Yves a déjà 27 ans lorsque sort son deuxième album. Le succès de ses premières chansons est cependant de bon augure pour la suite de sa carrière. Le créneau qu'il occupe : de la chanson française traditionnelle ornée de textes souvent romantiques ou parfois descriptifs de la vie quotidienne, en fait un ovni dans la scène française de cette époque. Ne vous fiez pas trop à son look de jeune godelureau de gauche aux cheveux longs. Notre homme est réfléchi, plein de bon sens et d'une sanité à faire peur. A défaut d'être un rebelle ou un révolté, nous voici donc face à un jeune baladin plein de beaux sentiments.

Et puisqu'on en parle, c'est avec "Dans les jardins des baladins" que s'ouvre cet opus. Beaucoup de ressemblance avec ce que fait Francis CABREL à cette même époque, sans l'accent ! Et avec les intonations si spécifiques, un peu naïves, dont il va devenir le spécialiste. "La vallée tranquille" sort du même tonneau, si vous aimez l'homme d'Astaffort, vous devriez écouter cette compo. Les chansons s'articulent autour d'accords cristallins de guitare folk. Ainsi, "Le mur de lierre" reprend dans une ambiance countrysante le thème si cher à l'artiste de la maison autour de laquelle vit la famille, dans une harmonie qui doit sonner incompréhensible aux générations d'aujourd'hui.

Et du romantisme de partout, comme s'il en pleuvait ! La superbe complainte "J'attends" vous ravira si vous êtes fan d'amour éperdu, une magnifique ode aux sentiments les plus nobles qui me paraît incritiquable. Et toujours l'amour. "Une lettre" propose une ambiance à la Julien CLERC, des arpèges doucereux, des cuivres qui enrobent tranquillement le tout, et même un joli solo de guitare ! Bien agréable ! Il nous refait le coup de "Un lilas pour Eulalie" sur "Vole à tire d'ailes, nage à tire d'eau", tout aussi réussi, confirmant ainsi qu'il est un véritable acrobate des rimes.

On retrouve aussi l'émule de Georges BRASSENS sur "Les batignolles", petite course échevelée dans les rues de Paris, réminiscente de ces jeunes années. Sans doute mon titre préféré de cet album, incontestablement moins original que le premier. Nul doute d'ailleurs que "Quand les bateaux reviennent" eût plu à l'artiste sétois.
D'ailleurs, comme son illustre aîné, il aime à décrire les métiers traditionnels comme dans la mignonne "Tisserand". Plus loin, une autre petite bossa nova confirme son goût pour la musique sud américaine, il s'agit de "Le labyrinthe", radicalement différente de ces chansons habituelles.

Il manque probablement à cet album des compositions classiques comme "L'écritoire" ou "Virages" pour atteindre la note de 4 étoiles, je reste donc ici sur un solide 3. Il reste à Yves DUTEIL à trouver les mélodies qui feront de lui un des artistes majeurs de la chanson française.