Les eighties sont derrière nous. Alors, certes, le succès est là, les dollars ont coulé à flot avec le champagne, les Rolex et les nanas. Mais la période new-wave poppy est désormais passée. Des musiciens tels que Mark et Mike ne peuvent pas ignorer le fait qu'ils ont aseptisé leur son pour obtenir le succès. Est-ce répréhensible ? Bien sûr que non, la musique proposée par LELEV 42 n'a rien de déshonorant, c'est pop et calibré, certes, mais de qualité. On sait tous que Mark aurait pu être un bassiste de légende à l'instar de Jaco Pastorius ou Stanley Clarke, et rester dans la musique underground. Cela l'eût-il rendu plus heureux ? Pas sûr, notre homme semble épanoui et, même si les excès font toujours partie du quotidien d'une rock star, ils semblent l'avoir peu atteint. Nous voici donc aujourd'hui 3 années après leur dernier album en date.

Et, ô surprise, que voyons-nous dans les crédits de l'opus ? Allan HOLDSWORTH, the guitariste fait homme, est une composante du groupe depuis les tournées de 1990. L'association King/Holdsworth, ça fait peur dans un premier temps, pire que par exemple Lee/Lifeson. Voyons voir de quoi il retourne.

Les singles de la livraison font honneur au statut du groupe de l’île de Wight. Des titres pop super catchy, bien ficelés avec toujours des instrumentistes au sommet de leur art, même s'ils ne font pas du jazz funk. "Guaranteed" hante toujours les cervelles des ados d'alors avec son refrain qui marque au fer rouge. A peine moins enthousiasmante "Overime" dépote super bien avec son beat super funky. JAMIROQUAI aura beau jeu de s'inspirer de ce genre de titres quelques années plus tard.

Les autres morceaux n'atteignent pour la plupart pas les même sommets. Nous avons le petit beat de synthé de "Her Big Day", pas désagréable ; la belle rythmique de basse de "The Ape" au chant velouté de Mark, mais le titre est sans doute un brin trop tranquillou. Puis la discrète guitare jazzy de "My Father"s Shoes". Le clavier Mike Lindup, pourtant pas mal absent du processus d'enregistrement, chante en solo sur "Set Me Up", mais c'est "Lasso the Moon", belle romance sentimentale où le groupe se charge d'attraper la lune au lasso pour le plaisir d'une belle. Mark se contente d'un rôle de super sideman à la basse sur ces deux titres.

Finalement, cette association King/Holldsworth alors ? On la découvre sur le très joli morceau "A kinder Eye", titre smooth aux belles vibrations, où la gratte du mathématicien de la musique est instantanément reconnaissable, du moins pour ceux qui l'aiment. La belle atmosphère de cette song en fait un must de l'album. Ensuite, sur "If You Were Mine" la guitare d'Allan rappelle à ceusses qui l'auraient oublié qu'il reste un des grands maîtres de l'instrument, même si la song est sans relief. On entend à nouveau ses soli syncopés sur "With a Little Love", "She Can't Help Herself et "Seven Years", tous trois peu recommandables.

Comparable aux précédentes livraisons, il semble cependant que le vide laissé par le départ des frères Gould ne soit pas prêt de se remplir. Malgré plusieurs morceaux de qualité, l'ensemble sonne un brin plus 'terne' qu'auparavant. Mais nous en sommes déjà au neuvième album et il est somme toute normal que les capacités de composition des artistes se soient émoussées après toutes ces années à truster les sommets des hit-parades.
Cela dit, tout est relatif, on reste sur de la bonne musique.