L’homme naît et meurt seul.

Jacques BREL, en phase terminale de son cancer, ne le sait que trop bien lorsqu’il regagne les Marquises après être parvenu à expulser son ultime disque qui sera le treizième.

N’ayant plus rien à perdre, il se jette donc à corps perdu dans la bataille. Les nationalistes flamands, Jean FERRAT, les femmes qu’elles soient de petite vertu ou pas, tout le monde en prend pour son grade. Lui-même n’est pas en reste, n’est-ce-pas lui ce vieillard tonitruant […] crachant sa dernière dent en chantant Amsterdam qu’il serait advenu si jamais il avait vécu ?

Les Marquises est un aller simple sans retour possible. Un album hanté par les souvenirs, la nostalgie, la mort malgré ses quelques envolées momentanées plus légères. En réalité, rien qu’avec les trois premiers morceaux, la messe était déjà dite sans avoir besoin d’arriver jusqu’au bon Dieu pourtant résolument sublime.

Le triste accordéon de "Jaurès", cette anonyme ville endormie, le tango funèbre de la vieillesse. L’ultime lettre de Kurt COBAIN citait Neil YOUNG (Il vaut mieux brûler franchement que de s’éteindre à petit feu) mais l’éphémère leader de NIRVANA savait-il en vérité qu’il invoquait aussi un des chanteurs francophones les plus vitaux du siècle, improbable parrain des punks via le contenu lyrique d’un "Vieillir" refusant la déliquescence ?

Perdu dans les dédales de ma cathédrale discographique qu’elle soit digitale ou pleinement matérialisée, ils sont plus de 2000 et je ne vois qu’eux deux.

Léo FERRÉ et Jacques BREL.

Il N’y a Plus Rien et Les Marquises.

Au-delà il ne reste que le vertige.