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PUNK ROCK  |  STUDIO

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1986 Album
2023 End Of World
 

- Style : Virgin Prunes
- Membre : Leftfield, The Sex Pistols , Siouxsie And The Banshees, Magazine, Painkiller

PUBLIC IMAGE LIMITED - Metal Box (1979)
Par PSYCHODIVER le 15 Avril 2022          Consultée 1862 fois

Nous sommes en 1979. Cette fois ci, c'est terminé. Il aura tenté de vivre aussi longtemps qu'il le pouvait. Mais rien à faire. Le punk est mort. Et ce n'est pas parce que des vieux de la vieille gardent la tête hors de l'eau ( THE CLASH ) ou que des petits nouveaux essayent de le réanimer ( les excellents UNDERTONES ) qu'il va s'en sortir. Il est désormais réduit à l'état de fantôme. Une âme en peine qui ira prendre corps au sein des formations les plus radicales ( KILLING JOKE, GANG OF FOUR, THE POP GROUP ) ou obscures de l'afterpunk ( BAUHAUS, JOY DIVISION, THE CURE ). D'autres iront trouver le salut dans un rock de plus en plus synthétique ( Gary Numan et sa TUBEWAY ARMY ou encore OMD qui publie son premier single fondateur « Electricity » en cette veille des années 80 ).

Au même moment, John Lydon a toujours la haine. Mais une haine constructive. Un rejet de tout ce qui l'entoure. Société, politique, culture et médias sont autant d'ennemis qui vont donner suffisamment d'eau à son moulin pour lui permettre de poursuivre son petit bonhomme de chemin, à travers l'une des discographies les moins estimées ( à tort bien entendu ) de l'histoire du rock. Celle de son groupe : PUBLIC IMAGE LIMITED ( ou PIL pour ceux qui ne veulent pas s'emmerder ).

Un groupe qui ne chaume pas depuis sa création en 1978 et son imparfait mais prometteur et furieux premier album. En cette période thatchériste, le combo se fait régulièrement remarquer pour l'attitude résolument anticonformiste de ses membres. Entre des interventions télévisées / playback qui partent littéralement en live et notre rouquin préféré qui au micro de la BBC, va dénoncer l'ordure Jimmy Savile que l'histoire retiendra comme le pire pédocriminel ayant sévi au Royaume-Uni : PIL est ingérable. Cette interview coup de poing vaudra d'ailleurs à John un bannissement des médias britanniques pendant presque 30 ans. Mais il s'en tape. Idem pour ses acolytes : les fidèles Keith Levene et Jah Wobble qui cette fois ci ne cogne plus sur tout ce qui bouge mais fout carrément le feu à tout ceux qui ne lui reviennent pas ( pas moins de 3 ou 4 batteurs seront nécessaires à la conception relativement anarchique de « Metal Box », tant ils représentaient des cibles de choix pour ce cramé de Wobble ). Et ce gang de marginaux en colère va prouver que derrière leur very bad réputation (pas celle plus discutable de Joan Jett) se cache des artistes. Des vrais. Des grands. Des visionnaires.

J'ignore quelle fut la réaction des disquaires lorsqu'en novembre 79, ils virent atterrir dans leurs bacs cet étrange artefact frappé du sceau de PIL. Une boîte métallique (de celles d'ordinaire reléguées à la conservation des bobines de films) recelant 3 disques vinyles format maxi 45 tours (certaines éditions empilaient les disques entre des pages de papier de verre, humour punk) et tous dotés de sillons écartés au maximum afin de pas étouffer le son de la basse. Cette basse fondamentale, le système cœur poumons de cette « Metal Box » qui outre son habillage hors norme, allait révéler un contenu qui l'est tout autant.

Guidé par une musique punk empreinte de sonorités reggae / dub et synthétiques (entre KRAFTWERK, DEVO et SUICIDE en moins abrasif tout de même, on pense aussi à une version plus extrémiste du non moins curieux « The Idiot » d'Iggy Pop) qui anticipent toute la cold wave à venir, dotée d'un sens de l'expérimentation hérité du krautrock et des formations underground fondatrices, l'ensemble appuyé par des paroles caustiques et narquoises : vous allez pénétrer dans un univers tiraillé perpétuellement entre la lumière la plus pure et les plus denses ténèbres. « Metal Box » respire autant l'austérité d'une usine désaffectée en plein cœur de l'hiver que la poussière d'un vieux cabaret art déco abandonné et hanté par son défunt personnel. L'album fut d'ailleurs enregistré au Manor Studio, propriété de Richard Branson et bâtisse paumée dans la campagne anglaise, très apprécié des progueux et des musiciens électroniques (Mike Oldfield et ses « Tubular Bells », TANGERINE DREAM et son « Rubycon ») dans laquelle John affirmera y avoir rencontré un fantôme dans un des couloirs. Il règne sur cet album une ambiance unique entre cauchemar et onirisme, rétro futurisme glacial et classicisme charnel. Une sensation d'enfermement dans un dédale post punk sous marin qui pourrait s'apparenter à un tombeau à l'échelle d'une ville mais où l'humanité résiste néanmoins et avec elle : la beauté originelle d'un monde qui ne veut pas mourir. Oui, « Metal Box », tout comme son concepteur John Lydon ne sont pas que sarcasme et nihilisme. C'est là toute la complexité et la grandeur de l'artiste et de son œuvre. Imprévisible et déconcertante, froide et en même temps profondément organique et humaine, d'apparence répétitive mais jamais soporifique : la musique de PIL est d'une richesse incroyable. Annonçant toutes les innovations à venir en matière de rythme, de structure et de son. New wave, électro, indus, toute la musique alternative des années 80 à nos jours est contenue dans cette « Metal Box ». Lydon et ses hommes de main s'accaparent l'ADN du rock pour mieux le dématérialiser et le façonner selon leurs ambitions, appliquant à la lettre la formule de l'immense Lavoisier : "rien ne se perd, rien ne se créer, tout se transforme."

