En août 1998, à Mazar-I-Sharif, 4ème plus grande ville d’Afghanistan et probable tombeau du prophète Zarathoustra, un massacre de 6000 civils (principalement des Hazaras) a été commis par les Talibans.
C’est l’occasion pour le plus en plus hyperactif MUSLIMGAUZE d’un énième album en forme de cocktail molotov. Vivant comme en une sorte d’univers non pas parallèle mais essentiellement rythmée par l’actualité orientale, sa musique est littéralement devenue, depuis la brutale invasion du Liban par Israël en 82 jusqu'à la fin tragique de janvier 99, le reflet de toutes les tensions, de toutes les convoitises que l’Orient pas si lointain suscite de part et d’autre du globe.

On entre ici tout d’abord sur la pointe des babouches, attiré par la douceur d’une voix féminine en extase, avant que, subitement, le piège ne se referme sur nous, auditeur aussi captif que l’insecte alléché par l’odeur de la plante carnivore.
Faussement bordélique et vraiment jouissif, "Rezin Of Joy" est probablement l'un des titres les plus abrasifs de l’ami Bryn, qui donne rapidement le ton en terme de niveau sonore extrêmement élevé, comme la plupart de ses derniers travaux.
Précédé par un "Mosul" bien gras, technoïde et joyeusement redondant, "Bandar Abbas", avec son gros beat électro entêtant, saturé de scratch-à-la-Gauze*, et sa grinçante, hypnotique cithare, est le moment 'soleil' de ce sauvage album.
Les deux dernières pistes (l’avant-dernière surtout) sont plus des commodités, pas du tout désagréables mais pas tout à fait transcendantes non plus.

Comme à son habitude, MUSLIMGAUZE ne déçoit pas, jamais. Mazar-I-Sharif n’est certes pas la meilleure de ses foisonnantes productions, mais cette épicée galette contient tout de même et assez facilement son petit lot de bonnes et enivrantes surprises.


* Technique surexploitée par Bryn Jones et qui, concrètement, consiste à passer de manière abrupte, sans ménagement mais non pas sans style, d’un mode étouffé-soyeux à un certain niveau de distorsion.