La caution Nashville. Pour les rockers américains, cette ville, considérée comme le bastion et le berceau de la musique country, revêt une aura particulièrement imposante. Comme si composer et enregistrer un album là-bas conférait certain pouvoir à sa musique, et la dotait d'une âme et d'une qualité qu'elle ne pourrait atteindre ailleurs. Comme une caution artistique. Récemment, mamie Steven Tyler d'AEROSMITH y est allé mettre en boîte son album country. 8 ans plus tôt, BON JOVI faisait de même. Bien entouré par son trio de producteur Dann Huff (spécialiste du genre), John Shanks et Desmond Child, le groupe enregistre alors un dixième album sortant des sentiers battus, même si la patte du groupe, reconnaissable entre mille, ne se voit pas ici chamboulée.

A défaut d'un album country, BON JOVI propose simplement un album rock plus calme qu'à l'accoutumée, plus porté sur les mélodies et moins sur l'énergie. Certes, le violon de l'introductif "Lost Highway" donne un surplus de 'ruralité' à l'ensemble, mais il ne s'agit ici que d'une country de vitrine. L'essentiel reste profondément ancré dans le savoir-faire historique. Tout juste, est c'est là que le bât blesse, l'album se fait un peu plus 'putassier' qu'à l'accoutumée. En effet, un morceau tel que "Summertime", qui se veut à la fois moderne et country, se fait également d'une vacuité insondable avec ses couplets mielleux, façon Taylor Swift. Sirupeuse, la ballade "(You want to) Make a Memory" donne l'impression d'avoir affaire à un groupe usé, sans idée.

A côté de ça, et fort heureusement, BON JOVI parvient à glisser une poignée de titres inspirés, qui offrent une véritable substance à ce projet. Il y a le tube, bien sûr, "We Got it Going On", mélange réussi entre "It's My Life" et "Have a Nice Day". "Whole Lot of Leavin'", avec sa mélodie folk, voit sa construction évoluer vers un rock-country, façon SPRINGSTEEN, qui fonctionne plutôt bien. SPRINGSTEEN, voici la référence évidente pour le groupe. Jon, c'est certain, aurait aimé être le Boss, et n'a de cesse de le singer sur les 12 titres que compte l'album. Il n'y a pas néanmoins le talent brut ni la conscience sociale sincère que l'on peut ressentir chez Springsteen. "Any Other Day" s'en sort bien dans une veine rock énergique, de même que "The Last Night", ces deux titres se voyant portés par des refrains imparables et le travail exceptionnel de Richie Sambora. C'est d'ailleurs ce dernier qui donne la réplique à Jon sur le titre final "I Love This Town", le titre le plus léger de l'ensemble, et finalement le plus authentique.

L'expérience country ne l'est pas vraiment. Avec Lost Highway, BON JOVI propose un album rock certes plus 'roots' qu'à l'accoutumée, dont les nombreuses références Springstinienne peuvent mettre mal à l'aise. La country, la vraie, n'est même pas effleurée, et l'on se retrouve ainsi avec un album ultra-commercial, dont l'intérêt artistique reste encore à prouver. Pas de quoi faire le déplacement jusqu'à Nashville.

2,5/5