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Ann PEEBLES - I Can't Stand The Rain (1974)
Par LE KINGBEE le 6 Avril 2017          Consultée 3041 fois

Nous sommes maintenant en 1974, Ann PEEBLES enregistre son quatrième album. Comme le veut l’adage, on ne change pas une équipe qui gagne. On a donc le droit encore une fois aux musiciens attitrés du label Hi Records (une sacrée bande de virtuoses rompus au groove de Memphis), à Willie Mitchell pour les arrangements et à la production sans oublier une équipe de songwriters qui s’est quelque peu rétrécie. En effet, si Ann PEEBLES se produit toujours sous son nom sur scène et sur disque, elle est devenue à la ville Madame Ann Bryant, l’épouse de Don Bryant. Le couple a composé sept des dix titres de l’album, d’où une impression beaucoup plus intimiste et personnelle.
Même remarque au niveau du répertoire, ce sont principalement des ballades ou des titres typiques de la Memphis Soul auxquels on est confronté. Arrangements aux petits oignons, textes beaucoup plus orientés sur l’amour, la fusion, les déceptions et la solitude et une troupe d’accompagnateurs qui n’a de cesse de placer la voix de la chanteuse sur orbite.

Les ballades sauce Memphis sont encore bien présentes : si « Until You Came Into My Life » paraît ampoulée par la présence d’un orchestre à cordes et des chœurs qui ne s’imposaient pas, avouons que le titre vaut toutefois le détour et nous paraît bien supérieur à la version offerte par Joe Henry trente ans plus tard. Autre ballade « A Love Vibration » gorgée de groove demeure nuancée avec la présence d’un orchestre de cordes et violons. Ce titre sera repris deux ans plus tard par Etta James dans une version dynamique plus spectaculaire mais moins efficace au niveau de l’impact.
Les sonorités caractéristiques du label Hi sont bien palpables sur le groovy « Run, Run, Run » (aucun lien avec le titre homonyme de Lou Reed) rehaussé par l’apparition des cuivres. Même impression avec « If We Can’t Trust Each Other » bercé par une section de cordes et beau message d’espoir. Le rythme languissant de « I’m Gonna Tear Your Playhouse Down », seconde compo d’Earl Randle (excellent songwriter qu’on retrouvera dans le giron de Syl Johnson, Al Green, OV Wright, Koko Taylor), renforce l’émotion et la sentimentalité du morceau.
On ne compte qu’une seule véritable reprise : « (You Keep Me) Hangin’ On ». Prototype de la ballade Country type Bakersfield, le titre a été popularisé par les Gosdin Brothers et sera repris via moult versions toutes plus ennuyeuses et larmoyantes les unes que les autres (Waylon Jennings, Bonnie Owens, Cher), mais le timbre de la chanteuse, une orchestration et des arrangements de folie transforment cette purge en une pépite de Country Soul. L’album se clôt par la ballade « One Way Street » avec une intro de claviers et de flûte, un titre aussi simple qu’apaisant qui finit par happer l’auditeur.