Il y'a d'abord cette ligne de basse phénoménale qui vous harponne sans avertissement. Puis cette batterie typiquement post punk à la reverb accrocheuse. Puis cette guitare tranchante et remplie à ras la gueule d'effets en tout genre. Enfin, le chant de John Lydon (qui n'a jamais aussi bien chanté que chez PUBLIC IMAGE LIMITED). Les 10 minutes et quelques de « Albatross » se saisiront de votre âme et vous embarqueront pour le voyage le plus halluciné de votre vie. Les textes mélangent l'absurde de Beckett et la poésie de Coleridge (bah oui, l'albatros et sa malédiction qui s'abat sur le premier qui le dégomme, ça ne vous dit rien les métalleux ?), bien qu'il soit plutôt question ici de tuer l'esprit soixante-huitard et passer à autre chose. Tant pis pour les retardataires. John convoque autant les improvisations vocales de Damo Suzuki que les délires space de NEU! et HAWKWIND (que des artistes vénérés par le rouquin). Un monument de rock hypnotique qui s'achève sur un John visiblement pas tout seul dans sa tête et se prenant pour une soprano possédée. A l'image de cette ouverture iconoclaste : les morceaux ne correspondent à rien de commun dans le monde du rock fin 70's. L'immersion est totale, de « Poptones » (sa basse obsédante, sa guitare mécanique et son texte relatant une sinistre histoire d'enlèvement d'une jeune fille qui heureusement échappera à ses bourreaux), à « Swan Lake » ( Levene triture sa Travis Bean en alu comme un épileptique sur ce titre ultra punk en guise de fuck enragé destiné à l'existence et à cette sal... de maladie qui a emporté la mère de John ), de « Careering » ( effrayant avec ses claviers dérangés et dérangeants ), à « Graveyard » (une guitare agressive à souhait sur des nappes de synthés spectrales), en passant par « Bad Baby » (ces sons industriels tétanisants soutenus par la première contribution du géant Martin Atkins à la batterie), jusqu'au trio de fin, le cyber instrumental « Socialist » (la section rythmique y est prodigieuse), l'impitoyable « Chant », sorte de delirium tremens paramilitaire épaulé par la guitare sauvage et indomptable de Levene et des claviers à la « Eraserhead » qui laissent la place à « Radio 4 », instrumental d'une splendeur indescriptible avec ses synthétiseurs tissant une symphonie minimaliste mais tellement apaisante, sorte de pluie salvatrice dont la pureté vous lave de toute la crasse de la réalité tout en concluant l'album.

De retour dans sa dimension natale, l'auditeur se réveille. Comme si il sortait d'un rêve en forme de parcours du combattant cauchemardesque au bout duquel il serait entré en contact avec une énergie qui n'est pas de ce monde. Et ils sont nombreux à l'avoir vécu ce trip nocturne et abyssal dans la froideur d'un mois de novembre imaginaire. Flea ne se remettra jamais de la basse de Jah Wobble. The Edge déclarera tout devoir au jeu de Keith Levene. Moby considère l'album comme son préféré et l'un des plus influents du siècle. Toute la génération post punk revival revendiquera l'influence de PIL et de la boîte métallique.

Le punk avait eu les plus belles funérailles qui soient. Et PUBLIC IMAGE LIMITED avait marqué l'histoire de l'art à jamais. Une bien belle revanche pour ces petits gars venant de nulle part et qui ont su s'élever dans cette maudite société moderne et matérialiste avec leurs seuls atouts : le culot, la persévérance, la sincérité et la musique. Dire que l'histoire ne faisait que commencer.

Monumental et historique. Tout simplement.

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   (2 chroniques)



- John Lydon (chant)
- Keith Levene (guitare)
- Jah Wooble (basse)
- Dave Crowe (batterie)
- Jeanette Lee (claviers)


1. Albatross
2. Memories
3. Swan Lake
4. Poptones
5. Careering
6. No Birds
7. Graveyard
8. The Suit
9. Bad Baby
10. Socialist
11. Chant
12. Radio 4



             



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