adieux peut-être. Une balade déchirante dont la beauté à la fois lancinante et poignante émeut profondément.

"Jojo" c’est son ami, Georges Pasquier, qui est mort quelques années auparavant. Ce départ ébranle profondément BREL qui en écrit une chanson d’une simplicité désarmante et d’une sincérité bouleversante. Sa voix au ton grave, ses syllabes détachées, sont seules à faire écho à cette douleur, accompagnée seulement d’une guitare acoustique, discrète, presque effacée par moment laissant l’émotion pure s’exprimer, un cri muet porté par des mots justes et simples. "Voir Un Ami Pleurer" poursuit cette litanie de tristesse, une mélodie douce qui traduit une souffrance sans artifices. Deux œuvres où la sincérité devient l’âme de la musique.

L’album se clôt intensément avec "Les Marquises". On y salut l’arrangement musical minimaliste presque impressionniste réalisé en une nuit seulement parce que, sans l’orchestre de François Rauber et le piano de Gérard Jouannest, la carrière de BREL n’aurait sans aucun doute pas été la même. Un dernier tableau profond où sa prose déploie son amour pour cette île qui l’aura accueilli jusqu’à la fin.

Une réédition de l’album apportera cinq chansons inédites, à découvrir, mais que BREL jugeait inabouties.

Un album sublime bien que sombre et grave où plane grandement le thème de la mort. Les textes sont intemporels et les arrangements musicaux vieillissent bien mieux que ceux des premiers albums. Neuf ans après avoir quitté l’industrie de la musique, BREL est toujours BREL. Il nous invite à son dernier repas, intense, sincère, drôle, dénonciateur, lucide, nous enjoint à recroiser les thèmes de l’amour, l’amitié, la mort, la solitude, et soit l’on respire porté par des airs légers soit l’on plonge avec lui et son orchestre intensément mélancolique. "Les Marquises", le fameux disque bleu, le dernier.

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1. Jaurès
2. La Ville S'endormait
3. Vieillir
4. Le Bon Dieu
5. Les F...
6. Orly
7. Les Remparts De Varsovie
8. Voir Un Ami Pleurer
9. Knokke-le-zoute Tango
10. Jojo
11. Le Lion
12. Les Marquises
13. Sans Exigences
14. Avec Elégance
15. Mai 40
16. L'amour Est Mort
17. La Cathédrale



             



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