Pour son cinquième album, notre Joe DASSIN national choisit d'assumer ses origines en posant tel le cow boy avec stetson. Joe aura toujours plaisir à camper ce rôle de ricain en se produisant sur scène avec un lasso notamment. Pas de doute, il est américain, et c'est sans doute là que se situe l'explication de son amour avec la France. Nous achevons en ces années soixante-dix les 30 glorieuses et nos rapports avec les USA sont toujours emplies d'une « gratitude » évidente consécutives à la fin de la guerre. Il faudra encore quelques années à l'hexagone avant de se départir de cette adiction. En attendant, Joe profite à donf de cette situation en se posant comme le symbole de ce rapport quasi amoureux.

Joe est au sommet mais quelques choix hasardeux en matière de singles vont faire vaciller son trône au sommet de la variété française. On débute avec « Elle était...ho ». La batterie martiale digne du grand Tony Bennett des SHADOWS annonce une couleur assez rock'n'roll, une fort belle allure mais qui ne passionne pas les foules.. Pas assez variété ? On continue avec le petit blues « Bye bye Louis ». Tout à fait recommandable, il ne s'adresse en revanche plus du tout aux fans de variété. Pas de doute sur le fait que Joe s'amuse plus à faire ce genre de titre, une certitude même, mais il y a un monde entre les attentes de nos ménagères de moins de cinquante printemps et les goûts de notre émigré ricain. Ce monde serait-il le  « nouveau » dont il est issu et dont il revendique l'héritage ? Que de questions mais pas de succès.

Tout ça est finalement très rock, c'est surprenant. La formle magique fonctionnait à plein, ce besoin de recoller avec la musique de ses roots est très honorable mais question efficacité, il faut repasser ! « La ligne de vie » est mignonne et représentative de cette époque, on croirait entendre FIFTH DIMENSION avec « Aquarius », toutes proportions gardées. « Les joies de la cuisine » est la trépidante reprise du groupe éponyme JOY OF COOKING. On oscille entre country rock et pop, mais pour un peu on se croirait à Woodstock à 6 heures du mat. L'analyse est la même pour « La mal aimée du courrier du cœur ». Pas mal du tout mais résolument incompréhensible pour sa fan base.

Plusieurs titres d'obédience folk émaillent ce disque : une reprise de Gordon LIGHTFOOT avec « Si tu peux lire en moi » … Tout ceci est un brin larmoyant, mais efficace pour les grands mères. « Allez roulez » semble droit sortie des œuvres complètes d'un grand du folk mais il n'en est rien. Voila l'image même d'une carrière différente qui aurait pu se profiler. L'orchestration est purement seventies, on croirait entendre le TCB d'ELVIS à la baguette. Petite guitare cristalline pour « Sylvie », un chant sans doute trop pop, mais pas vilain. On jouxte la country avec « A la santé d'hier » ou « Pauvre Pierrot », sympa mais pas révolutionnaire.. Enfin, « Le général a dit », sonne traditionnel... un mixed up de culture sud américaine et Europe. Je suis incapable d'en déterminer l'origine...Si' l'un d'entre vous sait ?

On sort assez surpris de la découverte de cet opus. Delanoé et Lemesle étaient pourtant de la partie... Plus roots, la variété a presque disparu des titres ici proposés. Evidemment et malgré un matraquage en règle à la télé, le flop n'est pas loin. Pour l'instant, il s'agit de son album le plus rock. De ce point de vue, il est donc recommandable pour tous ceux qui veulent découvrir Joe DASSIN sous un autre angle. Quelques moments jouissifs sont même à signaler avec cette incongruité qu'est « Les joies de la cuisine »... Totalement inadaptée au marché français... Mais on aime !