« Kanye West ? Ouais, il fait de la bonne musique, mais c'est un idiot, rien qu'à écouter des interviews de lui ou écouter ses projets grossiers pour s'en rendre compte », me dit un ami avec qui je parle souvent musique. Certes, Kanye WEST est aujourd'hui un rappeur horripilant d'arrogance et de mégalomanie. Mais il faut savoir qu'avant de se sentir si proche de l'être suprême, à ses débuts, il était une personne presque normale. Le but de cette chronique n'est pas de montrer son arrogance actuelle – avec des duos avec Dieu, entre autres – mais plutôt de souligner la perfection de ses débuts. 2004, The College Dropout voit le jour.

Notre rappeur est producteur sur la quasi totalité des morceaux, ce qui est un travail remarquable, deux fois plus de boulot pour lui. Le petit voleur qu'est Mr West sample des morceaux tellement bien trouvés sur son album, rien qu'à voir « We Don't Care » pour comprendre qu'il a ce talent de savoir quelle musique conviendra le mieux à son rap. Une chanson parfaite pour débuter l'album, au refrain presque enfantin mais tellement accrocheur, les couplets aussi bien exécutés. Un début d'album bien proche de la perfection. Et même les interludes ont des instrus envoûtantes au possible : on peut citer « Graduation Day » à l'ambiance unique, ou encore « I'll Fly Away » qui nous donne l'impression de retourner dans un vieux bar des années 50 avec un pianiste et son chœur.

Soyons clairs, cet album est truffé de tubes. Des morceaux calibrés pour être appréciés, Kanye WEST a peaufiné au millimètre tout ça pour donner un résultat bluffant qui fait que même 10 ans après, j'écoute toujours cet album régulièrement avec plaisir. Écoutez plutôt « All Falls Down », « SpaceShip » ou encore le tubesque « Jesus Walk ». Impossible de ne pas apprécier ces instrus aux ambiances si uniques et originales, ne copiant aucun autre rappeur sur le marché. On a aussi le droit à un titre-ballade crémeux « Never Let Me Down » qui pourtant est tellement appréciable, envoûtant voire émouvant, avec une prestation affolante d'un JAY-Z ensorcelant. Suit à cette balade le plus agressif « Gem Em High », qui invite COMMON et Talib KWELI, deux rappeurs majeurs de la scène underground aux Etats-Unis, à s'exprimer pour donner un résultat dynamique et réécoutable sans modération.

Les morceaux excellents n'en finissent plus, l'enchaînement est fluide et sans bavures, on apprécie la pêche de « The New Workout Plan », l'aspect bien plus calme et reposant de « Family Business », ou « Slow Jamz » qui accueille TWISTA et Jamie FOXX, deux rappeurs critiquables mais pas détestables sur le morceau en question. Mention spéciale pour « Two Words » et son instru dosée à la perfection, les samples sont maîtrisés comme il se doit par un Kanye WEST qui se défend aussi bien dans son rôle de producteur que celui de rappeur. Quant au dernier morceau « Last Call », sa durée de 12 minutes découragera probablement la plupart des auditeurs. Mais quel tort de passer à côté d'un morceau si complet, aux paroles intéressantes et à l'instru – comme à l'habitude de Mr WEST – recherchée et truffée de surprises.

Voilà. Un album de 21 chansons, qui, si l'on exclut les « skit », ont toutes leur intérêt et une longévité infinie sur le long terme : je défie quelconque amateur de hip hop de refuser l'écoute de The College Dropout en connaissant les qualités certaines qu'il contient.
Kanye WEST à ses débuts, vous vous demandiez ce que ça donnait, et bien voilà la réponse. Un album quasi-parfait, aucune longueur ni fausses notes, le rappeur tape très fort dans le monde du rap avec une telle galette. Un incontournable à toute discographie d'amateur de hip hop ou même de curieux, quant aux réticents au genre, je ne saurais que vous conseiller l'écoute de cet album pour créer des affinités avec le hip hop.