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MORRISSEY - You Are The Quarry (2004)
Par RICHARD le 11 Juin 2022          Consultée 775 fois

MORRISSEY depuis le début de sa carrière apparaît sans conteste comme un paradoxe vivant. C'est l'une des raisons sans doute pour lesquelles on l'adule ou le déteste si facilement. Il n'est pas toujours aisé de le suivre à vrai dire. Avec l'Anglais, le juste milieu, la tiédeur ne sont pas en odeur de sainteté. Un paradoxe, en quoi donc alors ? Il suffit ainsi de s'attarder par exemple sur les années 1998-2003 vierges de toute sortie d'album du Mancunien. Cinq années de silence pour une Grande Gueule bavarde comme la sienne, en voici une situation naturellement étrange et éminemment pesante. Tout comme celle également de partir vivre en ce temps à Los Angeles alors qu'il semblait viscéralement attaché à jamais à son Angleterre populaire et lettrée. Moz Angeles, comme l'appelaient les fans en ce début de siècle, semble un peu perdu et surtout bien seul.

Durant cette période d'abstinence discographique, l'ancien leader des SMITHS alterne toutefois tournées plutôt réussies, comme celle effectuée pour la première fois au Mexique ou au Brésil en 2000, et procès à n'en plus finir avec Mike JOYCE, l'ex-batteur du groupe culte, pour des raisons financières. Même si l'influence de l'Anglais a été palpable durant la phase Britpop ou chez certains groupes du nouveau millénaire, MORRISSEY est paradoxalement dépassé, voire, allez, j'ose le dire, ringard. Le dernier album en date Maladjusted était loin d'être convaincant et son rôle de diva misanthrope avec un avis sur tout et à force sur rien en a fatigué plus d'un. En 2004, lorsque sort You Are The Quarry, l'Anglais est pourtant encore dans une situation paradoxale : relativement discret, il est néanmoins attendu comme le messie pop depuis entre autres que le New Musical Express a élu les SMITHS groupe le plus influent de l'histoire de la musique. Amérique oblige, MORRISSEY a donc fait appel, pour produire ce septième album, à Jerry Finn connu pour ses travaux avec les pénibles SUM 41 ou BLINK-182. Voici notre amoureux de WILDE et KEATS en baggy et skate sous le soleil californien.

Ceci a naturellement de quoi surprendre et surtout exciter encore plus le curieux. Surprise, voici un mot qui colle bien à l'introductif "America Is Not the World". En effet, sous cette anecdotique et sirupeuse ballade aux effluves electro se dévoile à la fois une virulente critique et déclaration d'amour pour son nouveau pays d'adoption. Les mots du chanteur ne sont pas ici vraiment subtils. Heureusement, MORRISSEY retrouve rapidement sa plume acerbe et fine. A ce titre, le très beau "I Have Forgiven Jesus" fait indéniablement mouche. A travers un élégant jeu de clavier, le chanteur est prêt à pardonner à qui vous savez, même si celui-ci l'a placé dans un monde sans amour. A intervalles irréguliers, You Are The Quarry propose de trop rares envolées lyriques du plus bel effet à l'image de "The World Is Full Of Crashing Bores" qui remet notre Mancunien préféré dans le cercle des artistes qui comptent. Mais parfois, si la volonté de faire bien est là, elle ne se concrétise pas toujours. Le mitigé "Come Back To Camden" aurait pu être une superbe ballade de crooner amoureux déclarant sa flamme au quartier londonien, s'il n'y avait eu la présence agaçante de ces claviers so kitsch.

A l'instar de Ross Robinson qui a produit l'album des CURE cette même année 2004, la présence de Finn apporte elle aussi sur quelques titres une certaine puissance qui ne les écrase pas pour autant. Les deux excellents morceaux que sont "Irish Blood, English Heart" et "First of the Gang to Die" laissent ainsi la part belle aux guitares incisives et à une rythmique dynamique. MORRISSEY règle frontalement ses comptes avec ceux qui l'accusent entre autres d'être un sombre raciste et la liste pourrait être longue. Dans un registre un peu moins speed, l’entraînant "I Like You" ne saurait pour autant être négligé. La voix du Moz toujours aussi belle et sans artifice fait encore des merveilles. Le travail intelligent sur les claviers l'enrobe avec grâce. Mais ces trois petites bombes sont un leurre. Elles nagent, voire surnagent, au milieu d'un océan de langueur. Certes, l'Anglais n'a jamais été adepte d'un post-punk en mode accéléré, mais You Are The Quarry pris dans son ensemble a du mal à décoller et a même un petit goût d'ennui. L'Américain de cœur essaye de nous refaire l'ample hymne post-SMITHS façon "That Joke Isn't Funny Anymore" sur "All the Lazy Dykes" et malgré un inattendu apport electro, ça tombe à plat. C'est d'autant plus frustrant que retrouver MORRISSEY après une si longue attente est forcément agréable. Le faiblard pop "Let Me Kiss You" ou "You Know I Couldn't Last" et son alternance bancale de guitares victorieuses et de piano triste rappellent opportunément que le Grand Retour est loin d'être gagnant.

Sept années d'absence et voici You Are The Quarry couvert d'éloges. Sans être mauvais, cet album ne mérite pas pour autant d'être porté au pinacle. Irrégulier et un brin monotone, il a tout du faux départ, même si paradoxalement MORRISSEY revient de loin.

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   RICHARD

 
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- Morrissey (chant)
- Alain Whyte (guitare,chœurs)
- Boz Boorer (guitare)
- Gary Day (basse)
- Dean Butterworth (batterie)
- Roger Manning (claviers)


1. America Is Not The World
2. Irish Blood, English Heart
3. I Have Forgiven Jesus
4. Come Back To Camden
5. I'm Not Sorry
6. The World Is Full Of Crashing Bores
7. How Can Anybody Possibly Know How I Feel?
8. First Of The Gang To Die
9. Let Me Kiss You
10. All The Lazy Dykes
11. I Like You
12. You Know I Couldn't Last



             



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