Après un premier album prometteur mais encore fort ancré dans le passé du rock, Blue Öyster Cult a réalisé un véritable miracle. Rien ne laissait présager qu'ils allaient sortir d'un coup, comme ça, un des plus grands disques de hard rock jamais écrit. Et pourtant, Tyranny and Mutation est là, spontané, flamboyant, magnétique, à la fois merveilleux et diabolique. A mes yeux, rien n'égale chez les autres dinosaures du hard l'électricité de «The red and the black» ou de «Hot rails to hell», ni le charme de «Wings wetted down» ou «Teen Archer».

Spontanée, c'est décidément le mot le plus juste pour désigner cette musique. Avant tout, les cinq membres de BÖC étaient de sacrés virtuoses, à peu près tous multi-instrumentistes et bons chanteurs. Leur place était sur scène avec leur armée de guitares, l'écriture passait ensuite. Les chansons de Tyranny and Mutation ont donc été mises au point au fil des tournées. L'album a tout de même été structuré de manière intelligente. Sur la première face, «The Black», un véritable voyage vers l'enfer dans l'obscurité du monde souterrain, on trouve toutes les démonstrations de vélocité, parmi lesquelles il faut encore citer l'incroyable «7 Screaming Diz-Busters». Sur la deuxième, «The Red», les numéros plus lents mais plus vicieux qui annoncent nettement l'album suivant, comme «Baby Ice Dog», dont les paroles sont certes douteuses, et la surréaliste «Mistress of the Salmon Salt».

Seul le groupe lui-même a peut-être pu effacer la barre qu'il avait placée avec Tyranny and Mutation, avec le plus écrit et structuré mais moins énergique Secret Treaties. De toute façon, inutile de se battre pour désigner le meilleur, les deux sont tellement bons qu'on peut les mettre à ex aequo loin devant le peloton des autres grands albums du genre.