Mais comment évoquer ce disque sans parler de « I Can’t Stand The Rain », titre qui donne son nom à l’album ? Disons-le tout net, ce standard sera le plus gros succès d’Ann PEEBLES. A une époque où la pluie (the rain) devient curieusement la thématique de nombreuses chansons (« Walking The Rain » (The Dramatics), « Walk Out In The Rain » (Badfinger), « Rider In The Rain (Randy Newman), « Crying In The Rain » (The Sweet Inspirations), « Flowers In The Rain » (Nancy Sinatra), « Singin’ In The Rain» (Sammy Davis Jr.), «A Hard Rain’s A Gonna Fall» (Bryan Ferry), « Little Bit Of Rain» (Karen Dalton), «Rainy Night In Georgia» (Ray Charles) )*, Ann PEEBLES transforme la pluie en une tornade. Lors d’une soirée en compagnie de Don Bryant et du disc-jockey Kenneth Bernard Miller, la chanteuse est excédée par les gouttes qui se mettent à tomber brusquement sur la ville de Memphis, pourtant généralement ensoleillée. Elle se met à fredonner quelques phrases sur cette rincée qui contrarie les trois amis, Don Bryant et Miller enchaînent avec une mélodie. La chanson rapidement composée est apportée dès le lendemain à Willie Mitchell. Le producteur arrange aussitôt le titre, il sait qu’il en tient là un capable de se transformer en hit. « I Can’t Stand The Rain » sort d’abord en single couplé à « I’ve Been There Before ». Le single monte à la 6ème place des charts R&B et décroche un excellent 38ème rang au classement Pop. La rythmique des frères Hodges, les gouttelettes d’orgues de Charles Hodges relèvent le timbre intense de la chanteuse et feront de ce titre l’un des plus gros succès du registre Memphis Soul. Pas mal pour une chanson qui nous parle de solitude amoureuse et de flotte.
Au fil du temps, « I Can’t Stand The Rain » connaîtra de multiples reprises. Quelques semaines après la sortie du disque, Humble Pie reprendra le morceau dans l’album « Thunderbox ». Trois ans plus tard, Ronnie Wood, Central Graham Station, Albert King en feront autant avec plus ou moins de réussite. Le titre décrochera une seconde vie durant l’été 77 avec la version Disco d’Eruption, groupe mené par la chanteuse Precious Wilson, la reprise allait alors déferler sur toutes les radios et discothèques de la planète dans une interprétation, certes festive, nettement moins intense que l’originale. Ce gros carton d’Ann PEEBLES sera repris près d’une centaine de fois par de nombreux artistes (Tina Turner, Carmel, Michael Bolton, Susan Tedeshi, Seal, Lowell George, jusqu’au duo Emile et Image) mais aucune de ces reprises ne parviendra à retranscrire l’émotion dramatique transmise par Ann Peebles. Seule Missy Anderssen en 2009 peut s’enorgueillir d’une reprise aussi intense. En 2016, Beverly Knight parvenait à tirer les marrons du feu avec une version plus que correcte. Curieusement, ces deux reprises ne connaîtront presqu’aucun passage sur les ondes radiophoniques.

Ce quatrième album d’Ann PEEBLES reste à ce jour la meilleure contribution de cette frêle chanteuse au timbre facilement identifiable, ou disons le plus connu. Une note de 4, tant pour les textes, les arrangements, les musiciens fidèles tous attitrés au label Hi, les mélodies et une production léchée, nous paraît justifiée. Aujourd’hui encore, Ann Peebles, véritable star de la ville de Memphis à l’instar d’Irma Thomas à la Nouvelle Orleans ou Bettye LaVette dans le Michigan, se produit sur les scènes américaines. Une superbe chanteuse pour un disque somptueux qui allait marquer la fin d’une époque avec l’arrivée de la vague Disco.

*Ces titres font figure d’exemples, les groupes ou chanteurs auxquels ils sont rattachés ne sont pas tous les instigateurs ou créateurs des morceaux. On aurait bien sûr pu en citer une liste plus longue, mais on ne voulait pas risquer de rincer les lecteurs avec des histoires d’eau.

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   LE KINGBEE

 
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- Ann Peebles (chant)
- Teenie Hodges (guitare)
- Charles Hodges (orgue, piano)
- Leroy Hodges (basse)
- Howard Grimes (batterie)
- Wayne Jackson (trompette)
- Jack Hale (trombone)
- Andrew Love (saxophone)
- Ed Logan (saxophone)
- James Mitchell (saxophone)
- The Memphis Strings (orchestre à cordes)


1. I Can't Stand The Rain.
2. Do I Need You.
3. Until You Came Into My Life.
4. (you Keep Me) Hangin' On.
5. Run, Run, Run.
6. If We Can't Trust Each Other.
7. A Love Vibration.
8. You Got To Feed The Fire.
9. I'm Gonna Tear Your Playhouse Down.
10. One Way Street.



             



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