Spectres continue sur la lancée semi-pop d'Agents of Fortune. Ici, la formation originelle du BÖC livre son album le plus policé, le plus démagogique. Curieusement, ils ont eu un peu de mal à conserver leur public avec celui-ci. Bien sûr, il a marché, mais un peu moins bien qu'Agents et les deux live, malgré la présence de leur deuxième grand tube, «Godzilla». Probablement que c'est à cause d'un certain manque de vigueur lié au caractère épuré. Bien sûr, cette simplicité, cette écoute directe peuvent plaire et certains trouveront leur compte ici. Pour ma part, étant avant tout un grand amateur de la technicité et de la sensualité de leur jeu, je le trouve sensiblement inférieur à leur moyenne.

Mais on ne dira jamais assez à quel point leur moyenne est élevée. Il y a bien suffisamment de bonnes choses sur Spectres pour qu'on ait envie de l'écouter de temps en temps. Ah, parlons un peu de l'étrange éclectisme du disque. On trouve un peu de tout ici. Du rock bien carré avec «Godzilla», un genre de psyché avec «R.U. Ready 2 Rock», une ou l'autre ballade. Comme toujours, tous les membres du groupe ont participé à l'écriture des chansons, mais il semble que cette fois ils aient un peu fait les choses chacun dans leur coin. Le principal défaut de l'album à mes yeux et ce net manque de cohérence stylistique.

Enfin, on peut toujours apprécier les numéros au coup par coup. «Godzilla» mérite son statut de grand tube. Précisons que son riff a été ouvertement copié par Kurt Cobain pour «Smells like teen spirit», comme quoi Pearl Jam n'est pas le seul groupe de grunge à se baser sur le hard rock, loin s'en faut. «Golden age of leather» est assez déconcertante, sans doute la plus originale et donc la plus intéressante du lot. «Searchin' for Celine» et «Celestial the Queen» sont de beaux exemples de cette pop que le groupe a directement dérivé des moments les plus romantiques de Secret Treaties. Les deux plages plus lentes et mélancoliques qui concluent l'album sont vraiment réussies. «I love the night» est une ballade qui présente un jeu de guitare très délicat ainsi qu'un des meilleurs chants de Donald Roeser. «Nosferatu» est une histoire de vampires pondue par Joe Bouchard, dramatique à souhait.

Voilà pour ces quelques impressions. Spectres est certainement un des albums les plus difficiles à juger du groupe. Il ne faut surtout pas l'écouter en pensant y trouver un chef-d’œuvre de hard rock, mais en tant que recueil de chansons de bonne pop musclée, il fait très bonne figure.

Note : 3,5/5