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- Style : Tangerine Dream, Brian Eno , Klaus Schulze , Harold Budd & Brian Eno, Biosphere
- Membre : Thom Brennan

Steve ROACH - Structures From Silence (1984)
Par AIGLE BLANC le 21 Février 2015          Consultée 3152 fois

Composé de 3 longues plages, Structures From Silence totalise un peu moins d'une heure de musique. Dans le livret, Steve ROACH explique qu'à l'époque où il travaillait à cet album, il vécut pendant des mois à travers cette musique du matin au réveil jusqu'au soir au moment du coucher et même pendant son sommeil. Il n'y avait de place pour aucune autre source musicale dans sa vie. Le reste du temps, il le passait à s'imprégner de la musique que génère le silence. Il conclut que l'essence de cet album réside dans le sentiment qu'il laisse une fois écouté : un retour au silence. Sa démarche se veut dans la continuité de celle qu'il avait empruntée avec son magnifique opus Quiet Music chroniqué dans ces colonnes. En fait, les deux oeuvres s'interpénètrent dans la mesure où, loin de se succéder, elle 'se simultanéisent'*. La trilogie Quiet Music en effet s'étend de 1983 à 1986, et c'est en 1984 que s'intercale l'album qui fait l'objet de cette chronique. Il s'agit pour ainsi dire d'une même session d'enregistrements bien qu'étalée sur quatre ans.

Malgré tout, à y regarder de près, Structures From Silence amorce une évolution, même légère, dans l'oeuvre de S.ROACH. L'élément mélodique s'estompe, voire disparaît, au profit d'un travail plus poussé sur les textures et l'architecture sonores.
Depuis sa création, ce disque est considéré comme le prototype de la musique New Age, vecteur d'une philosophie de bas étage née au mitan des années 80 où fleurissent les charlatans du bien-être personnel. Rappelez-vous le président américain Ronald Reagan s'exposant à l'objectif des journalistes pendant ses séances matinales de jogging. En France, à l'ère cathodique du TOP 50, Véronique et Davina nous enseignent les joies de l'aérobic à pratiquer chez soi devant son téléviseur à l'écran minuscule. Les gens qui supportent de plus en plus le rythme trépidant du monde professionnel ne pensent plus qu'à nourrir leurs corps car, c'est bien connu, la santé du corps et celle de l'esprit vont de pair. L'esprit New Age, mélange de relents de culture hippie et de secte scientologue, vous assure de rester connecté à la nature par le biais de votre rythme interne.
Structures From Silence devient alors un instrument idéal pour les psychothérapeutes et même pour les hôpitaux qui le diffusent dans les blocs opératoires pour apaiser les patients. Heureusement, aujourd'hui que le New Age a fait long feu, la musique de S.ROACH s'est libérée de cette récupération démoniaque pour retrouver son intégrité artistique.
Malgré sa réputation, je ne trouve pas que cet album surnage vraiment au sein de sa discographie pléthorique. C'est un très bon opus certes, mais pas le chef-d'oeuvre pour lequel une certaine presse musicale voudrait le faire passer. La faute à trois titres inégaux.

"Reflections in Suspension" est de loin la plus belle pièce. Elle déploie deux lignes mélodiques qui évoluent simultanément. La première, celle qui inaugure le titre, est une séquence d'une vingtaine de notes pulsées sur un rythme régulier mais assez lent. Comme toute séquence qui se respecte, elle trouve sa cohérence dans le principe de répétition. Ce qui fait son originalité, aux côtés par exemple des séquences frénétiques de Chritopher Franke au sein de TANGERINE DREAM, c'est justement sa douceur, sa tranquillité, comme une respiration apaisée. Il ne suffit pas de répéter un motif de plusieurs notes pour réussir une belle séquence. Il est des séquences ennuyeuses qui paraissent plus mécaniques que naturelles. Celle de "Reflections in Suspension" trouve une cohérence interne indéniable. Le leitmotiv qu'elle déroule sans discontinuité pendant les 16 minutes de la composition est si subtil que ROACH aurait pu l'étaler sur le double de sa durée sans que cela eût posé le moindre problème. A cette séquence délicate, se greffe une seconde ligne mélodique faite de longs accords au synthé qui évoluent imperceptiblement jusqu'à créer une harmonie parfaite. Voici une composition que j'aime revisiter de temps en temps sans m'en lasser.

"Quiet Friend", quoique dans la même tonalité, sonne plus nébuleuse à mes oreilles, le travail sur les textures me paraissant moins recherché, moins abouti donc moins heureux. S.ROACH se laisse aller à une facilité évidente.

Le dernier titre éponyme du haut de ses 28 minutes totalise à lui seul la durée des deux plages précédentes réunies. Une succession d'accords synthétiques répétés naissent et agonisent dans un climat propice au recueillement. C'est la composition qui joue le plus avec le silence et il n'est pas interdit de s'y plonger pour peu d'en accepter l'austérité des timbres peu variés. Pour autant, "Structures From Silence" n'atteint pas la magie de "Reflections in Suspension" et ne se distingue pas suffisamment de son modèle, l'archétype que constitue l'album Music For Airport de Brian ENO dont il paraît un pastiche réussi certes mais dénué de la moindre variation qui lui eût conféré un minimum de valeur ajoutée.

Si vous découvrez l'oeuvre de Steve ROACH, je ne saurais trop vous conseiller de vous contenter des éditions antérieures à 2002.
Si vous êtes fan de l'artiste, alors ne passez pas à côté de la prestigieuse réédition PROJEKT de 2014, enrichie de quatre nouvelles pièces musicales composées par l'auteur à l'occasion du 30°anniversaire de Structures From Silence. Un bien beau cadeau comprenant pas moins de 2 cd Bonus, le tout rassemblé en un généreux coffret de 3 cd. La démarche n'est pas sans rappeler celle de VANGELIS pour célébrer les 25 ans de Blade Runner, qui non content d'offrir enfin l'intégralité de son score mythique (édité jusqu'alors partiellement pour de sombres problèmes de droit juridiques) avait adjoint au coffret une troisième galette de musique nouvelle inspirée de sa B.O matricielle.
De la même façon, le disque 2 du coffret de Structures From Silence, intitulé "Suspension and Reflection", propose une re-lecture par S. ROACH de son oeuvre initiale. Tandis que le disque 3, "Below and Beyond", a tout l'air d'un véritable nouvel album dans la lignée de ses oeuvres contemporaines.
On le voit, la générosité reste le maître mot de cette édition prestige pour laquelle PROJEKT a ressorti la pochette d'origine abandonnée un temps lors de sa réédition de 2001.

* "se simultanéisent" : J'espère que vous me pardonnerez ce barbarisme bien innocent.

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   AIGLE BLANC

 
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- Steve Roach (tous les claviers)


1. Reflections In Suspension
2. Quiet Friend
3. Structures From Silence



             



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