Imaginez que vous êtes le boss de Capricorn Records, la maison de disques de Macon (Georgie) dans le milieu des seventies. Tous les grands groupes du southern-rock (sauf Lynyrd Skynyrd) sont sous contrat avec vous. Et les petits gars du Marshall Tucker Band ont déjà sorti trois excellents LP en deux ans, dont un double mais sans vraiment casser la baraque, sans décrocher « le hit » qui remplit les poches et les caisses de jolis billets verts.

-Oui oui c’est de la bonne musique, mais dis-donc coco ce n’est pas un peu trop roots pour le public ?
Et si on leur trouvait un hit, tu as quoi en magasin ?
-Ecoute boss, on a bien ce super titre qui était prévu pour un album de Charlie Daniels.
-Ah oui c’est quoi ?
-“Fire On The Mountain”
-Faut voir, bon tu en parles à Charlie, au besoin tu le fais jouer sur l’album.
Ah bon il est déjà sur tous les autres, ben il ne sera pas dépaysé ! Et puis ajoute quelques noms, je ne sais pas moi Dickey Betts, Chuck Leavell, des artistes maison, on ne va pas non plus casser la tirelire. On fait comme ça! Allez roule ma poule on se retrouve jeudi au country-club après le golf.
-Ok chef

Et quelque temps après, « Fire On The Mountain » ouvre le quatrième album du MTB. La mayonnaise a pris, le groupe conserve son authenticité tout en concédant un aspect légèrement plus commercial à son label. La chanson écrite par McCorckle, tiendra ses promesses, et sera classée au top 40 (Notre ami Charlie sortira la même année un CD dont le titre sera … « Fire On The Mountain » mais où le morceau, qu’il joue pourtant très souvent en concert, ne figure pas).

Le groupe est au sommet de sa période créative, aussi il pond lui-même un autre « hit potentiel » comme on dit dans les milieux banchés, le superbe « Searchin' For A Rainbow » qui pourrait servir de bande son à un western. Ces deux morceaux sont tellement puissants qu’ils éclaboussent de leur classe les autres titres qui apparaissent plutôt en retrait même quand Jerry Eubanks délaisse sa flûte pour nous offrir une superbe partie de saxophone sur l'excellent et méconnu « Bound And Determined ».

On remarque également le superbe solo de guitare de Dickey Betts sur « Virginia » écrit par Toy Caldwell.
Le dernier titre est une excellente interprétation en live de « Can't You See » qui figurait sur le premier LP. Les autres morceaux « Bob Away My Blues » et « Keeps Me From All Wrong » sont plus dans la lignée des disques précédents.

Le boss peut être satisfait, le Marshall Tucker Band n’a pas perdu son âme ni ses racines en « commercialisant » légèrement son approche musicale. Et en cherchant l’arc en ciel, le groupe a trouvé les charts et reste plus que jamais une valeur sûre de Capricorn Records.