En 1975, Alan STIVELL enregistre E Dulenn, ou Live à Dublin. En 1987, les CHIEFTAINS publient un hommage-retour à la Bretagne.

Avec Celtic Wedding, le groupe irlandais cherche en effet à mieux faire connaître la musique de la péninsule européenne dans son île, auprès de son public. Ce disque connaît différentes sorties avec au moins deux couvertures différentes : une en CD avec des dolmens, une en vinyle avec des chapeaux ronds et des danseurs traditionnels. J'en ai vu encore une avec une simple cartographie de la Bretagne.

Ce qui apparaît comme un hommage tient avant tout de l'exercice. Moloney et ses compagnons, contrairement à STIVELL et d'autres artistes bretons pour la musique irlandaise, n'ont peut-être pas, en tout cas peu, joué de musique bretonne avant de tenter ce disque, et cela s'entend un peu, dans une forme d'intention scolaire et un rien confuse parfois. Ce qui devrait s'apparenter aux danses de Bretagne, l'an dro, l'hanter-dro, la gavotte, le kost ar c'hoad, peut sonner comme une sorte de médiéval générique ou même, car on se refait difficilement, du gaélique, tout simplement.

Cela s'entend en particulier sur les "Marches" - airs visiblement empruntés au pays vannetais, l'un des viviers musicaux les plus populaires en Bretagne -, sur "Dañs bro-Leon" également, avec un goût prononcé pour le nord-ouest cette fois. Rien de grave cela dit car même si ce n'est pas le disque de musique bretonne le plus évident, ni le meilleur qui soit d'ailleurs, le rendu demeure agréable, tout comme l'idée, plutôt rare il faut le dire, d'y entendre une cornemuse irlandaise en instrument porteur. En revanche, il y a bien des bombardes, de façon régulière, aussi douces que des hautbois classiques par moments.

De plus, il y a la jolie voix de Nolwenn Monjarret sur plusieurs titres ("Celtic Wedding", "A Breton Carol", "Dañs bro-Leon"), chanteuse dont c'est hélas le seul effort réellement connu. Ses prestations apportent un petit plus, tout comme celle de Kevin Conneff qui nous réserve un "Ev Chistr 'ta, Laou !"."Son ar Chistr" bien senti. Le côté scolaire s'estompe ainsi, surtout si on se dit que l'effort est sincère, malgré tout. Les CHIEFTAINS ont leur capacité à créer de beaux arrangements, ensembles de flûtes, crescendo avec les violons, ruptures enchanteresses à la harpe, ajout du bodhrán, du tiompán... On s'en délecte sur tout le disque, même si les reprises de traditionnels (ou les compositions, dans le cas de "Heuliadenn Tonioù Breizh-Izel") ne sont pas mémorables.

Enfin, il y a "Celtic Wedding", illustrant les traditions bretonnes du mariage, qui vaut à elle seule le détour : 20 minutes au compteur ! La voix de Nolwenn Montjarret est bien mise en valeur pour une gwerz, plus loin sur une mélodie aux grands airs d'hymne sur fond d'orgue. Il faut savoir que le disque se termine de la même façon, contrairement aux habitudes qui veulent que les CHIEFTAINS réservent une danse endiablée pour conclusion. Diverses danses se succèdent, parfois brièvement, mais l'effort est beau, l'ensemble se tient. Derek Bell a un jeu qui rappelle parfois furieusement celui de MYRDHIN (à 2,00 min), de STIVELL aussi (les arpèges fuyants à la toute fin). Du grand art, au moins pour cette partie-là !